Le siège de la 6e Région miliaire à Tamanrasset en Algérie abrite, depuis mercredi, une importante réunion des chefs des états-majors de l’Algérie, du Niger, de la Mauritanie et du Mali. L’ordre du jour est la mise au point et la coordination d’un agenda de lutte commune contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne.
Dans un communiqué rendu public mercredi, le ministère algérien de la Défense affirme que la réunion des états-majors de l’Algérie, du Niger, de la Mauritanie et du Mali s’inscrit « dans le cadre des efforts soutenus consentis par les hautes instances des pays participants relatifs au renforcement des relations de coopération militaire et sécuritaire ». Il est question, selon la même source, « d’aborder les questions d’intérêt commun, d’échanger les points de vue et d’examiner les voies et moyens de consolider la coopération autour d’une lutte commune contre la criminalité qui sévit au niveau des bandes frontalières et, plus particulièrement contre le terrorisme ».
Une rencontre attendue
En fait, cette rencontre était prévue, il y a plus d’un mois. Elle permettra aux chefs militaires qui y prennent part de mettre au point une batterie de mesures à même de constituer un front commun contre toutes les menaces qui pèsent sur la région sahélo-saharienne, particulièrement le terrorisme et la contrebande d’armes. La Libye est la grande absente de cette réunion, alors qu’elle occupe une place prépondérante dans la région. Pour l’heure aucune information n’a filtré sur les vraies raisons de cette défection. Est-elle liée aux dualités (algéro-libyennes) de leadership régional ? On n’en sait rien pour l’instant.
En tout état de cause, la réunion de Tamanrasset était en préparation depuis près d’un mois, en attendant le sommet sur la sécurité et le développement, auquel ne cesse d’appeler le président malien, Amadou Toumani Touré, qui reste tributaire des agendas des chefs d’Etat conviés. La date a été à chaque fois reportée du fait des rendez-vous politiques des pays, comme les élections présidentielles en Algérie, puis en Mauritanie et le référendum du 4 août dernier au Niger. Les experts des pays participants avaient quant à eux achevé depuis longtemps les travaux. Entre temps, les activités des terroristes se sont intensifiées dans la bande frontalière (au nord du Mali, Niger et Mauritanie) devenue une vraie base arrière de recrutement et de logistique du GSPC, autoproclamé Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), mais aussi pour les bandes de trafiquants en tout genre, chacun d’entre eux y trouvant ses intérêts mutuellement partagés.
Une lutte commune
Attentats suicide en Mauritanie, multiplication des enlèvements de touristes et de diplomates occidentaux au Niger et au Mali, embuscades contre les convois militaires, extorsion, paiement de rançons en contrepartie de la libération d’otages, exécution de ces derniers en cas d’échec des négociations et assassinats ciblés ont obligé les pays riverains à prévoir une riposte commune et à éviter une intervention étrangère directe.
Etant donné la situation de paupérisation et d’instabilité politique dans laquelle se trouvent la plupart de ces pays, l’Algérie et la Libye, dotées de moyens et surtout d’influence dans la région, sont sollicitées pour assister leurs voisins et les aider à sécuriser la bande frontalière. C’est le Mali qui va avoir la part du lion du fait de l’utilisation du nord de son territoire comme zone d’activités terroristes intenses des groupes de Belmokhtar et d’Abou Zeid, estimés à 200 éléments évoluant surtout entre Kidal et Taoudenni, avec des incursions en Mauritanie, au Niger et même jusqu’au Tchad. Au début du mois de juillet dernier, Amadou Toumani Touré avait profité de l’occasion de sa présence en Libye dans le cadre d’une rencontre des chefs d’Etat africains pour solliciter l’aide des présidents Mouammar Gueddafi et Abdelaziz Bouteflika, mais aussi pour les interpeller sur la nécessité de tenir le sommet sur la sécurité dans la bande sahélo-saharienne.
Des équipements militaires importants
A ce jour, aucune date n’a été retenue pour ce sommet, alors qu’une importante quantité d’équipements militaires et d’armement a été acheminée vers Bamako par l’armée algérienne dans le cadre d’une opération d’assistance, qui devait compter 5 convois, qui n’a toujours pas été achevée. De son côté, le Mali, qui devait intégrer des ex-rebelles touareg dans des unités spéciales mixtes (avec des militaires) dans le cadre des dispositions de l’accord d’Alger qui a mis fin à la rébellion (au nord du pays), n’a toujours pas lancé l’opération.
Néanmoins, certaines puissances extra régionales comme la France, l’Espagne et les Etats-Unis ont multiplié les opérations de coopération en matière de lutte contre le terrorisme, notamment dans les domaines de la formation militaire, de l’équipement et du renseignement. La dernière attaque qui a ciblé un convoi de militaires maliens, faisant 26 morts parmi ces derniers, a créé l’onde de choc, surtout chez les tribus arabes alliées de Bamako, qui désormais réclament une plus grande fermeté contre les activités du GSPC qui se sont multipliées, faisant des dizaines de victimes. Très présents dans la région, les Américains ont intensifié leur coopération avec Bamako où, récemment, plusieurs hauts officiers ont séjourné.
La réunion de Tamanrasset est une autre occasion pour les pays riverains afin de trouver les moyens adéquats et de coordonner leurs efforts pour venir à bout des menaces qui minent dangereusement leur sécurité.
Par Salima Tlemçani pour El-Watan