Les lutteurs sénégalais font de plus en plus d’émules au pays de la Téranga, notamment chez les jeunes. De plus en plus d’enfants taquinent la discipline, non pas pour en faire un métier, mais par pur plaisir. Pourquoi la lutte attire-t-elle tant les enfants.
De la lutte simple avec beaucoup de sérieux
Dans les cours des écoles, dans la rue, au terrain de football… Partout au Sénégal, on rencontre des lutteurs en herbe. Ce sont des jeunes, souvent âgés entre 5 et 15 ans, parfois plus, qui se jaugent entre eux à travers des combats de lutte. Si dans l’arène sénégalaise, les combats livrés et diffusés se font avec frappe, les enfants qui taquinent ce sport roi ne se donnent pas de coup. C’est de la lutte simple que font ces chérubins avec beaucoup de sérieux.
« Non, prend-lui la jambe, tu pourras facilement le faire chuter ». Ces conseils sont d’un coach en herbe, qui assiste à un combat de lutte sans frappe, aux abords de la route nationale. Sous le regard de passants, deux jeunes talibés se jaugent. Tellement ils sont sérieux dans leur exercice que certains croyaient qu’ils se battaient. Chacun d’eux sortait les clés techniques qu’il avait dans sa besace. Des techniques vues chez le voisin d’à côté ou à la télé.
Des combats qui ont soulevé des passions
Surtout que ces derniers temps, ce sont de beaux combats qui sont diffusés à la télé. En effet, il y a eu des chocs de titans comme Bombardier / Reug Reug, Modou Lô / Ama Baldé et autre Modou Lô / Boy Niang. Des combats de ténors qui avaient drainé des foules, mais aussi soulevé des passions. Et c’est cette ambiance des arènes qui semble être restée dans les cœurs. Laquelle ambiance qui pousse les enfants à s’approprier la discipline pendant quelques semaines, voire des mois encore.
« Hé, arrêtez ce combat de lutte avant que vous ne vous blessiez ! », interpelle un passant, sans s’arrêter. Il poursuit, en effet, son chemin, en murmurant. Ce qu’il dit nous intéresse, nous poussant à l’interpeller. « Je suis persuadé qu’ils sont galvanisés par les dizaines de millions perçus par les lutteurs. Ce sont des sommes faramineuses qui peuvent faire tourner la tête même aux adultes. Combien de fois les enfants ». Telle est la réponse donnée par notre interlocuteur.
« J’allais exercer le métier de lutteur, si… »
L’homme continue de marcher pour traverser la route nationale, mais prend le soin de nous en balancer une phrase. « Si c’était à refaire, je n’allais pas devenir chauffeur, j’allais exercer le métier de lutteur et espérer encaisser ces sommes faramineuses », lance-t-il tout sourire. En effet, ce sont des cachets pouvant atteindre 150 millions de FCFA qui sont versés aux lutteurs sénégalais. Surtout lorsque le lutteur est populaire comme l’est un Modou Lô, le chef de file de l’écurie Rock Énergie.
Ce qui fait d’ailleurs que l’athlète a beaucoup de fans dans la société sénégalaise. Surtout chez les jeunes qui, au moment des confrontations amicales dans la rue, préfèrent emprunter son surnom. « A l’époque, aucun parent n’aimait voir son enfant taquiner la lutte. Cette discipline était considérée comme réservée aux gens qui n’ont aucun avenir, car cela ne nécessitait aucune étude. Il suffisait juste de s’entraîner et ensuite gagner des miettes », confie Lamine Samb, étudiant en sociologie.
Près de 300 millions FCFA gagnés en 2 mois !
« Les parents préféraient voir leurs enfants emprunter des études pour finir médecin, pharmacie, au pire des cas, être employé dans une entreprise. Ce qu’on appelle le « travail de bureau ». Aujourd’hui, la donne a changé. Les lutteurs sont de loin plus riches que les médecins et autres banquiers. Prenez l’exemple de Modou Lô; il a empoché près de 300 millions FCFA en à peine 2 mois. Vous vous imaginez ! Qui l’aurait pensé il y a quelques années ! », s’exclame-t-il.
Des cachets faramineux qui font que les lutteurs ne se plaignent pas de nos jours. Ces athlètes n’ont, en effet, rien à envier aux chefs d’entreprise. Ils sont d’ailleurs des chefs d’entreprise, car nombre d’entre eux ont leur propre société. S’ils ne sont pas actionnaires dans d’autres sociétés. C’est le cas du lutteur Mohamed Ndao, alias Tyson, qui a été l’un des premiers à investir dans les hydrocarbures. Ces athlètes ont réussi à se frayer un chemin faisant des émules dans la société sénégalaise. Aujourd’hui, plus que jamais, ils sont imités par des enfants qui rêvent de devenir lutteurs.