Le procès de Loubna Ahmed al-Hussein a été reporté ce mardi d’un mois. Mais la journaliste soudanaise, condamnée pour avoir porté un pantalon, un délit passible de 40 coups de fouet, compte faire rayer l’article 152 du code pénal de son pays. Selon elle, il est responsable du traitement injuste dont souffrent les femmes soudanaises dans leur choix vestimentaire.
Loubna Ahmed al-Hussein arbore désormais le pantalon de la résistance. « Mon principal objectif, c’est de supprimer l’article 152 (du code pénal soudanais) », affirme la jeune journaliste soudanaise. Selon ce texte de loi, commettre « un acte indécent ou un acte qui viole la moralité publique ou (porter) des vêtements indécents » est passible d’une peine de 40 coups de fouet administrés en public. C’est en vertu de cet article que Loubna Ahmed al-Hussein a été arrêtée pour « port de tenue indécente » dans un restaurant de la capitale soudanaise, Khartoum, le 3 juillet. En cause, le pantalon ample qu’elle arborait. Une dizaine d’autres femmes ont été interpellées en même temps qu’elle. Son procès, qui devait démarrer ce mardi, a été repoussé d’un mois.
Cependant, pour la veuve trentenaire, c’est un combat qui commence. La jeune femme a démissionné de son poste au service de la communication de la mission de l’Onu au Soudan afin de renoncer à l’immunité qu’il lui offrait. Une immunité qui explique aussi le report du procès. Le juge entend s’assurer que Loubna Ahmed al-Hussein peut être poursuivie sans y faire entorse. Egalement collaboratrice du quotidien Al-Sahafa, la journaliste souhaite être la porte-voix des « 20 000 jeunes filles et femmes » arrêtées pour des raisons vestimentaires, de ces femmes appréhendées avec elle qui ont été fouettées et qui ont dû s’acquitter d’une amende. Loubna Ahmed al-Hussein veut en finir avec l’omerta qui entoure ces peines injustifiées. « Aucune d’entre elles n’ose se plaindre, car qui croirait qu’elles ont été flagellées juste pour avoir mis un pantalon ? Elles ont peur du scandale, des doutes sur leurs mœurs ».
Même la charia ne justifierait pas l’article 152
Par ailleurs, la jeune femme estime que cet article est « contraire à la Constitution et à la charia », la loi islamique qui prévaut dans le nord du Soudan depuis 1983, notamment dans la capitale où elle ne doit pas s’appliquer aux non-musulmans. Un accord a été trouvé dans ce sens en 2005 entre le Nord du pays, à majorité musulmane, et le Sud, chrétien et animiste. Loubna Ahmed al-Hussein met au défi ses pourfendeurs de la contredire. « Si certains se réclament de la charia pour flageller les femmes en raison de ce qu’elles portent, qu’ils me montrent les sourates du Coran ou les hadith (paroles du prophète Mahomet, ndlr) qui le stipulent.»
« Si je suis condamnée à être flagellée, poursuit-elle, ou à quoi que ce soit d’autre, je ferai appel. J’irai jusqu’au bout, jusque devant la Cour constitutionnelle s’il le faut ». La Soudanaise bénéficie de nombreux soutiens. Selon la BBC, ses supporters, des femmes pour la plupart, ont été dispersés par la police avec des gaz lacrymogènes ce mardi matin. Loubna Ahmed al-Hussein aurait invité 500 personnes à suivre son procès.