Espèce en voie d’extinction, les gorilles des montagnes, au nombre de 700 seulement dans le monde, sont aujourd’hui de plus en plus menacés par la guerre, le braconnage et la déforestation. Alors que l’année 2009 a été décrétée « année du gorille », la rébellion qui sévit dans l’est de la République Démocratique du Congo met en péril la survie des quelques 200 résidents du parc national des Virunga. Une forêt sans sa faune serait une catastrophe écologique et un manque à gagner économique très important pour cette région en guerre.
2009 sera l’année du gorille, à l’initiative du prince Albert de Monaco. Dans le cadre de la neuvième conférence des pays membres de la convention des Nations unies sur la conservation des espèces migratrices (CMS) qui a lieu à Rome du 1er au 5 décembre, le prince monégasque a souhaité braquer les projecteurs sur ces grands singes en voie d’extinction. Bien que très proches de l’Homme – ils partagent avec nous 96% de leurs gênes -, ils sont ses victimes directes. Chassés pour leur viande, souvent au milieu des tirs croisés, ils subissent aussi la destruction humaine de leur habitat.
Cependant, au milieu du chaos qui sévit dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), une heureuse nouvelle nous est parvenue lundi. Cinq bébés gorilles sont nés dans le parc national des Virunga, situé dans la province du Nord-Kivu à l’est du pays. Cette naissance, qualifiée d’ « exceptionnelle en temps de guerre» par le directeur du parc, Emmanuel de Merode, cache pourtant une autre réalité, plus triste pour les gorilles.
15 gorilles de montagnes abattus en 2007
Les rebelles du Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP), dirigés par Laurent Nkunda, tiennent en échec les forces armées régulières de Kinshasa à partir de cette région et contrôlent la partie sud du parc depuis août 2008. Les gorilles sont menacés à plusieurs titres. Par les rebelles d’abord qui tuent et blessent régulièrement les grands singes. « Rien que la seule année 2007, nous avons enregistré l’abattage de 15 gorilles de montagne », a déclaré le ministre congolais de l’Environnement, José Endundo Bononge. Les milices empêchent aussi la gestion du site protégé depuis quatorze mois. Le 26 octobre dernier, quelques 180 gardes ont dû trouver refuge dans un camp de déplacés mis à leur disposition par l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), après l’avancée vers Goma des nkundistes. La rébellion a fait marche arrière grâce à l’insistance du directeur du parc et les gardes ont pu reprendre leurs activités dès le 21 novembre. « Le CNDP contrôle tout le territoire de Rutshuru, donc toute la partie sud du parc, mais ils ont accepté que la structure étatique qui gère le parc puisse continuer son travail sans condition », a déclaré Emmanuel de Merode.
La survie des gorilles est aussi menacée par la population. Celle-ci, fuyant les combats est contrainte de se réfugier dans les montagnes. Victimes de la guerre et en proie à des difficultés économiques, les déplacés coupent du bois dans la forêt pour se chauffer et chassent les gorilles pour leur viande.
Les gorilles victimes directes de l’extraction illégale des ressources du sous-sol
La déforestation de la forêt congolaise, deuxième poumon vert de la planète après l’Amazonie, n’est pas seulement le fait d’actes isolés mais représente un trafic lucratif. Une guerre de prédation économique est engagée depuis 1998 par les différents groupes rebelles dans cette région riche en coltan. Ce minerai, utilisé principalement dans la fabrication de matériaux électroniques, se trouve en abondance dans les sous-sols forestiers de la RDC. Il est extrait illégalement et revendu par les différents groupes qui occupent la région. Il représente une manne financière considérable mais provoque des dégâts écologiques conséquents.
Lutter pour la préservation des gorilles n’est pas incompatible avec la défense des populations, bien au contraire. La conférence de Rome a insisté sur le fait que protéger les grands singes menacés est bien plus lucratif à long terme que de les décimer. Le Rwanda et l’Ouganda par exemple sont deux pays qui « tirent d’importants profits économiques d’un écotourisme fondé sur les singes anthropoïdes ». « Ce tourisme, (…) surpasse désormais les exportations de café et de thé en tant que premier producteur de devises du Rwanda », a ajouté le communiqué.
L’année du gorille sera le moyen d’inscrire à l’agenda international le respect de la biodiversité africaine et aussi une opportunité pour les populations locales de diversifier leurs ressources économiques.