
Au Mali, la douleur se mêle à la peur. Depuis la découverte de plusieurs corps en décomposition aux abords du camp militaire de Kwala, dans l’ouest du pays, les familles des disparus vivent dans l’incertitude la plus totale. Cette scène macabre, survenue dans la nuit du 22 au 23 avril 2025, a ravivé les soupçons sur des exactions qui impliquent les forces armées maliennes et leurs alliés russes du groupe Wagner.
Alors que les témoignages se multiplient, la communauté peule semble, une fois de plus, en être la principale victime.
Une scène d’horreur à Kwala
C’est dans une atmosphère suffocante que treize corps ont été retrouvés en putréfaction avancée près du camp militaire de Kwala. Les images, filmées par des habitants, ont rapidement circulé. Elles dévoilent des cadavres difficilement identifiables. Un témoin affirme avoir reconnu un proche grâce à une amulette, tant les corps étaient méconnaissables. D’autres évoquent des liens encore visibles. Cela suggère que certaines victimes auraient été exécutées les mains attachées. La peur s’est aussitôt propagée dans les villages alentours. Effrayées, les populations ont fui tandis que des hélicoptères survolaient la région.
Les soupçons se tournent vers l’armée et Wagner
Depuis le 12 avril, plusieurs dizaines d’hommes, entre 65 et 70 selon des estimations locales, ont été arrêtés lors d’une rafle sur le marché de Sébabougou. Ils auraient été emmenés au camp militaire de Kwala par les Forces armées maliennes (FAMA) et leurs supplétifs du groupe Wagner. Un survivant, réfugié depuis en Mauritanie, raconte avoir été interrogé, battu, puis conduit hors du camp pour y être exécuté avec d’autres. Il a survécu en faisant le mort et affirmé avoir vu près de 70 cadavres. Ces récits corroborent les témoignages d’autres rescapés, aujourd’hui en fuite.
Une chasse ciblée contre les Peuls ?
Les organisations communautaires dénoncent une chasse ciblée contre les Peuls, régulièrement accusés à tort d’être liés aux groupes jihadistes. Une cinquantaine de personnes portées disparues depuis la rafle appartiennent à cette communauté. Déjà stigmatisée au Burkina Faso et dans d’autres régions du Sahel, la communauté peule semble faire face à une nouvelle vague de répression violente qui renforcent son isolement. Les jihadistes eux, exploitent ces injustices pour recruter davantage.
Le silence des autorités et la peur du vide
Face à ces accusations graves, les autorités maliennes gardent le silence. Aucune enquête officielle n’a été annoncée. Le silence institutionnel, couplé à l’absence de recours pour les familles, alimente la colère et le désespoir. Alors que certains tentent encore d’identifier les victimes, d’autres fuient le pays. Ils abandonnent espoir et justice. L’affaire de Kwala pourrait bien s’ajouter à la longue liste des drames impunis dans un Sahel en proie à une spirale de violence sans fin.