La Cour pénale internationale (CPI) a condamné, mercredi 20 novembre 2024, Al-Hassan Ag-Abdoul Aziz Ag-Mohamed Ag-Mahmoud à une peine de dix ans d’emprisonnement. Ce verdict marque une étape importante dans la lutte contre l’impunité pour les crimes graves commis au Sahel, notamment durant l’occupation djihadiste dans le nord du Mali entre 2012 et 2013.
Membre influent du groupe Ansar Dine, affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), Al-Hassan a été reconnu coupable, en juin dernier, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Ces accusations portaient sur des actes de torture, des traitements cruels et des atteintes à la dignité humaine perpétrés dans la ville de Tombouctou. Le tribunal a notamment établi son rôle dans les flagellations publiques de plusieurs habitants et dans l’application d’un système répressif au nom de la « police islamique ».
Condamnation exemplaire contre Al-Hassan
Lors de l’audience, le juge Antoine Kesia-Mbe Mindua a souligné que la gravité des crimes justifiait une condamnation exemplaire. « Les actes commis par Al-Hassan ont profondément marqué les victimes et la communauté de Tombouctou », a déclaré le juge. Cependant, la Cour a également pris en compte certaines circonstances atténuantes, notamment la coopération partielle de l’accusé avec les enquêteurs et ses efforts limités pour aider des civils durant la période concernée.
Cette affaire est la preuve de l’engagement continu de la CPI dans la poursuite des responsables de violations massives des droits humains en Afrique. Elle rappelle également d’autres condamnations similaires prononcées par la Cour. En 2016, la CPI avait condamné Ahmad Al Faqi Al Mahdi, également lié à Ansar Dine, à neuf ans de prison pour la destruction de mausolées historiques à Tombouctou. Ce précédent a été le premier cas où des destructions de patrimoine culturel ont été reconnues comme un crime de guerre.
Condamnation de Jean-Pierre Bemba
Dans un autre registre, la CPI avait condamné Thomas Lubanga en 2012, chef de milice en République démocratique du Congo (RDC), à 14 ans de prison pour avoir recruté et utilisé des enfants soldats dans les conflits armés en Ituri. Jean-Pierre Bemba, ancien vice-président de la RDC, avait quant à lui été condamné à 18 ans de prison, en 2016, pour des crimes de guerre commis en République centrafricaine, avant que sa condamnation ne soit annulée en appel deux ans plus tard.
Pour le Mali, la condamnation d’Al-Hassan revêt une importance particulière. Elle met en évidence les exactions commises sous l’occupation des groupes djihadistes entre 2012 et 2013, une période durant laquelle Tombouctou a été le théâtre d’une répression brutale. La ville, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, a également subi des destructions importantes de sites religieux et culturels.
Critiques persistantes envers la CPI
Al-Hassan avait été arrêté en 2018, après qu’un mandat d’arrêt avait été émis par la CPI. Il a été transféré à La Haye peu après son arrestation. Après plusieurs années de procédure, les charges contre lui ont été confirmées en 2019. Ce qui ouvrait la voie à un procès suivi de près par les défenseurs des droits humains et la communauté internationale. La défense a toutefois laissé entendre qu’un appel pourrait être interjeté contre cette décision.
Si le verdict est confirmé, un État membre de la CPI sera désigné pour exécuter la peine de prison, conformément aux règles de l’institution. Au-delà de son impact juridique, cette condamnation envoie un message fort aux acteurs impliqués dans des conflits armés en Afrique et ailleurs. Seulement, les critiques envers la CPI persistent. L’institution a souvent été accusée de cibler de manière disproportionnée les responsables africains.