Le journal français Le Monde révèle que les soignants bulgares retenus durant huit années en Libye ont dû renoncer à poursuivre leurs tortionnaires en justice afin d’être rendus à Sofia. L’accord était connu de toutes les parties négociantes. Leurs avocats assurent néanmoins qu’un accord signé sous la contrainte ne saurait, précisément, être contraignant.
Le journal Le Monde n’en finit pas de révéler les dessous des tractations qui ont conduit à la libération, le 24 juillet dernier, des infirmières et du médecin bulgares retenus en Libye. Dans son édition datée du 3 août, le quotidien français rapporte que les soignants, condamnés pour avoir inoculé le virus du sida à des enfants de l’hôpital de Benghazi, ont dû signer un document selon lequel ils s’engageaient à ne pas apporter de suites judiciaires au drame qu’ils ont vécu. Ni pour tortures, mauvais traitements ou détention abusive.
Une information que le porte-parole de l’Elysée a confirmée au Monde. David Martinon précise que « cela avait fait l’objet d’un échange de lettres entre l’Union européenne et la Libye » lors du premier semestre 2007. La porte-parole de Benita Ferrero-Waldner, la commissaire européenne pour les relations extérieures, a confirmé que « les 27 Etats membres étaient constamment informés des détails des discussions ».
Le document n’a pas « de valeur juridique »
Ceux que le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, a lui-même qualifiés ce mardi d’« otages », dans un lapsus, ont passé huit ans en prison. Les six infirmières, comme le médecin, ont tous déclaré avoir été torturés physiquement et moralement pour avouer une culpabilité qu’ils ont par la suite toujours niée. Mais le tribunal de Tripoli n’a tenu compte que de leurs aveux. Les soignantes ont fait état des mêmes violences à l’électricité qu’Achraf Hajouj, le médecin d’origine palestinienne, et certaines ont affirmé avoir été violées.
De fait, tous étaient d’accord pour signer le document promettant l’impunité à leurs tortionnaires afin de rapidement regagner Sofia. Mais outre le fait que « personne n’a vu le document », celui-ci ne saurait « avoir de valeur juridique dans la mesure où il a été extorqué sous la violence », explique Antoine Alexiev, l’un des avocats français des soignants. Cela, qu’il ait été signé dans le cadre d’un « engagement personnel » ou dans celui des engagements internationaux de l’UE et des différentes parties concernées. Il s’agit également de savoir « dans contexte il serait invoqué. Si on se présente en Libye, la cour dira qu’il est valable au regard de la loi libyenne ».
Dès leur libération, les médias avaient posé la question aux ex-prisonniers des suites éventuelles à apporter à cette affaire. Epuisés, ils avaient repoussé le moment d’en parler. « Elles ne sont toujours pas en état de prendre une décision, indique Antoine Alexiev, mais si un jour elles décident d’une action, nous sommes à leur entière disposition. »
Mise à jour le 03/08/2007 à 11h35
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