La crise économique aidant, les » pharmacies par terre » connaissent une grande affluence au Togo. Les gens s’approvisionnent souvent en médicaments d’origines douteuses, pour la plupart dangereux et périmés chez les revendeuses installées à même le sol.
Reportage du correspondant du Togolais à Lomé
Les médicaments à terre sont vendus par des » docteurs de rues « , comme on les appelle à Lomé. Il n’est pas nécessaire aux acheteurs qu’ils donnent beaucoup d’explications sur leurs souffrances pour que ces médecins improvisés fassent immédiatement leur diagnostic. Ils prescrivent des produits dont eux seuls ont le secret des origines. Des médicaments, sans notice, dans des boîtes quelconques, parfois sans emballage, illicites, contrefaits, sans date de péremption, manipulés par des individus qui n’ont pas les compétences requises.
On trouve ces médicaments sur les étals des marchés et aux coins de rue. Ils » guérissent » toutes sortes de maladies. » C’est tout près, c’est moins cher, c’est en détail, les chances de guérison sont élevées, c’est sans ordonnance… », les raisons invoquées pour le recours à cette médication de fortune sont multiples. On ne tarit pas d’éloges pour ces produits achetés sans la prescription d’un médecin assermenté.
Une affaire nigériane
Les grossistes revendant ces produits étant nigérians, tout le monde s’accorde pour dire que ces médicaments proviendraient d’une filière nigériane. Dans tous les cas, l’origine de ces médicaments reste douteuse. Les forces de l’ordre ont récemment appréhendé des trafiquants nigérians avec des produits contenant de la farine de maïs et d’autres poudres inconnues, mais les contrôles ne sont pas réguliers. Et les populations continuent à consommer ces médicaments à terre. » Curieusement ces produits ont le don de soulager des patients, on ne sait pas par quelle magie mais c’est le cas « , s’étonne un médecin biologiste. Les spécialistes y voient un simple effet placebo.
L’Association togolaise des consommateurs s’est élevée depuis longtemps contre l’importation et la vente de ces produits dangereux pour la santé. ¨Plusieurs autres associations ont , à plusieurs reprises, dénoncé et révélé à la presse des cas d’intoxications dues à la consommation de ces médicaments. Malgré les efforts réalisés, les médecins et associations n’arrivent pas à freiner le phénomène. La population est consciente du danger, mais elle n’a pas les moyens d’acheter les médicaments en pharmacie.
Interdire aux non-professionnels
Les pharmaciens, les délégués médicaux et les législateurs essayent de trouver une solution pour endiguer ce fait de société. Mais ces corporations ont des intérêts divergents. » Maintenant qu’elles sont organisées en centrales associatives, nous examinerons leur dossier plus sérieusement « , a reconnu un député, membre de la commission des lois à l’Assemblée nationale togolaise. Tous les protagonistes s’accordent pour interdire ce commerce aux non-professionnels. » Nos prix sont élevés, certes, mais nous garantissons la qualité du conditionnement : les médicaments sont en sécurité chez nous. Les gens nous accusent de ne pas accepter de jouer le jeu de la concurrence. C’est vrai, mais c’est leur vie qui est en danger « , explique un pharmacien.
Le commerce des emballages et des boîtes usées fait vivre des familles entières. Beaucoup de femmes font du porte à porte pour acheter ces marchandises (boîtes, bouteilles, emballages) qu’elles revendent aux fabricants des produits prohibés. Les associations de défense des droits des consommateurs accusent l’Etat de manquer de fermeté face au problème.
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