Les culs-de-jatte kinois ont pris comme une injure une phrase chantée par Koffi Olomidé dans son dernier album. La vraie raison de leur colère : leur idole Papa Wemba n’a pas été récompensée aux Kora 2002.
Une simple phrase a mis le feu aux poudres. » Ne parlez jamais des chaussures en présence de celui qui a perdu ses jambes « . Ce sont ces mots, chantés par Koffi Olomidé dans sa chanson » Gros bébé « , que les handicapés physiques de Kinshasa ont pris pour eux. Piqués au vif, ils ont réservé un comité d’accueil rageur au chanteur, revenu au pays fort de ses quatre trophées fraîchement remportés aux Kora 2002.
Les mécontents en question sont les » Romains « , des culs-de-jatte regroupés en association. Ils n’ont pas apprécié cette phrase du dernier album de la star zaïroise, Effrakata, mais la vraie raison de ce tollé se cache derrière l’accusation d’humiliation et d’insulte. Les Romains sont des fans inconditionnels de Papa Wemba, l’autre star de la musique congolaise, qui depuis plus de dix ans les aide financièrement, et leur offre les vélos adaptés à leur handicap.
Guerre des fans
» La phrase en question est un vieux proverbe de chez nous, ce n’est pas une insulte « , insiste Anguy Ibanga, directeur du bureau de Papa Wemba. » Ça n’a rien à voir avec l’artiste et ce qu’il pourrait penser des handicapés. Les Romains veulent nous faire entrer dans une polémique que nous ne voulons plus. Il n’y a aucun problème entre Koffi Olomidé et Papa Wemba : ils ont donné un concert ensemble l’année dernière et remettent ça cette année. » Sur le terrain, pourtant, les rivalités entre fans des deux chanteurs dégénèrent souvent. » C’est toujours la guéguerre entre eux. »
Les Romains auraient donc mal avalé le fait que Papa Wemba reparte les mains vides des Kora de Johannesburg. Autre motif : » Ils souhaitent faire parler d’eux et veulent que Koffi leur donne aussi de l’argent « , assure Anguy Ibanga. Les Romains, comme les autres groupes d’handicapés et de mendiants de la capitale congolaise (RDC), doivent se débrouiller comme ils le peuvent pour survivre. Aucune structure ne les prend en charge. Les » Kaddafi » désignent les jeunes qui vendent de l’essence en bidon, les » Shégués » sont les enfants des rues qui font la manche, volent et rackettent pour s’en sortir (ils sont plus d’un million dans la ville). Les Romains, eux, squattent le beach Ngobila, où le bac de liaison Kinshasa-Brazzaville déverse ses passagers. Ils gagnent un peu d’argent en rendant service aux usagers.
Papa Wemba, qui doit se rendre dimanche à Kinshasa, a prévu une rencontre avec les Romains. Histoire de leur faire chanter un autre air.
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