La ville de Lourdes a accueilli, pour sa sixième édition consécutive, les Journées de la Paix du 12 au 14 août derniers. Une manifestation qui s’est axée sur le continent africain, la mise en place des Universités pour la paix, ainsi que la création de la Fondation pour la paix. Universitaires, politiques et associations ont fait le déplacement et ont avancé leurs idées lors de débats et de conférences animés.
De notre envoyée spéciale Louise Simondet
« Baissons les armes, mais pas les bras ». Un début de refrain symbolique, chanté par le groupe Continent, qui est devenu l’hymne des Journées de la Paix de Lourdes 2006 qui se sont déroulées du 12 au 14 août derniers. Cette manifestation, fondée il y a six ans à l’initiative de la municipalité, reprend, chaque année, possession de la ville, véritable melting-pot culturel, où, comme aime à le dire Jean-Pierre Artiganave, le maire de Lourdes, « l’Humanité se rencontre ». Le cadre était donc plus que propice pour sensibiliser à la question de la paix. Les travaux de ces journées se sont axés principalement sur le continent africain, la création des Universités de la paix, et la mise en place de la Fondation pour la paix. Universitaires, politiques et associations s’étaient également donnés rendez-vous pour concrétiser les principes de la Charte de la paix, signée l’année dernière. Celle-ci prévoit de promouvoir une culture de paix basée sur l’organisation de rencontres, la recherche du dialogue et la mise en place de groupes d’ambassadeurs de la paix constitués de membres de la jeune génération.
Conférences et débats ont ponctués le déroulement de ces journées, placées sous le haut patronat du Président de la République, Jacques Chirac. Seule ombre au tableau : l’absence involontaire du joueur Claude Makelele, nommé l’hiver dernier Premier ambassadeur de Lourdes pour la Paix. Suite à une blessure, l’attaquant de Chelsea a été consigné chez lui par son entraîneur M. Morino. La famille de Makelele, qui était présente, a tout de même tenu à remercier l’assistance et à réitérer l’engagement pris par le joueur dans la mission qui lui a été confiée. Contacté par téléphone, Claude Makelele a souligné que cette absence n’enlevait rien à « son attention par rapport à ce projet ». Deux autres ambassadeurs ont été nommés solennellement par le maire de Lourdes. Il s’agit de l’ancien cycliste Laurent Fignon et des jeunes de l’association « Solidarité des enfants du Cameroun » qui n’ont malheureusement pas pu faire le déplacement faute de visas. Des émissaires qui auront pour vocation de transmettre un message paix.
L’enseignement vecteur de paix
« Nous souhaitons créer un réseau d’universités dans le monde entier afin de pouvoir proposer aux étudiants, dès l’année prochaine, des travaux sur la paix. Il s’agit de créer un maillon humain qui puisse un jour nous permettre de vivre dans un monde de paix. Nous sommes convaincus que l’éducation et la formation à la paix, et en particulier dans le monde universitaire peut faire changer les choses », confie Jean-Pierre Artiganave. « Les chemins de la paix dans le monde passent par la connaissance, la réflexion, la recherche et le dialogue », énonce le texte du protocole d’adhésion au collectif des Universités pour la paix de Lourdes, première pierre de ce réseau d’universités, signé officiellement par les universitaires présents.
Toute université qui souhaite participer à ce projet peut y adhérer. Et Chantal Robin-Rodriguo, députée des Hautes Pyrénées d’insister : « Il convient de rassembler et fédérer des énergies et que d’autres villes prennent le relais ». Faisant écho à cette déclaration, Jean-Pierre Artiganave a souhaité sincèrement « que les universités africaines soient à nos côtés dans les années à venir. L’Afrique est un continent qui nous intéresse particulièrement parce que c’est un continent délaissé ». Première du genre en Europe, l’initiative s’appuie essentiellement sur les jeunes. Et l’ancien premier ministre de Côte d’Ivoire Pascal Affi N’Guessan l’a assuré : « Il faut composer avec les nouvelles générations qui arrivent en Afrique pour que les choses bougent ».
Trouver des solutions
A côté de cette action dirigée vers les adolescents, d’autres conditions entrent en jeu pour imposer la paix. « Seules la vérité et la justice pourront déboucher sur la réconciliation », affirme l’Abbé Zarko-Relota de l’université de Sarajevo. Alors que des conflits bouleversent le monde, la question du droit international est pour les universitaires une nécessité pour aboutir à un état de cessation des conflits. « Nous devons en finir avec le deux poids, deux mesures, interpelle vigoureusement Josette Durrieu, présidente déléguée de la délégation parlementaire française à l’Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale. Il faut que la loi s’applique pour tout le monde et non pour une minorité ».
Cette injustice des pays face à la législation internationale, Pascal Affi N’Guessan la dénonce lui-aussi: « Comment ce fait-t-il que ce soit la France qui prenne à l’ONU les résolutions concernant la Côte d’Ivoire et que personne ne conteste cette hégémonie ? » L’ancien premier ministre a rappelé que des institutions comme le G7 gèrent à leur profit les intérêts stratégiques du monde. Il a donc souligné la nécessité de réformer les Nations Unies pour aboutir à un monde plus juste et ce, en supprimant le droit de veto au Conseil de l’ONU. Face aux conflits qui embrasent l’Afrique, Charles Goerens, ancien président de l’Union Européenne Occidentale, a clamé haut et fort : « On ne doit pas rester les bras croisés devant les atrocités qui se passent au Darfour ou en Erythrée ». Et de souligner : « Nous savons ce qui se passe au Darfour. Pour le Rwanda et la Sierra Leone, on savait. Nous devrions avoir honte ». Des déclarations qui pointent du doigt la communauté internationale. Le cas du Tibet, qui subit actuellement le joug de la Chine, au vu et au su de toute la planète, a aussi été abordé.
Pour lutter contre le fléau de la guerre, l’attaché de défense de l’ambassade de l’Afrique du Sud, David Masters prône « une politique de développement ». Car il rappelle qu’en Afrique, « la pauvreté est la cause majeure des conflits ». Il a salué les débuts prometteurs de l’Union Africaine dans la gestion des conflits et souhaité la mise en place d’institutions que les Africains se sont « choisies eux-mêmes ». La paix, une utopie ? « Il faut rester optimiste et résister », assène Pascal Affi N’Guessan. Michel Azot, adjoint au maire de Lourdes poursuit en estimant qu’ : « Il faut du rêve pour bâtir la paix. Les petits ruisseaux font de grands fleuves, et je pense qu’ensemble nous pourrons aller vers l’océan ». Des vœux que le chanteur Johnny Clegg, venu spécialement à Lourdes pour l’occasion, connaît bien, lui qui a lutté contre l’apartheid en Afrique du Sud. Sa voix, emplie d’humanité et gorgée d’Afrique, a le temps d’un soir insufflé l’espoir.
Visiter le site de la mairie de Lourdes et écouter l’hymne des Journées de la paix