La mode des pitbulls a touché le Maroc il y a un ou deux ans. Les propriétaires sont souvent jeunes et achètent ce molosse, loin d’être donné, pour le plaisir ou pour s’enrichir. Des combats clandestins de chiens se tiendraient en effet dans certains quartiers, même si la gendarmerie royale assure que « ça n’existe pas ».
Le pitbull nouvel animal de compagnie des jeunes Marocains. Ils seraient de plus en plus nombreux à succomber aux charmes du molosse. Certains pour leurs beaux yeux et ils peuvent donc se balader sur la plage avec leur chien sans qu’aucun incident ne soit rapporté. Mais d’autres entraînent leurs pitbulls pour des combats clandestins, dont ils ressortent souvent en piteux état, s’ils ne meurent pas. Une affirmation qui ne tient pas la route selon la gendarmerie royale, qui nie l’existence de telles pratiques.
Un chiot vaut 200 euros minimum
Auparavant, les pitbulls étaient importés, notamment de France. Mais, la législation en ce qui concerne ces animaux ayant été durcie, faire venir les chiens s’est révélé périlleux. Alors, certains ont eux-mêmes élevé des pitbulls pour faire face à la demande. Il y aurait une recrudescence d’élevages de chiens pitbulls au Maroc, ainsi que de staffs américains (même catégorie de chien). Une tendance souvent attribuée à l’effet de mode. Résultat : « le pays est passé de pays importateur à celui de producteur », a expliqué Aziz, un dresseur de 22 ans, à Aujourd’hui le Maroc.
Ceux qui s’investissent dans la filière se frottent les mains. Une femelle peut mettre bas une dizaine de petits, qui pourront être vendus chacun « 200 euros minimum », d’après le Dr Abdelhamid Chaib, responsable vétérinaire du Centre de la Société de protection des animaux et de la nature (Spana) de Rabat. L’affaire est donc juteuse. D’autant que les jeunes sont prêts à tout pour en avoir. « Les enfants d’une famille aisée expliquent que les pitbulls sont gentils et les parents leur en achètent un, ne se doutant pas qu’ils peuvent être dangereux. C’est un problème d’éducation car les parents ne sont pas au courant que ces chiens sont agressifs. Quant aux autre jeunes, ils économisent ou travaillent pour s’en offrir un », poursuit le spécialiste.
Combats de chiens très violents
Autre business fructueux, dangereux et illégal : les combats de chiens. Organisés dans les quartiers chauds, ils opposent des molosses qui ne peuvent être que difficilement être séparés. Les molosses ressortent blessés et certains meurent sous les crocs de leur adversaire. Qui aura été au préalable bien entraîné pour attaquer. « Certains me demandent de rendre leur chiens plus agressif, mais je refuse. Quand c’est un Berger Allemand que l’on veut dresser pour attaquer les intrus dans la nuit, il n’y a pas de problème. Son maître peut le contrôler. Mais un pitbull qui a commencé à attaquer une proie ne s’arrête généralement pas avant que les dents de ses deux mâchoires se touchent. Il est alors souvent trop tard », souligne le Dr Abdelhamid Chaib. C’est pourquoi il exige que les dresseurs ne montrent aux chiens que la soumission.
Il reçoit en urgence chaque semaine « une dizaine de pitbulls apparemment agressifs, qui présentent des cicatrices sur la tête, une oreille déchirée ». « Nous les acceptons parce que leurs propriétaires n’ont pas les moyens de les emmener dans une clinique, mais nous faisons de la prévention. Nous leur expliquons que ces chiens sont sensibles à la douleur, comme nous, et qu’ils doivent se trouver un boulot au lieu de faire des combats. Chaque fois, nous recevons des gens différents, mais certains sont constants. Ils n’arrivent pas à se réinsérer et restent dans ce créneau. D’autres, quand ils voient leur chien gravement blessé ou au bord de la mort, décident d’arrêter de le faire combattre », raconte le Dr Abdelhamid Chaib. De façon globale, la prévention semble porter ses fruits. Mais « il faudrait un documentaire, car la télévision joue un rôle très important, comme peu de gens savent lire », insiste le responsable vétérinaire.
Ni vu, ni connu
Selon les forces de l’ordre, ce problème est soit sporadique, soit fantasmatique. Un agent de la Sûreté de Mohamedia, non loin de Casablanca, explique qu’« il n’y a pour le moment aucun texte qui régit les combats », que ces affrontements « sont rares » et qu’« on entend des murmures à Casablanca » de duels canins. Un officier du district de Casa Anfa (district de Casablanca) souligne, pour sa part, que ces combats sont interdits et ne signale aucun cas dans la région où il travaille. Donc pas d’arrestation. Quant à la Gendarmerie royale, une source « assure que cela n’existe pas au Maroc. Mais que c’est le cas à l’étranger, où c’est clandestin. C’est un peu comme les combats de coq ».
Il y a donc peu de chances, dans ce cas, que les organisateurs de combats, qui se cachent des pouvoirs publics, et les parieurs soient inquiétés. Mais le commun des Marocains semble avoir d’autres préoccupations : éviter les mâchoires du pitbull. Ils seraient en effet beaucoup à être effrayés par le molosse. Mais depuis peu, ce chien, comme tous les autres, est soumis à une nouvelle réglementation. Ils doivent se balader en laisse avec leur propriétaire et, si ce dernier décide de le laisser libre, il doit lui mettre une muselière. C’est toujours ça de pris.