Les femmes des peuplades Ndebele d’Afrique australe perpétuent la tradition de la peinture murale. Un art étonnant et mystérieux.
L’histoire des Ndebele est d’abord une histoire de résistance. Apparenté aux deux grands groupes ethniques d’Afrique du Sud, les Zoulous et les Xhosa, ce peuple ancien s’est forgé une culture très particulière et surtout très forte, en résistant aux Boers. Malgré un semi-esclavage cruel, et des déportations sous l’apartheid, cette peuplade a réussi à gagner son autonomie et à faire vivre un art qui mêle peinture et architecture.
Dans le magnifique livre de photographies de Sergio Caminata, le lecteur découvre, ébahi, des peintures murales stylisées dans lesquelles les couleurs claquent, du bleu profond à l’orange vif, en passant par le jaune d’or. Les murs d’enceinte qui englobent les habitations, et les cases elles-mêmes sont minutieusement recouverts de formes géométriques.
Si les hommes construisent les maisons, seules les femmes sont habilitées à en peindre les façades. L’abstraction est de rigueur, et chaque femme puise dans son inspiration personnelle pour mélanger couleurs et figures. La représentation d’objets ou d’animaux reste une exception.
Peintures initiatiques
» Une connexion mentale apparaît clairement entre les vêtements des femmes et la manière de décorer les maisons » note l’anthropologue italien Franco La Cercla. Effectivement, comment ne pas reconnaître dans les motifs des peintures, ceux des pagnes et des colliers de perles tressées dont les femmes se parent ? Les femmes se représenteraient-elles sur leurs murs, comme le suggère l’anthropologue ? Peut-être, mais les peintres elles-mêmes ont du mal à définir précisément ce que représentent leurs motifs mystérieux.
En revanche, on sait que ces peintures accompagnent les rites d’initiation des adolescents. Pendant que les futurs hommes s’exilent dans les collines pendant trois mois après la cérémonie de la circoncision, leurs mères repeignent les murs de leurs maisons. De leur côté, les jeunes filles sont initiées à la peinture et au tressage des perles. Ainsi se transmet la tradition, et Franco La Cecla de conclure : » La force de caractère des Ndebele que l’adversité n’a jamais abattue et l’empreinte féminine marquée de cette tradition sont autant de promesses de permanence comme de renouvellement des formes « .
Commander le livre : Actes Sud / Motta
A lire également : Ndebele de Margaret Courtney-Clarke, Arthaud, 1991.