L’éradication mondiale de la poliomyélite est prévue pour 2005. En vue de cet objectif, les campagnes de vaccination s’intensifient en Afrique subsaharienne, où le poliovirus continue à se transmettre. Les conflits qui perdurent dans certains pays rendent cependant la lutte contre la maladie particulièrement difficile et incertaine.
» Nous savons par expérience que l’éradication de la poliomyélite est réalisable, que nous avons le bon vaccin et les bonnes stratégies pour libérer le monde de cette terrible maladie invalidante « déclarait, il y a quelques semaines, le Dr Jeffrey Koplan, directeur des CDC, les Centres de Contrôle et de Prévention des Maladies aux Etats-Unis, au cours de la 53ème Assemblée mondiale de la Santé. Lancée en 1988, à l’initiative de plusieurs organisations internationales, dont l’OMS et l’UNICEF, la campagne mondiale d’éradication de la polio a, de fait, obtenu des succès déjà considérables.
Présente sur les cinq continents il y a douze ans, cette maladie, qui peut être mortelle ou entraîner une paralysie irréversible, ne sévit plus aujourd’hui que dans trente pays, dont vingt-trois 23 se situent en Afrique – les autres appartenant tous au sous-continent indien. Et dans un bon nombre de ces pays, la bataille contre le poliovirus est en passe d’être gagnée. En Afrique de l’Ouest, par exemple, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry et le Sénégal, qui ont fait front commun contre la maladie dans le cadre de leur initiative » Santé pour la Paix « , ont bon espoir de parvenir à son éradication d’ici à la fin de l’année. Cet hiver, de vastes campagnes de vaccination, organisées simultanément dans les quatre pays, ont permis de toucher environ 4 millions d’enfants de moins de cinq ans, qui constituent les principales cibles du virus.
Alors que la lutte contre la maladie entre dans sa phase finale, tous les pays africains où la maladie reste endémique multiplient les Journées nationales de vaccination. Des efforts parfois considérables sont déployés pour couvrir la totalité des territoires. Au Soudan, des bénévoles ont dû marcher pendant des jours pour atteindre des régions particulièrement reculées. Certains villages n’avaient pas reçu la visite de personnels de santé depuis plus de quinze ans. Ailleurs, comme en Tanzanie et en Zambie, le recours à des bateaux et des avions s’est imposé pour assurer la distribution de vaccins jusqu’aux villages situés sur des îles ou dans les montagnes.
La clé du succès final dans les mains des soldats
Car l’efficacité de ces opérations n’est assurée que dans la mesure où elles parviennent à toucher absolument tous les enfants. » Lors de l’assaut final devant conduire à l’éradication de la poliomyélite, l’essentiel est d’assurer une couverture de 100% « indique ainsi Carol Bellamy, directeur général de l’UNICEF. Or, les conflits qui frappent certains pays africains rendent particulièrement problématique l’accès aux populations qui y vivent. Comme le note l’OMS, » la guerre demeure le plus gros obstacle à l’élimination de la maladie « .
D’importantes campagnes de vaccination ont certes pu être menées dans plusieurs pays affectés par des conflits : plus d’un million d’enfants ont par exemple pu être vaccinés en 1998 en Somalie grâce aux accords de cessez-le-feu obtenus avec les différentes factions. Sous la pression de la population, leurs leaders acceptèrent même de procéder au déminage des routes pour permettre le passage des équipes de vaccination. En République Démocratique du Congo, des négociations ont également abouti l’an dernier à la cessation des hostilités durant plusieurs » Journées de Tranquillité « au cours desquelles près de 9 millions d’enfants ont pu être vaccinés sur l’ensemble du territoire. Cependant, même si ces exemples sont à même de susciter un certain espoir, il n’en reste pas moins que la Somalie et la République Démocratique du Congo font partie de la dizaine de pays qui continuent à représenter un défi majeur pour la lutte contre la polio.
Catherine Le Palud