Après la mode, c’est au tour du Septième art de lui ouvrir ses portes. Liya Kebede incarne Waris Dirie dans Fleur du désert de Sherry Hormann, le biopic consacré à l’ancien mannequin somalien qui milite contre les mutilations génitales féminines. La jeune éthiopienne fait des débuts prometteurs devant caméra. Belle, altruiste et talentueuse : trois mots qui décrivent assez bien Liya Kebede. Portrait.
C’est sa troisième apparition sur grand écran. Mais c’est surtout une grande première pour la mannequin et actrice, Liya Kebede, 32 ans. Elle est la tête d’affiche de Fleur du désert, le film de Sherry Hormann inspiré de la vie de l’ancien top model somalien Waris Dirie. La petite nomade, excisée et rescapée d’un mariage forcé, deviendra un célèbre mannequin et une passionaria de la lutte contre les mutilations génitales féminines. Au cinéma, le naturel de Liya Kebede, sous les traits de Waris Dirie, interpelle et sert au mieux ce personnage de femme forte. Madame Kebede, mariée depuis 2000 à son compatriote Kassy Kebede, patron d’un hedge fund, et mère de deux enfants – Suhul né en 2001 et Raee, une petite fille qui a vu le jour en 2005-, se révèle être aussi une bonne comédienne. « Son courage, presque aveugle, m’a inspirée et j’ai voulu faire partie de l’histoire de cette femme qui a refusé d’être une victime en prenant résolument son destin en main », affirme-t-elle en parlant de Waris Dirie.
Une maman au service des mères
De l’excision, Liya Kebede avait entendu parler en Ethiopie où elle née. Mais de loin. « C’est en lisant son livre, pour la première fois au moment du casting, que j’ai découvert ce que c’était. Il m’a vraiment touché, à la fois bouleversé et fait rire ». « Je me suis identifiée à elle », ajoute encore la jeune actrice. Il y a de quoi. Car, outre leur carrière dans la mode, ces deux sublimes créatures ont décidé de se consacrer au bien-être des femmes. Depuis mars 2005, Liya Kebede est ambassadrice de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la santé de la mère et a crée, plus tard, une fondation dans la même optique. « En Afrique, on grandit entouré de pauvreté et par conséquent, on a toujours envie de faire quelque chose. Cela ne m’a jamais quitté. Quand je suis arrivée en Amérique, je me suis rendue compte que les femmes ne mourraient pas en couche comme chez moi et cela m’a surprise. Je suis une Ethiopienne qui a accouché à New York et je me suis rendue compte de ce que cela pouvait être de ne pas avoir la chance de donner la vie dans les meilleures conditions possibles ».
Sa marque de vêtements Lemlem pour femmes et enfants, du fait main en coton lancée en 2007, s’inscrit aussi dans cette logique. Celle de participer à l’amélioration du quotidien de ses congénères. Notamment en valorisant leur savoir-faire. A l’origine du projet, une visite en Ethiopie chez des artisans qui autrefois avaient le monopole de la production des vêtements traditionnels. « Aujourd’hui, nous en portons de moins en moins, alors ils n’ont plus de débouchés, explique Liya Kebede. Ils vivent dans des conditions horribles alors que ce sont d’extraordinaires artistes ». Cette fois-ci, elle s’est érigée en VRP de charme pour le textile « made in Ethiopia ». « Je suis bien placée pour les aider à exporter leurs produits vers l’Occident, ce qui leur permet d’avoir une indépendance économique, de s’occuper de leurs familles et de pouvoir même scolariser leurs enfants. J’espère ainsi briser ce cercle de la pauvreté tout en montrant aux Occidentaux que les Africains réalisent des produits de qualité dans les délais impartis, et qu’ils peuvent aller investir dans nos pays afin de contribuer à leur développement. C’est un message d’espoir. »
Le cinéma : une nouvelle aventure
D’abord ambassadrice, puis VRP et enfin icône de beauté. En 2003, Liya Kebede, à qui sa mère a conseillé de ne rien mettre (elle s’y tient plus ou moins puisqu’elle ne se maquille pas dans son quotidien), est devenue la première égérie noire d’Estée Lauder. « J’essaie de ne pas voir les choses en ces termes parce que j’estime que moins on y fera attention, mieux ce sera. Je veux que cela devienne quelque chose de commun, qu’on dise tout simplement que tel ou tel mannequin a signé un contrat avec une marque. » Le top model espère que tout cela finira par aller de soi dans ce milieu où elle évolue depuis l’âge de 18 ans. Liya Kedebe a été repérée à Addis Abeba par un réalisateur alors qu’elle fréquentait le lycée français Guebre Mariam. Il la met en contact avec un agent français. Après ses études, elle démarre sa carrière à Paris et la poursuit à New York où elle vit désormais. Deux fois en couverture de Vogue, visage d’Yves Saint Laurent ou Tommy Hilfiger, elle a défilé pour les plus grands, partout dans le monde. Tout comme celui de Waris Dirie, son succès est l’un des rares exemples qui encouragent les jeunes femmes noires à se lancer dans le mannequinat, une industrie que l’on qualifie souvent de raciste. « On en souffre tous. C’est difficile en tant que Noire d’évoluer dans la mode qui est par ailleurs un milieu assez dur pour tout le monde. Mais les choses changent un peu et j’espère que c’est une évolution durable. »
Les envies de Liya se sont, elles aussi, étoffées. Le cinéma l’attire de plus en plus. Avec Feur du désert, elle a relevé avec brio le défi d’interpréter un personnage encore en vie. « Ça fait peur car on se sent responsable, on est sous pression parce qu’on souhaite que la personne soit satisfaite de votre prestation. C’est sa vie ! Cependant, cela reste une très belle opportunité. » Liya espère démarrer une véritable carrière au cinéma grâce au long métrage de Sherry Hormann. « J’ai entendu parler de ce film, raconte Liya Kebede, et je voulais absolument faire un essai ». Il sera transformé d’autant plus que le fils de Waris Dirie la confond avec sa mère alors qu’elle visionne les DVD des profils d’actrices pressenties pour l’incarner. « Cela fait 3 – 4 ans que je m’intéresse au cinéma, avoue Madame Kebede. J’adore les films et je voulais tenter l’expérience. Maintenant, j’espère qu’avec ce film, j’aurai plus de chance d’explorer l’univers cinéma. Avec Fleur du désert, j’ai l’impression d’avoir vraiment ressenti ce que c’est que d’être un acteur. J’ai beaucoup aimé et appris. J’ai vécu des choses inédites. J’aimerais continuer dans cette voie. J’ai hâte de voir comment les gens vont réagir ». Bien, cela va s’en dire ! La belle Liya ne devrait pas en douter.