Selon l’Organisation des Nations Unies, le raid aérien qui avait frappé le centre de détention de migrants de Tajoura, près de la capitale libyenne, en juillet 2019, et avait fait 53 morts, aurait probablement été mené par des avions provenant d’un pays étranger. C’est dans le rapport conjoint du Haut-Commissariat des droits de l’Homme et de la Mission de l’ONU en Libye que cette conclusion a été tirée.
Dans le rapport publié le lundi 27 janvier 2020, l’Organisation des Nations Unies signale l’impunité qui a entouré le drame de Tajoura et y voit d’ailleurs une preuve de l’urgence à concrétiser les résolutions prises au cours du sommet de Berlin du 19 janvier dernier : mettre, une fois pour toute, fin aux interférences étrangères dans le conflit libyen et d’honorer l’embargo mis sur les armes.
Le rapport onusien indique que les avions responsables des tirs qui ont tué 53 personnes, en juillet dernier, appartiennent probablement à un pays étranger sans toutefois donner de précision quant à l’appartenance de l’engin aux forces du général Haftar ou d’un autre de ses alliés. L’ONU pointe également un doigt accusateur dans la direction du gouvernement de Tripoli et de la brigade de Daman qui ont failli à leur devoir de protéger les civils. Le centre bombardé, qui abritait plus de 600 réfugiés et migrants, est situé, en effet, à proximité du quartier général de la brigade de Daman et avait précédemment fait l’objet d’une attaque.
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Les hangars étaient restés fermés
Le 2 juillet 2019, deux raids se sont abattus sur le centre de Tajoura. Le premier avion a attaqué à 23 heures 28 minutes et le second une dizaine de minutes plus tard. L’ONU dénonce particulièrement le fait qu’entre les deux attaques aériennes, les responsables n’aient rien fait pour sauver les réfugiés et migrants. Les rescapés ont confié aux enquêteurs des Nations Unies qu’il leur a été interdit de sortir après la première attaque. Ceux qui avaient réussi à s’échapper avaient été obligés de retourner dans les hangars qui ont été, à leur tour, bombardés par le deuxième raid, ont-ils précisé.
Selon plusieurs témoins, le responsable du centre de détention aurait même abattu trois migrants qui essayaient d’ouvrir les portes de leurs hangars pendant l’attaque. Des accusations que ce dernier nie catégoriquement. Le département de lutte contre l’immigration illégale de la Libye qui supervise le centre a confirmé que les portes des hangars étaient fermées pour éviter la fuite des réfugiés et migrants.
Pour l’envoyé spécial de l’ONU en Libye, Ghassan Salamé qui prône le respect effectif de l’embargo sur les armes, le drame de Tajoura illustre tragiquement à quel point l’utilisation des armes aériennes est devenu systématique dans le conflit en question. Il met également un accent particulier sur les conséquences et dangers des interférences étrangères sur la population civile.
Les Nations Unies dénoncent, en outre, l’impunité autour de cette attaque ; l’une des plus criminelles depuis que le Maréchal libyen Haftar avait lancé, en avril 2019, l’offensive pour prendre Tripoli. La Haut-Commissaire onusienne, Michelle Bachelet, demande aux différentes parties de mener des enquêtes indépendantes pour identifier les auteurs de l’attaque aérienne afin qu’ils répondent de leurs actes, qui s’assimile fort bien à un crime de guerre.
“Il se pourrait que l’attaque de Tajoura constitue un crime de guerre. Les Libyens, les migrants et les réfugiés sont piégés par la violence et les atrocités qui sont à leur tour alimentées par l'impunité.”https://t.co/esgdHtibv8
— InfoMigrants Français (@InfoMigrants_fr) January 28, 2020