La publication de preuves de la culpabilité de la Belgique dans l’assassinat, en janvier 1961, de Patrice Lumumba, provoque une onde de choc dans le petit royaume européen. Le roi lui-même vient de décider de confier les archives du Palais.
Les documents inédits sur l’assassinat de Patrice Lumumba affluent à un rythme accéléré, en Belgique, depuis la parution en novembre 1999 du livre de Ludo de Witte. Ce sociologue a établi l’implication directe du gouvernement belge de l’époque dans les faits. Depuis, une commission d’enquête parlementaire a été créée à Bruxelles, déliant bien des langues parmi les survivants. Lundi encore, le roi Albert II a décidé de mettre à disposition des députés les archives dont disposait le Palais ; et ce, bien que le délai de secret de cinquante ans ne soit pas encore échu.
Trente-neuf ans après les faits, la manifestation de la vérité dans l’affaire de l’assassinat de Patrice Lumumba est une mécanique dont il semble qu’on ne l’arrêtera plus. En dépit des années, la connaissance des circonstances de la mort, le 17 janvier 1961, de l’éphémère Premier ministre du Congo nouvellement indépendant n’a pas qu’un intérêt historique. Car on découvre aujourd’hui que cette première tâche dans l’histoire de l’Afrique noire post-coloniale n’a pas été, comme on l’a dit depuis lors, le fait des seules haines entre Congolais : l’ancien pouvoir colonial belge en a eu la plus grande responsabilité.
Responsabilité écrasante
Il y a deux semaines, un ancien policier belge a créé une forte émotion en révélant comment il avait lui-même, avec l’aide de complices, écartelé puis dissout dans l’acide le cadavre de Lumumba. Cet épisode effroyable n’est pas secondaire : il montre à quel point tant les Belges que leurs alliés Katangais et la CIA américaine avaient peur de l’influence que le symbole Lumumba aurait pu avoir sur l’émancipation de son peuple, jusque dans la mort. Une crainte partagée par Mobutu Sese Seko, alors chef de l’armée du Congo-Kinshasa et qui se prêta au complot.
Les principaux coupables sont connus. Certains vivent encore. Sans doute ne seront-ils pas punis, mais au moins leur procès sera-t-il instruit par la presse. La mémoire de Lumumba y gagnera.
A lire dans L’intelligent – Jeune Afrique du 30 mai, un excellent article reprenant les révélations de Ludo de Witte