Les Libériens qui ont fui la guerre civile pour se réfugier en Côte d’Ivoire n’y sont plus les bienvenus depuis le début de la crise ivoirienne en novembre 2002. Amnesty International dénonce la situation de ces réfugiés coincés entre deux conflits et appelle la communauté internationale à s’impliquer.
» Nul endroit où fuir. » C’est le titre du rapport d’Amnesty International sur la situation des réfugiés libériens en Côte d’Ivoire. C’est la triste réalité de ces milliers de personnes, prises en étau entre deux conflits, à l’ouest de la Côte d’Ivoire et à l’est du Libéria. Amnesty International a recueilli de nombreux témoignages de réfugiés libériens, en mars 2003, faisant état du climat de peur constante et de harcèlement dont sont victimes les Libériens en Côte d’Ivoire.
Considérés comme complices des deux groupes rebelles ivoiriens apparus à l’ouest du pays en novembre 2002, ils sont victimes de rackets, de maltraitances, d’humiliations et régulièrement enrôlés de force (y compris les enfants de moins de 18 ans) au sein des diverses forces armées qui s’opposent dans la région. Ce qui pousse certains d’entre eux à avoir ce constat amer : » De nombreux Libériens considèrent maintenant qu’ils préfèreraient même être rejetés à la mer sur un bateau que de rester en Côte d’Ivoire « . Ou encore : » Les Libériens, de plus en plus, trouvent qu’il vaut mieux prendre le risque de mourir au Libéria, plutôt que de rester parmi des amis devenus des étrangers et être tués en Côte d’Ivoire « .
Allers-retours
De fait, une partie de ces réfugiés (près d’un million au total, répartis en Côte d’Ivoire, Guinée et Sierra Leone), qui avaient fui le conflit opposant depuis 1989 l’armée du Président libérien Charles Taylor aux rebelles du Lurd (Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie), ont tenté un retour dans leur pays d’origine. Selon le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), près de 100 000 personnes (en comptant des Ivoiriens et des ressortissants d’autres pays de la sous-région) auraient fui au Libéria depuis le début du conflit ivoirien. La zone dans laquelle ils ont trouvé refuge se trouve être le théâtre de très violents combats depuis février 2003. Résultat : début avril 2003, des milliers de personnes ont fait le chemin inverse, retournant en Côte d’Ivoire.
Amnesty International insiste sur ces » allers-retours, marqués par la précipitation et la panique « , qui montrent à quel point la situation de ces réfugiés semble pour le moment sans issue. Situation renforcée par le fait que les pays limitrophes comme le Ghana ou la Guinée ont fermé leurs frontières depuis février dernier, en dépit des appels du HCR.
Trouver une solution globale
Dans son rapport, Amnesty International estime que » la question de la protection des réfugiés dans cette région a été trop longtemps négligée » et appelle » la communauté internationale à assumer sa part de responsabilité dans la résolution de ce problème « . Celle-ci doit s’engager » publiquement à trouver d’urgence une solution globale et à long terme visant à assurer une protection efficace aux réfugiés libériens et à toutes les autres personnes qui ne peuvent rester dans la sous-région. En raison de l’hostilité et de la méfiance que les réfugiés libériens suscitent en Côte d’Ivoire et dans plusieurs pays voisins, cette solution devrait comprendre, comme l’a clairement indiqué, en mars 2003, le secrétaire-général des Nations Unies, Kofi Annan, la réinstallation de nombreux réfugiés ailleurs que dans la sous-région. »
Alors que l’espoir qu’a représenté la signature la semaine dernière d’un cessez-le-feu entre les rebelles et le gouvernement Taylor semble déjà enterré, la mise en place d’un tel plan d’action paraît encore loin. Les combats ont repris en ce début de semaine à l’est du pays, risquant de grossir encore un peu plus les rangs des réfugiés.
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