Madagascar peine encore sur la voie des énergies renouvelables


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Pylône pour transporter l'électricité
Pylône pour transporter l'électricité

Alors que la majorité des Malgaches n’ont pas accès à l’électricité, l’essentiel de la production électrique de l’île repose encore sur les combustibles fossiles. Si Madagascar peut s’appuyer sur un immense potentiel en termes d’énergies renouvelables, les financements manquent encore à l’appel et aucune sortie de crise n’est envisageable sans apurer, au préalable, les comptes de la compagnie nationale d’électricité (Jirama). Autant de défis qui attendent Olivier Jean-Baptiste, le nouveau ministre de l’Énergie d’un pays à la croisée des chemins énergétiques. Même si, longtemps passé chez les pétroliers, il pourrait être tenté d’orienter les financements vers son secteur de prédilection.

Au chapitre « transition énergétique du XXIe siècle », les livres d’histoire du futur évoqueront-ils un « paradoxe malgache » ? La Grande Île, comme elle est parfois surnommée, condense en effet les éléments d’une équation remarquablement déséquilibrée : à la tête, selon la Banque mondiale, d’un « énorme potentiel en énergie » renouvelable – et notamment solaire –, le pays ne parvient qu’à raccorder 33 % de sa population au réseau électrique. D’après les chiffres du ministère malgache de l’Energie, Madagascar a en effet, avec seulement 3,6 MWh/hab/an, l’une des consommations d’énergie par habitant les plus faibles au monde.

« La force du soleil » : l’inépuisable potentiel malgache dans les renouvelables

Dans quel terreau plongent les racines du « paradoxe énergétique malgache » ? Premièrement, dans l’hyper-dépendance du pays aux énergies fossiles : celles-ci représentent, selon la Banque mondiale, 60 % de la capacité électrique installée – les 40 % restants étant d’origine hydroélectrique ; une proportion de centrales thermiques qui est même évaluée à 77 % de la capacité installée par le ministère malgache de l’Énergie. « Mais dans les faits », précise la Banque mondiale, « 60 % de cette énergie est réellement disponible, à cause de la maintenance insuffisante des centrales ».

Par ailleurs, la distribution de l’électricité, assurée par la Jirama, la compagnie nationale d’électricité et d’eau, est victime de la vétusté et du sous-dimensionnement du réseau. Résultat : les clients malgaches de la Jirama, particuliers comme entreprises, font face à de très régulières coupures de courant, ou « délestages ». Enfin, différents d’une région malgache à l’autre, les tarifs d’acheminement de l’électricité sont tels qu’ils nécessitent d’être subventionnés par l’État. « Au-delà du fait qu’elles minent le quotidien (des) habitants, ces difficultés du secteur de l’énergie sont l’un des principaux obstacles au développement du pays et à l’expansion du secteur privé », déplore la Banque mondiale.

Il pourrait en être autrement. Madagascar dispose, d’après son Agence pour le développement économique (EDBM), de tous les atouts pour enclencher son virage énergétique. Et notamment : d’un « potentiel hydroélectrique gigantesque », estimé à 7,8 GW, mais seulement exploité à hauteur de 2 % ; d’une « ressource solaire exemplaire et uniformément répartie », Madagascar bénéficiant de plus de 2 800 heures de soleil par an, soit les « potentiels maximums parmi les plus élevés au monde » ; d’un « potentiel éolien encore inexploité », d’une capacité théorique de 2 000 MW ; etc. Pour la Banque mondiale, cette inépuisable « force du soleil » fait donc de « la Grande Île (…) le candidat idéal pour développer le solaire (et) fournir un accès à l’énergie à 70 % des ménages malgaches d’ici 2030 ».

Les défis du nouveau ministre de l’Énergie

Des capacités théoriques à la pratique, Madagascar franchit peu à peu le pas. D’après son ministère de l’Énergie, au moins une quarantaine de projets d’énergies renouvelables seraient dans les tiroirs. En périphérie de la capitale, Antananarivo, les futures centrales hydroélectriques de Volobe et Sahofika devraient, à terme, pouvoir fournir environ 300 MG d’électricité à la métropole. Une véritable « opportunité pour stabiliser, développer l’accès à l’électricité et améliorer la situation financière de la Jirama », selon le ministère, qui met en avant des coûts de production « bien inférieurs à ceux des centrales thermiques », avec des tarifs d’accès à l’énergie divisés par 2, voire par 4. L’éolien progresse aussi, avec le lancement, le 27 avril, du chantier du premier parc malgache, qui produira d’ici l’année prochaine 16 MG d’électricité.

Tous ces efforts sont coordonnés par le nouveau ministre de l’Énergie, Olivier Jean-Baptiste. S’appuyant sur un solide bagage universitaire comme professionnel, celui-ci doit accélérer la transition énergétique malgache… tout en soldant le passé – et le passif – fossile de l’île. Un héritage thermique qui vaut à la Jirama d’être lourdement endettée auprès des producteurs d’hydrocarbures, mais aussi d’énergies renouvelables. Des arbitrages opérés par M. Jean-Baptiste dépendra donc, en quelque sorte, l’avenir énergétique de Madagascar : le nouveau ministre, qui a longtemps travaillé pour des groupes pétroliers, cédera-t-il au lobby des pétroliers ? Ou choisira-t-il, au contraire, d’envoyer un signal fort en misant sur le renouvelable ?

Quoi qu’il en soit, apurer les dettes de la Jirama fait figure de priorité pour relancer la compagnie nationale d’électricité sur de bons rails. « Jusqu’à quand ? » ; « cela fait deux heures » : sur les réseaux sociaux, les clients de la Jirama n’ont pas de mots assez durs pour condamner les délestages et l’immobilisme de l’entreprise publique. L’intervention, volontariste, de l’État, ne s’est que trop faite attendre. Mais la puissance publique ne pourra pas tout.

Pour aider Madagascar à rattraper son retard électrique, l’aide des bailleurs internationaux est également plus que bienvenue. L’île rouge peut ainsi compter sur le soutien de la Société financière internationale (IFC), une filiale de la Banque mondiale qui participe depuis 2016 au financement d’une centrale solaire connectée à Antananarivo ; ou encore de Sustainable Energy For All, une organisation qui soutient le déploiement de mini-réseaux particulièrement adaptés aux zones rurales reculées.

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