Alors que des montagnes d’ordures de plus en plus imposantes s’amoncèlent à Monrovia, la capitale libérienne, le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a appelé le gouvernement et le secteur privé à réparer un système national de collecte de déchets qui ne fonctionne plus.
« La gestion des déchets solides constitue sans doute la plus grande menace à la santé publique, à Monrovia », a expliqué à IRIN Michael Cowing, du PNUE.
« Le secteur de la gestion des déchets est quasi inexistant ».
En conséquence de cela et du manque d’installations sanitaires convenables, les ordures ménagères, les excréments humains et les déchets médicaux dangereux sont jetés au hasard aux quatre coins dans la ville, et s’amoncèlent, dans certaines zones, jusqu’à former des tas assez volumineux pour entraver les routes.
Les enfants circulent pieds nus au beau milieu de monceaux d’ordures, fouillant dans des tas qui peuvent contenir des seringues usagées et des pansements tachés de sang.
« Il y a un grave problème d’hygiène à Monrovia, où les habitants jettent des déchets, y compris des excréments, dans les rues », a déploré Dehwehn Yeabah, directeur du service santé et environnement au ministère libérien de la Santé.
Selon lui, l’eau qui s’accumule dans les décharges publiques se déverse dans les puits ouverts de la ville.
M. Cowing a étudié les différents défis auxquels le Liberia est confronté en matière d’environnement et d’assainissement. Il a rencontré récemment des centaines de membres des secteurs privé et public, et les a instamment priés de collaborer en vue de s’atteler au problème des déchets.
« Nous leur suggérons de créer un groupe de travail national en partie pour élaborer une stratégie durable de gestion des déchets », a-t-il dit.
Depuis 2003, année qui a marqué la fin de 14 années de guerre civile au Liberia, le pays n’a pas de système global de gestion des déchets, selon M. Cowing.
« De nombreuses activités ont été entreprises à court terme, mais personne n’a élaboré de stratégie cohésive, à long terme », a-t-il dit.
»Dans les zones à faibles revenus, les habitants disent souvent qu’ils n’ont pas les moyens de payer pour obtenir un service de gestion des déchets… je pense au contraire qu’ils ne peuvent pas se permettre de ne pas payer pour la gestion des déchets. »
Pour M. Cowing, la gestion des déchets est un « secteur vital » ; pour corroborer ses dires, il a invoqué les coûts sanitaires élevés et les pertes de revenus qui résultent d’une insuffisance en matière d’assainissement.
« Dans les zones à faibles revenus, les habitants disent souvent qu’ils n’ont pas les moyens de payer pour obtenir un service de gestion des déchets. Quant à moi, je pense au contraire qu’ils ne peuvent pas se permettre de ne pas payer pour la gestion des déchets », a-t-il argumenté.
Le problème des ordures est d’autant plus urgent que la population de Monrovia a triplé au cours de la guerre, pour atteindre environ 1,2 million.
Au Liberia, à l’approche du pic de la saison des pluies, qui se poursuit généralement jusqu’au mois d’octobre, les responsables de la santé sont particulièrement inquiets ; en effet, la mise en décharge non contrôlée des déchets et le creusement de puits de fortune près de décharges en expansion constante menacent de provoquer l’apparition de maladies hydriques.
Hun-Bu Tulay, directeur de la Corporation des eaux et des égouts du Liberia, un organisme public, a expliqué à IRIN que les populations construisaient de plus en plus de latrines de fortune et de puits communautaires près de décharges qui ne cessent de s’agrandir.
Seon M. Tulay, le gouvernement va commencer à refermer les puits qui se trouvent trop près des décharges. « La loi libérienne en matière de santé publique interdit de creuser des puits près des zones de décharge », a-t-il rappelé.
Problème de législation
Si plusieurs lois ont été couchées sur le papier, elles ne sont pas mises en application et ne font pas l’objet de suivi à l’heure actuelle, a expliqué M. Cowing du PNUE. « La législation environnementale et la mise en application de ces lois doivent être renforcées », a-t-il dit.
En outre, a-t-il poursuivi, le Liberia doit lancer une campagne d’information publique nationale et continue – et non un événement isolé. Il doit faire de la collecte des déchets un service payant et – avec l’aide de la communauté internationale – concentrer ses efforts sur le renforcement des capacités du gouvernement en matière de gestion des questions environnementales.
Ben Donnie, qui dirige l’Agence de protection environnementale (EPA) du Liberia, a reconnu qu’il s’agissait d’un problème d’infrastructures, mais aussi de sensibilisation.
« Les zones urbaines surpeuplées ont besoin de systèmes adaptés de collecte et d’évacuation des déchets. Et les populations ne sont pas parfaitement informées des dangers d’une évacuation des déchets [non-réglementée] », a-t-il constaté.
Selon une spécialiste en environnement et en ressources naturelles de la mission des Nations Unies au Liberia, l’EPA a besoin de davantage de soutien.
« Il faut qu’une agence pilote s’occupe des questions environnementales – y compris de la gouvernance », a estimé Hiroko Mosko, conseiller en environnement et en ressources naturelles au sein de la mission des Nations Unies au Liberia. « L’[EPA], qui devrait prendre l’initiative sur les questions environnementales, n’a pas les capacités financières et techniques nécessaires pour faire son travail ».
« Nous souhaitons que les bailleurs de fonds et le gouvernement accordent à la protection de l’environnement au Liberia une place plus importante au sein de leurs programmes d’action », a ajouté Mme Mosko.
D’après le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, au moins 20 pour cent des décès d’enfants âgés de moins de cinq ans au Liberia sont causés par des diarrhées, elles-mêmes principalement provoquées par des conditions d’hygiène déplorables et par le manque de services d’assainissement.
Selon un rapport publié en 2006 par le bureau humanitaire des Nations Unies, les épidémies de cholera et de diarrhée au Liberia sont principalement dues à de mauvaises pratiques d’hygiène et l’évacuation inconsidérée des déchets humains.
Moins de 25 pour cent de la population du Liberia a accès à des services d’assainissement sûrs, et six des 15 comtés du pays présentent une couverture de moins de 29 pour cent, peut-on lire dans le rapport.