Les handicapés sont marginalisés à Madagascar. Toutes les portes de l’insertion sociale se ferment à leur nez. Les handicapés mentaux sont les premiers discriminés. Troisième article de notre série « Etre handicapé en Afrique ».
» L’Etat porte une grande responsabilité dans la situation actuelle des handicapés. Il s’est désengagé complètement du champ social, laissant les gens se débrouiller comme ils le peuvent. Seulement, la légendaire solidarité africaine n’existe plus. C’est la course aux profits », analyse froidement Michel Boroa, économiste. Les organisations non gouvernementales (ONG), pour pallier l’absence de l’Etat, mettent en place des structures régionales et nationales en fédérant les principales associations. » Nous cherchons à renforcer les capacités de ces associations à lutter pour la défense des personnes handicapées et aussi contre les discriminations dont souffrent les handicapés mentaux « , relève Bertille Darragon, membre de Handicap international.
Cachez ces fous, c’est fady !
Les handicapés mentaux sont « fady » (tabous). » Les Malgaches cultivent une politique du paraître . Les handicapés mentaux sont cachés, invisibles. La déficience mentale est un tabou. Ce n’est pas de cette façon qu’on facilitera leur intégration « , s’offusque Marie-Thérèse, bénévole dans une association locale. Handicap international milite pour la scolarisation des handicapés, trop souvent exclus des écoles. Moins de 10 % d’entre eux sont scolarisés. » nous travaillons avec 83 associations, sur les 160 qui existent dans l’île, regroupées dans le COPH (collectif des organisations oeuvrant en faveur des Personnes Handicapées à Madagascar). Nous sommes aussi partenaires de 13 associations qui interviennent auprès des handicapés mentaux « , précise Bertille Darragon.
Les centres d’appareillage créés et réhabilités par les ONG appartiennent désormais au service public. » L’Etat ne peut pas fuir tout le temps ses responsabilités. Il a créé une grande confusion avec la décentralisation. Nous ne savons plus qui est le bon interlocuteur. Il existe bien un centre de décision mais on ne sait pas où il se trouve « , s’insurge Michel Boroa.
Menace de mendicité
Le budget annuel de Handicap international pour le Madagascar est de 6 millions de francs pour tout le programme. Que se passerait-il si ces aides venaient à disparaître ? Bertille Darragon ne se fait pas d’illusions. » La personne handicapée ne peut pas travailler, elle est condamnée à la mendicité « . Conclusion partagée par les associations locales. Rien n’est prévu pour les handicapés. » Un homme politique me disait qu’il n’y a pas assez de travail pour les valides et que les personnes diminuées physiquement passent après. Ils ne sont pas une priorité pour lui ! « , s’offusque Marie-Thérèse.
La dimension sociale du handicap n’est pas prise en compte. Hors de l’école et du local associatif, l’handicapé n’a pas d’espace pour exister. Le programme » développement social urbain » que réalise Handicap international ne peut réellement se concrétiser sans une volonté politique. Et celle-ci est, pour l’instant, très timide.
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