Le Conseil national de transition (CNT) est de nouveau confronté à son incapacité à faire l’unanimité dans la Libye post-révolutionnaire. La région de l’est du pays, baptisée Cyrénaïque, s’est auto-proclamée semi-autonome. Pour le CNT, le fédéralisme n’est pas à l’ordre du jour en Libye, quitte à user de la force pour dissuader ses partisans.
La Cyrénaïque, la nouvelle région qui déstabilise le Conseil national de transition (CNT). Située dans l’est du pays, elle s’est auto-proclamée semi-autonome ce mardi à Benghazi, à l’issue d’un « congrès du peuple de Cyrénaïque ». « Il s’agit de la totalité de l’est de la Libye (riche en pétrole, qui s’étend de Syrte, au centre de la Libye, à la frontière égyptienne) », a précisé à la chaîne américaine CNN Ahmed Zoubaïr el-Senoussi, président du Conseil suprême qui doit gouverner la région. Le leader de la Cyrénaïque, âgé de 79 ans, est un membre de la famille de l’ancien roi Idriss el-Senoussi renversé par Mouammar Kadhafi en 1969.
Cette déclaration unilatérale d’autonomie fragilise, une fois de plus, l’autorité du CNT. « Nous ne sommes pas préparés à une division de la Libye. Ils devraient savoir que des « infiltrés » et des « restes » du régime de Kadhafi tentent de les utiliser, et nous sommes prêts à les en dissuader, même par la force », a déclaré Moustapha Abdeljalil, son président. Le chef du CNT soutient également que « des pays arabes frères, malheureusement, financent et parrainent la sédition qui s’est produite dans l’est pour ne pas être contaminés par la révolution ».
Cependant, plusieurs pays arabes ont appelé les Libyens à s’unir, notamment à travers l’Organisation de coopération islamique (OCI). Ekmeleddine Ihsanoglu, son Secrétaire général, a exhorté ce mercredi, dans un communiqué, « le peuple libyen à préserver l’unité nationale et l’intégrité territoriale » du pays et à « resserrer les rangs autour du Conseil national de transition (CNT), son unique représentant légitime ».
La nostalgie du fédéralisme
Pour le Conseil suprême de la Cyrénaïque, l’autorité du CNT n’est pas remise en cause. Il incarne, selon lui, le « symbole de l’unité du pays et est le représentant légitime (de la Libye, ndlr) aux sommets internationaux ». « Notre intention n’est pas de diviser le pays, a confié Ahmed Zoubaïr el-Senoussi à CNN. Notre objectif est de maintenir l’unité de la Libye. Nous espérons diriger notre région. Nous avons un gouvernement fédéral et nous avons un gouvernement local ». Pour Ahmed Zoubaïr el-Senoussi, Tripoli serait en charge de la défense, des finances, et la santé ; l’éducation et les « questions sociales » seraient aux mains des autorités locales.
L’Egypte, pays frontalier de la région, a également lancé, mercredi, un appel à l’unité en Libye. « La force de la Libye réside dans son unité. L’Egypte soutient sans réserve la sauvegarde de l’intégrité territoriale de ce pays », a déclaré Mohammed Kamel Amr, le ministre égyptien des Affaires étrangères.
Après son indépendance en 1951, le Royaume uni de Libye est une fédération de trois provinces autonomes : la Cyrénaïque, la Tripolitaine et le Fezzan. L’Etat fédéral est aboli en 1963. A son accession au pouvoir en 1969 et jusqu’à sa mort le 20 octobre 2011, Kadhafi n’aura de cesse de renforcer le pouvoir central incarné par Tripoli. Il sera renversé par la rébellion née à Benghazi, où l’autonomie pour l’est du pays est aujourd’hui réclamée.
Mercredi, des Libyens ont manifesté dans le sud du pays contre l’instauration d’un Etat fédéral.