Hillary Clinton a achevé, vendredi, au Cap-Vert, sa tournée en Afrique. Durant onze jours, la secrétaire d’Etat américaine aura visité sept pays africains pour une opération de séduction très attendue. Entre coopération économique, appel à la lutte contre la corruption et la dénonciation de la mauvaise gouvernance, la chef de la diplomatie a tracé le chemin du retour de l’Amérique en Afrique déjà évoqué par le président Barack Obama, lors de son discours au Ghana, en juillet dernier.
Après un marathon de onze jours dans sept pays africains – Kenya, Afrique du Sud, Angola, République démocratique du Congo, Nigeria, Liberia, Cap-Vert, la secrétaire d’Etat américaine a-t-elle réussi à tracer le chemin du retour de l’Amérique en Afrique, comme le laissent entendre certains observateurs ? Ce qui est sûr c’est qu’elle a su mettre à profit le capital de popularité de Barack Obama sur le continent, pour renforcer les relations entre les Etats-Unis et les pays clés de l’échiquier africain. Hillary Clinton n’a pas choisi au hasard les pays à visiter. Elle a opté pour deux types d’Etats : ceux qui ont fait le choix de la démocratie, et ceux qui par leurs richesses énergétiques, suscitent de l’intérêt. Pour attirer des investisseurs, les Etats Africains doivent se plier aux exigences de la bonne gouvernance.
« La seule ouverture des marchés ne suffit pas pour attirer des investissements, il faut des lois qui sont appliquées, la transparence, la responsabilité», avait déclaré Barack Obama, le chef d’Etat américain, en juillet dernier, lors de sa visite éclair au Ghana. Un discours qui allait donner le ton à la tournée de la secrétaire d’Etat américaine. C’est donc sans surprise qu’à chaque étape de sa visite, Hillary Clinton a appelé à la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption. « Nous n’édulcorons pas les problèmes, nous ne reculons pas devant eux, notre préoccupation est d’aider à canaliser les espoirs et aspirations des populations de l’Afrique, dans une voie qui change la direction de leurs pays », a-t-elle lancé, vendredi, au Cap-Vert, au terme de sa tournée africaine. Ce pays insulaire de cinq cents mille habitants au large de l’Afrique de l’Ouest est perçu comme un modèle démocratique. Ce qui lui vaut le soutien américain.
La veille de son séjour au Cap Vert, la chef de la diplomatie américaine avait loué au Liberia, qui est depuis fin 2005 le seul Etat Africain dirigé par une femme élue au suffrage universel, le même effort de démocratie et de bonne gouvernance. L’Amérique est prête à travailleur avec les Africains, mais elle ne dispose pas de « baguette magique » pour faire disparaitre leurs problèmes, avait assuré Hillary Clinton. Aux bons élèves de la démocratie, les bonnes notes. Aux cancres, la note qu’ils méritent. Pour Tom Wheeler, chercheur à l’Institut sud-africain des Affaires internationales, la nouvelle administration américaine a imprimé « un changement de style et de substance » à ses relations avec l’Afrique.
La « Chinafrique » sur la sellette
Mais les bonnes intentions démocratiques ne peuvent pas à elles-seules justifier le déploiement diplomatique américain en Afrique sub-saharienne. Les Etats Unis, on le sait, sont avant tout venus chercher des opportunités d’affaires dans un continent qui, en dépit des pillages et des gaspillages, demeure très riche en ressources énergétiques. Et dans ce domaine, le gouvernement américain sait qu’il doit affronter une rude concurrence de la Chine. Peu regardante sur le respect des droits de l’Homme et vorace en ressources énergétiques, l’empire du Milieu a investi ces dernières années à tout-va en Afrique, au point de devenir le premier créancier de nombre de pays, loin devant leurs partenaires occidentaux habituels.
Une nouvelle donne perçue avec inquiétude du côté de Washington. C’est sans doute ce qui explique le choix comme pays-étape de la tournée d’Hillary Clinton, le Nigeria et l’Angola. Le premier fournit 8% de la consommation américaine d’or noir et le second, 7 %. Hors, ces deux pays figurent parmi les principaux bénéficiaires des investissements chinois. La présence de ces deux pays dans l’agenda de la secrétaire d’Etat américaine répondait donc à une stratégie de contre-offensive.
Même pour un pays comme la République démocratique du Congo (RDC) où Hillary Clinton a beaucoup parlé de la violation des droits de l’Homme, la recherche d’opportunités d’affaires n’était pas absente. Le sous-sol de la RDC est extrêmement riche en ressources minières et énergétiques. C’est d’ailleurs la convoitise de ces richesses qui est à l’origine des conflits qui depuis plus de dix ans déstabilisent ce pays. On a ainsi vu la main de Washington derrière le soudain rapprochement entre MM Joseph Kabila et Paul Kagamé les présidents du Congo et du Rwanda, qui à la surprise générale ont décidé d’enterrer la hache de la guerre en janvier dernier, et annonçant dans la foulée des projets économiques communs. Pour son déplacement en RDC, la secrétaire d’Etat américaine était d’ailleurs accompagnée de Robert Zoellick, le président de la Banque mondiale…
Bémols
L’Amérique tisse ainsi sa toile en Afrique. Mais à la différence des autres visiteurs occidentaux, la secrétaire d’Etat américaine n’a pas fait de promesses de financement majeures. Les rares chiffres dont elle a fait état concernent la hausse des fonds pour la lutte contre le sida en Angola, et l’augmentation des aides pour lutter contre les viols en RDC. Certaines sources font toutefois état d’un plan de 20 milliards de dollars prévu par l’administration Obama en faveur des huit nations les plus riches d’Afrique. Une somme qui servira à dynamiser l’agriculture en Afrique, de sortes que les Africains puissent s’attaquer eux-mêmes au problème de la malnutrition.
Il va donc falloir attendre pour voir. Pour l’instant, même si les observateurs s’accordent à dire que la tournée d’Hillary Clinton a été plutôt réussie, seules des actions concrètes permettront de faire la différence entre les grands discours, la lutte pour le contrôle des ressources énergétiques, et la volonté réelle d’aider à l’amélioration des conditions de vie des Africains.
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