Lionel Meta, jeune réalisateur camerounais, était invité du festival Images that Matter (Addis-Abeba, 14-19 juin) pour montrer son film La métaphore du manioc, l’histoire d’une femme africaine qui décide d’aller rejoindre, en taxi, son mari immigré aux Etats-Unis. Rencontre.
Lionel Meta est né il y a 31 ans à Clermont-Ferrand, la ville qui accueille l’un des plus célèbres festivals de courts-métrages au monde. Il a grandi entre la France et le Cameroun, où sa tante était ouvreuse de cinéma à Yaoundé… Alors même s’il a d’abord fait des études philosophie, puis travaillé sur des clips et des téléfilms, l’envie de faire du cinéma devait déjà être inscrit dans ses gènes ! Et il a passé le pas cette année, en écrivant et en réalisant La métaphore du manioc, son premier court-métrage.
Tourné à Yaoundé, avec des acteurs français et camerounais, le film enchaîne les festivals (Palm Spring, Argelès, N’Djaména, Oslo, Durban…) et récolte des prix. Grand Prix Fica d’or, Prix de la meilleure actrice et Prix du meilleur acteur au dernier Festival international de courts-métrages d’Abidjan (mai 2010), Prix du meilleur court-métrage au Festival Ecrans Noirs de Yaoundé, il a aussi été sélectionné à Clermont-Ferrand et projeté hors compétition à Images that matter, le premier festival de courts-métrages d’Addis Abeba.
« Le cinéma, c’est magique »
Le film est né « de l’envie d’évoquer les émeutes de la faim qui ont eu lieu dans le monde en 2008 », explique Lionel Meta. « Ce qui m’a inspiré aussi, c’est une pièce de théâtre que j’ai vue en France, avec une troupe qui fait jouer des SDF. C’est une pièce qui parle de compassion et de la façon de gérer la dureté de la vie. J’ai eu envie de parler d’un sujet aussi dur que les émeutes de la faim, mais avec détachement, par le biais d’une comédie. Prendre de la distance avec la souffrance permet de la regarder en face. » C’est ainsi que le personnage du film, joué par Mata Gabin est né : une femme africaine dont le mari est parti aux Etats-Unis en quête d’une vie meilleure et qui souffre de la distance et du manque de nouvelles. Elle décide un matin de prendre un taxi pour aller à Denver…
Face à elle, le personnage du taximan est attachant. « C’est quelqu’un qui est au-dessus des contingences matérielles, c’est un personnage léger. Je l’aime beaucoup et je pense que je vais l’utiliser de manière récurrente dans de prochains scénarios. » Lionel Meta travaille déjà sur d’autres projets de films. « Le temps du cinéma est un temps très long », explique-t-il. « Il faut souvent plus de deux ans entre l’écriture et la sortie d’un film… Pendant ce temps particulier, on se bat quotidiennement pour les financements. Et on a sans cesse de nouvelles idées qui surgissent ! Le cinéma, c’est magique. Je veux continuer d’en faire, peu importe la forme – écriture, réalisation ou production. Pour raconter des histoires. Pour défendre des choses, partager une vision, des idées. Et pour émouvoir. »