Johannesburg, 6 juin 2013 – Arrivé à Johannesburg samedi dernier, je revenais sur cette terre qui depuis longtemps a été célèbre pour sa politique ségrégationniste connu sous le nom de l’apartheid. Un séjour mémorable puisque j’ai rencontré Nelson Mandela en personne.
(De notre envoyé spécial)
Après une réunion forte intéressante avec mes deux partenaires sud-africains, je reçois un courriel quelques temps après « Hello Brother, come greet the old man. Our address is….» (« Salut frangin, passe dire bonjour au grand père. Notre adresse est…»).
J’avais du mal à y croire moi-même, alors je contacte certains amis afin de me rassurer que je ne rêvais pas. Des nuits blanches, j’en ai passées mais comme celle la qu’une seule fois. C’était la nuit du 12 avril 2004 quand j’attendais impatiemment la naissance de ma petite princesse, ce petit ange envoyé du ciel sur les ailes de l’amour.
Je passe des heures entières a lire et relire ce même courriel, j’ai du mal à y croire… J’appelle mon cousin à Calais pour lui raconter ça, lui avec qui nous avions passé tout le mois de juin 2010 ici même à Johannesburg pour la Coupe du Monde. Et là je repense à mon oncle Lao qui à 11 ans m’a fait découvrir ce personnage en m’amenant à la Fête de l’Humanité à Lyon. Nous passions du temps à faire signer des pétitions pour la libération du plus vieux prisonnier du monde.
Mardi matin ayant encore du mal à y croire, je quitte ma chambre à 5h du matin pour aller faire mon jogging quotidien, en regardant mon téléphone régulièrement en attendant de recevoir un « désolé c’est annulé ». Je ne sais pas pourquoi, c’était tellement inconcevable pour moi le petit immigré tchadien qui a grandi dans les quartiers prétendus de ZEP (Zone d’éducation prioritaire) de Bron.
Après avoir bien traîné dans la salle de gym, je retourne à mon hôtel, je vois un chauffeur qui était bien en avance en train d’attendre. Tout ce qu’il savait c’est qu’il devait venir me chercher sans plus… Là, je me dis, c’est vrai alors. Je me dépêche pour aller me changer.
Un quart d’heure de route et nous voilà arrivés devant la résidence hyper sécurisée. Je reste devant la porte environ 5 minutes avant de sonner. Un agent de sécurité ouvre la porte, « Comment puis-je vous aider ? » Je lui montre tout simplement le message reçu la veille. « OK, appelez-le il viendra vous chercher ».
Cinq minutes plus tard, Ndaba* arrive avec un « Welcome brother, happy you made it, let me check on the old man » (bienvenu frangin, content que t’aies pu te libérer, laisse moi voir ce que fait le grand-père). Je reste seul à attendre dans cette immense propriété en contemplant la piscine entourée de palmiers et cette herbe luxuriante.
« The old man will be ready shortly » (le grand-père sera bientôt prêt). Aucun problème pour moi, ça fait 27 ans que j’attendais ce moment donc une heure ou un jour de plus ne sera pas un problème. Alors nous décidons d’aller tuer le temps en s’essayant au basket sur le terrain de tennis transformé pour l’occasion en terrain de basket.
Pendant la visite de l’immense propriété, on me dit « The old man is ready, you can come » (Le grand-père est prêt, tu peux venir).
J’arrive dans la cuisine d’abord et je suis présenté à Graca Machel* en tant que « This is a brother from Chad » (C’est un frère qui vient du Tchad). Graca Machel : – « Oh nice, it’s great to have friends from all over the world. It’s the first time we have a guest from Chad visiting us a home. Welcome » (Ah oui, c’est bien d’avoir des amis de tous les coins du monde, c’est la première fois que nous recevons un invité du Tchad, en tous cas bienvenu).
Je traverse la cuisine et j’arrive dans le salon, à ma droite sa bibliothèque personnelle avec une grande peinture et des tas de livres. Je vois des cheveux blancs d’abord, je m’approche doucement, le vieil homme est couché et regarde la télévision. « Gandapa this is Bah-Pna, our guest from Chad », je l’observe. Je ressens le même effet que ce 13 avril 2004 quand pour la première fois j’ai pu sentir ma fille dans mes bras.
Je lui serre la main une fois, puis une seconde fois. Je reste debout et le grand-père me dit « Please have a sit » (Bienvenu, assieds-toi). Le vieil homme c’est Nelson Mandela. Après quelques instants passés à ses côtés, ce n’était pas un rêve mais bien une réalité. Je quitte la demeure quelque temps après. J’aurais aimé immortaliser ce moment avec une photo, mais Madiba est dans un état d’extrême fatigue. Ce moment restera gravé à jamais dans ma mémoire.
Conscient que ce n’est pas tous les jours que cela arrive, j’ai décidé de partager ces moments avec les êtres qui me sont chers en inscrivant leurs noms sur les pierres ornant le jardin de Utata Madiba. Certains le rencontreront un jour, certains jamais, mais une chose est sûre leurs noms sont inscrits sur les cailloux ornant le jardin de Utata Madiba…
Ainsi, je quitte l’Afrique du sud avec en tête les citations de Howard White : « Never let your dream die. You may have to sell them but there is always someone willing to buy if you are tenacious. Spread your wings, believe in yourself and fly »; Thoreau : « Go confidently in the direction of your dreams! Live the life you’ve imagined. As you simplify your life, the laws of the universe will be simpler » ; et bien sûr de Spike Lee « Do the right thing ».
J’appelle le chauffeur pour qu’il me rejoigne. Il me regarde « T’es sûr que je peux venir, t’es sûr, t’es sûr ? ». Hyper ému, il me dira plus tard : « J’ai vécu toute ma vie ici, je ne les ai vus qu’à la télévision et dans les journaux, jamais je n’aurai cru que ça serait possible. »
Ndaba nous raccompagne à la porte, on prend le temps d’immortaliser ce moment avec lui et il me dit « Hey brother thank you again, we hope to see you again for Grandpa’ 95th birthday ? » (Hey frangin, merci encore d’être venu. On espère te voir encore pour les 95 ans du grand-père ?)
Cette expérience sera naturellement un récit que je rajouterai dans mon livre de mémoires que j’espère un jour publier… « Gift to my daughter & Dream from my mother and sister : Thoughts on reclaiming the African dream ».
• Ndaba est le petit fils de Nelson R. Mandela
• Grace Machel est l’epouse de Nelson Mandela
Infos supplémentaires :
Ndaba Mandela et Kweku Mandela ont décidé de collaborer avec Bah-Pna Dahane de Weina pour l’organisation du 95e anniversaire de Nelson Mandela. Pour plus d’information sur comment participer à l’anniversaire, contacter Weina Ltd : info@weinaltd.com
Bah-Pna Dahane, spécialiste de l’Afrique, est Consultant International en Marketing Sportif et Développement d’affaires. Il est actuellement consultant auprès de Richard Attias sur le NY Forum Africa