M23 : la société civile du Nord-Kivu crie son ras-le-bol et menace d’appeler à une révolte populaire


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Rebelles du M23 actifs en RDC
Des rebelles du M23

Au Nord-Kivu, les affrontements continuent entre les Wazalendo et le M23. Tout ceci dans un contexte de cessez-le-feu décrété, il y a quelques mois, par l’EAC (East African Community). Une situation que la société civile du Nord-Kivu supporte de moins en moins.

Depuis environ un mois, le groupe des Wazalendo a pris les armes pour affronter le M23 dans les territoires de Rutshuru et Masisi, dans le Nord-Kivu. Des affrontements violents qui poussent le Bureau de coordination provinciale de la Société civile Forces vives du Nord-Kivu à sortir de sa réserve pour interpeller le Président Félix Tshisekedi. Pour cette société civile, le pouvoir central doit rompre avec les « carcans cruels du cessez-le-feu ». Et ceci, dans un délai de deux semaines : « Face à cette situation, la Société civile Forces vives du Nord-Kivu donne (au gouvernement, ndlr) un ultimatum de deux semaines pour abandonner (…) l’aventure diplomatique et libérer tous les espaces sous l’emprise du M23-RDF. À défaut d’y satisfaire, elle invitera la population à la révolte », ont déclaré les responsables de cette société civile.

Une politique de deux poids deux mesures

Pour les responsables de la société civile du Nord-Kivu, l’EAC et la communauté internationale appliquent une politique de deux poids deux mesures dans la situation que traverse l’Est de la RDC. Pour eux, des voix s’élèvent de toutes parts pour exiger un arrêt des hostilités quand les milices locales prennent le dessus sur le M23. Mais, quand c’est le contraire, il règne un silence assourdissant. Comme exemple : « Mardi 10 octobre 2023, son Excellence Uhuru Kenyata, facilitateur des pourparlers de Nairobi par son communiqué, a appelé à la cessation immédiate des combats entre les groupes d’autodéfense Wazalendo et les rebelles du M23/RDF tout en mentionnant que la solution reste politique et non militaire. Jeudi 12 octobre 2023, l’ambassade des USA à Kinshasa a publié un communiqué dans lequel elle appelle aussi à la cessation des hostilités et privilégie la solution politique et non militaire », fait observer la société civile.

Et de poursuivre pour souligner le contraste : « En dépit d’un calme précaire qui était observé sur le théâtre des affrontements sur demande de l’EAC et de la communauté internationale depuis la reprise de la cité de Kitshanga par les forces d’autodéfense dites Wazalendo en début du mois d’octobre 2023, les terroristes du M23-RDF ont réattaqué et réoccupé la même cité de Kitshanga en territoire de Masisi, Kinyandonyi, Murimbi, Butare, Marangara et Kabizo en territoire de Rutshuru en date du 21 octobre 2023 sous un silence coupable et complice de l’EAC et de la communauté internationale ».

Les responsables de la société civile Forces vives du Nord-Kivu s’offusquent de l’immobilisme du gouvernement congolais et son attachement à un « cessez-le-feu hypocrite » face aux massacres de populations civiles qui se poursuivent dans la province.

Un soutien tacite du gouvernement aux Wazalendo

Au cours d’une conférence de presse conjointe organisée, lundi, avec son collègue porte-parole du gouvernement, le ministre congolais des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, a déclaré : « Un autre point important à noter est que la population est présente et nous dit qu’elle ne se sent pas protégée. Nous continuerons à renforcer la sécurité en collaboration avec la population. C’est pourquoi il y a le phénomène Wazalendo, et nous en prenons bonne note ».

Avant d’enchaîner : « Nous ne pouvons pas ignorer le fait que nous avons une Constitution qui oblige chacun d’entre nous à défendre la République, l’État, l’intégrité territoriale, les populations et les lois de la République. Ainsi, il est inacceptable de reprocher à un Congolais de se lever, de prendre les armes, de faire preuve de courage et de défendre le pays. C’est on ne peut plus clair. Aucun pays digne de ce nom n’agirait différemment ». C’est dire que le gouvernement congolais apporte un soutien tacite aux Wazalendo. Sans plus.

Il faut rappeler que les Wazalendo ont été, le 30 août 2023, victimes d’un massacre des forces armées congolaises pour avoir voulu organiser à Goma une manifestation contre la présence de la MONUSCO. La violente répression de cette manifestation avait coûté la vie à une cinquantaine de membres de la secte et blessé des dizaines d’autres. Le procès organisé à la suite de ce carnage a abouti à la condamnation à mort du colonel Mike Mikombe, commandant de la Garde républicaine, l’unité soupçonnée d’avoir été au-devant de la tuerie. Les soldats Mwati Musembua, Mbaya Mbaya Fabrice et Amita Bangala Daniel ont, pour leur part, écopé chacun de 10 ans de prison ferme.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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