Une partie de la communauté noire des Etats-Unis dénonce une hausse des crimes racistes et la partialité de la Justice, qu’ils estiment brimer plus les Noirs que les Blancs à offense égale. Une manifestation a d’ailleurs rassemblé des milliers de personnes, vendredi dernier, à Washington, réclamant notamment plus d’égalité.
Des milliers. Ils étaient des milliers, vendredi, à défiler contre le racisme dans les rues de Washington. Réunis à l’appel du révérend Al Sharpton, les Noirs américains ont dénoncé la récente hausse des agressions racistes et le fonctionnement de la Justice qui, selon eux, se fait toujours au détriment des personnes de couleur. « Quand vous accrochez une corde de pendu, ce n’est pas une blague pour nous », a fustigé Al Sharpton, qui s’est battu dans les années 60 pour les droits civiques des Noirs. Le leader religieux fait référence aux cordes retrouvées un peu partout depuis l’affaire des « six de Jena », du nom d’une petite ville de Louisiane (Sud).
En septembre, cette localité de 3 000 habitants à 85% blancs s’est retrouvée au cœur de l’actualité après un différend ayant opposé des élèves blancs et noirs en septembre. Des lycéens de couleur avaient déjeuné sous un arbre où leurs pairs blancs avaient apparemment leurs habitudes depuis des décennies. En représailles, le lendemain, des cordes étaient accrochées aux branches de l’arbre, provoquant une série de bagarres et de tentatives d’intimidation. Mais au final, alors que les élèves blancs n’ont pas été inquiétés, six Noirs ont été inculpés de tentative de meurtre pour avoir légèrement blessé un camarade blanc.
Megan Williams : un calvaire et des zones d’ombre
Autre affaire qui pousse la communauté noire à penser que la Justice américaine n’est pas aveugle : le calvaire que six Blancs, apparemment adeptes du mouvement raciste Ku Klux Klan, aurait infligé à une jeune femme noire de 20 ans. Megan Williams aurait subi pendant une semaine, en septembre, dans le comté de Logan (Etat de Virginie Occidentale), des sévices d’une rare cruauté en raison de sa couleur de peau. Elle rapporte avoir été violée à plusieurs reprises, lacérée au couteau, en partie scalpée, étranglée avec une corde, forcée à boire l’eau des toilettes et de l’urine, obligée à manger des déjections de chien et de rat… Selon CNN, Megan Williams doit son salut à un appel anonyme.
Pourtant, les trois femmes et trois hommes accusés – connus des services de police – sont poursuivis pour enlèvement et agression sexuelle au premier degré. Des crimes pour lesquels ils encourent respectivement la prison à vie et 35 ans de détention. Malik Zulu Shabazz, l’avocat de la plaignante, se bat pour que le supplice de sa cliente, qui fait encore l’objet d’une enquête, soit jugé comme un crime haineux. Bien que deux des inculpés assurent avoir agi par racisme, la tâche de Me Shabazz ne sera pas simple. Certains estiment que le récit de Megan Williams, soutenue par certains organes afro, comporte quelques zones d’ombre.
Les crimes racistes restent stables
Le procureur du comté de Logan avance que la victime présumée avait un lien avec l’un de ses agresseurs. Une vidéo intitulée « Megan Williams, the truth » (Megan Williams, la vérité) indique de son côté que la jeune femme connaissait ses agresseurs, dont on l’avait conseillée de s’éloigner. Le clip reconnaît par ailleurs que le crime commis est « horrible » et que les auteurs devraient croupir en prison, il souligne en substance que ce n’est pas un crime lié à la race mais lié à des personnes qui n’avaient rien à faire ensemble…
La manifestation de vendredi s’est tenue trois jours avant la publication des chiffres de 2006 concernant les crimes ou délits perpétrés en raison de la couleur de la race, la religion, l’origine ou l’orientation sexuelle. D’après le Bureau fédéral d’investigation (FBI) américain, 9 642 victimes ont été agressées sur de tels critères, une statistique stable par rapport à 2005. Ces crimes de haine étaient pour 51,8% des actes racistes et ont ciblé pour deux tiers des Noirs.