Le ferry, le Joola qui assurait la liaison maritime entre la capitale Dakar et les régions du sud, a coulé dans les profondeurs des côtes gambiennes à 175 km de Dakar. Il y avait à son bord plus de deux mille passagers, en majorité des étudiants. Dix ans plus tard, la nation sénégalaise se souvient de ce drame.
(De notre correspondant)
Ce bateau de construction allemande datant des années 70, a été offert au gouvernement sénégalais en 1990 par la république fédérale allemande (RFA). Ce ferry assurait la liaison entre Dakar et la région naturelle de la Casamance (dans le Sud du pays), qui reste une zone très enclavée sur le plan des transports. Ce bateau, conçu pour transporter 550 passagers embarquait régulièrement avec le triple des passagers. Apres douze ans de rotation au Sénégal, il a sombré, le 26 septembre 2002 en provoquant la mort de 1 863 personnes à 40 km des côtes gambiennes.
Le dernier voyage du Joola
Ce navire a quitté le port de Ziguinchor jeudi 26 septembre 2002 à 13h30 par temps calme, pour effectuer sa troisième rotation depuis sa réparation. Avec officiellement 1 046 passagers à bord en possession d’un billet plus les 52 militaires membres de l’équipage auquel il faut ajouter les passagers montés sans billets et les nombreux enfants de moins de 5 ans pour qui aucun titre de transport n’est délivré. Le Joola n’était adapté au transport que de 580 passagers.
Le naufrage du navire
L’enclavement de la région naturelle de la Casamance et le conflit armé sont souvent brandis parmi les facteurs ayant poussé toutes les victimes vers le bateau pour fuir les coupeurs de routes qui commettaient des exactions sur plusieurs axes menant vers la capitale sénégalaise. Il y a aussi des tracasseries routières avec la traversée du pont de la Gambie. Selon Boubacar Keita, un des rescapés : « Tout s’est passé très vite, des bourrasques de vent ont accentué l’inclinaison du ferry, pour s’abriter du vent et de la pluie beaucoup de passagers se sont précipités en masse du côté bâbord ce qui a brusquement accentué le déséquilibre du navire, tout le monde a glissé vers le même côté en tombant les uns sur les autres, l’inclinaison du bateau étant trop forte, il s’est renversé sur le côté et l’eau s’est engouffrée par les hublots, le bateau a chaviré brutalement en moins de cinq minutes », a-t-il précisé.
Un seul radeau de sauvetage a pu être ouvert recueillant 25 rescapés, 22 passagers ont pu grimper sur la coque du Joola et 37 ont été sauvés grâce aux bateaux de pèche européens. Les marins sénégalais n’ont trouvé aucun survivant, seulement des centaines de corps entrelacés. Ils ont évacué presque 300 corps, prisonniers du navire, plus une centaine de victimes récupérées autour de l’épave.
Les sanctions
Acculé par les familles des victimes, l’ancien chef de l’Etat sénégalais Abdoulaye Wade, s’est séparé de son Premier ministre d’alors, Mme Mame Madior Boye, de son ministre des Forces armées, Youba Sambou et de son ministre des Transports, Youssou Sakho. Ils se sont vus reprochés leur laxisme et le fait d’avoir caché la vérité sur l’état du bateau, qui voguait avec un seul moteur au lieu des deux prévus.
En 2008, un juge d’instruction français a lancé neuf mandats d’arrêts internationaux contre de hauts responsables sénégalais, en poste, au moment du naufrage pour « homicides involontaires par violation délibérée d’une obligation de sécurité et défaut d’assistance à personnes en péril ». Les familles des victimes qui célèbrent ce 10e anniversaire, demandent toujours à ce que les circonstances de ce drame soient totalement éclaircie et que justice soient rendue. Elles souhaiteraient également que le bateau soit renfloué pour en faire un mémorial.
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