
En visite à Madagascar, Emmanuel Macron a annoncé l’entrée d’EDF dans le projet hydroélectrique de Volobe, destiné à fournir de l’électricité à deux millions de personnes. Il a aussi renforcé la coopération militaire et réaffirmé l’influence française dans l’océan Indien. La visite aborde également les questions mémorielles, avec la restitution de restes humains coloniaux et des appels à faire toute la lumière sur les violences de la colonisation.
Lors de sa visite officielle à Madagascar, Emmanuel Macron a annoncé un partenariat stratégique entre EDF et le projet hydroélectrique de Volobe, le plus ambitieux du pays. Ce projet vise à doter Madagascar d’une capacité de production de 120 mégawatts, dans un pays où les deux tiers de la population n’ont toujours pas accès à l’électricité. EDF entre dans le capital du projet à hauteur de 37,5%, aux côtés du conglomérat malgache Axian et de la plateforme Africa50. Le barrage, situé le long de la rivière Ivondro sur la côte est de l’île, nécessitera un investissement estimé à 600 millions d’euros et permettra de fournir de l’électricité à deux millions de personnes.
Défis sécuritaires croissants dans la région
Le projet était à l’arrêt depuis 2015, mais ce nouvel engagement devrait relancer sa construction. Au-delà des questions énergétiques, cette visite s’inscrit dans une stratégie diplomatique plus large. Emmanuel Macron cherche à renforcer la présence et l’influence de la France dans l’océan Indien, dans le cadre de sa stratégie indo-pacifique. Avant d’arriver à Antananarivo, il avait visité Mayotte et La Réunion, réaffirmant que la France disposait de plus de 8 000 militaires dans cette région stratégique. Il a également assisté à la Commission de l’océan Indien, insistant sur le rôle que les territoires français peuvent y jouer. Il souhaite, par exemple, rendre Mayotte éligible aux programmes de la Commission, malgré l’opposition des Comores.
Sur le plan géopolitique, Macron a souligné les défis sécuritaires croissants dans la région, évoquant sans les nommer les rivalités avec d’autres puissances. Dans ce contexte, il a mis en avant l’opération Tulipe, un exercice militaire régional mobilisant 500 soldats français dans le nord-ouest de Madagascar. Ce déploiement met en relief l’intensification de la coopération militaire entre Paris et Antananarivo. Le Président français a aussi abordé des sujets sensibles comme la mémoire coloniale. Il a rappelé la décision de restituer à Madagascar, en août prochain, trois crânes de guerriers malgaches tués pendant la colonisation, conservés jusque-là au musée de l’Homme à Paris.
Litiges territoriaux dans le canal du Mozambique
Ce geste s’inscrit dans une volonté d’apaisement des relations et d’ouverture d’un nouveau chapitre mémoriel. Macron a réaffirmé que Madagascar était « au cœur de la stratégie de restitution » de la France. Cependant, plusieurs historiens malgaches estiment que ces gestes symboliques ne suffisent pas. Ils réclament la mise en place d’une commission indépendante, comme celle créée au Cameroun, pour faire la lumière sur les violences coloniales à Madagascar. Les attentes sont particulièrement fortes concernant l’insurrection de mars 1947, violemment réprimée par l’administration coloniale française, avec un nombre de victimes estimé entre 10 000 et 100 000 selon les sources.
Des chercheurs dénoncent le manque d’accès aux archives coloniales, notamment celles de la Sûreté générale, qui pourraient permettre de mieux comprendre les mécanismes répressifs de l’époque. Enfin, un autre enjeu central de la visite concerne les litiges territoriaux dans le canal du Mozambique. Long de 1 500 kilomètres, ce couloir maritime entre Madagascar et le continent africain est devenu un axe stratégique important depuis les perturbations du trafic dans la mer Rouge. La zone est convoitée pour sa position géographique, mais aussi pour ses ressources naturelles : poissons, pétrole et gaz, dont les exploitations ont déjà commencé en Tanzanie et au Mozambique. Madagascar revendique plusieurs îles de cette région, ce qui complique les relations diplomatiques et attise les tensions.