Des milliers d’Egyptiens sont descendus dans la rue, ce mercredi, pour la deuxième journée consécutive afin de réclamer le départ du président Hosni Moubarak. La tension et la mobilisation sont toujours grandes malgré l’interdiction promulgué par le gouvernement de manifester et la censure de Facebook et Twitter.
Les Egyptiens ne cèdent pas. Malgré l’interdiction du gouvernement, ce mercredi, de manifester, ils ont été des milliers pour la deuxième journée consécutive à réclamer le départ du président Hosni Moubarak, au pouvoir depuis 1981. Des heurts ont eu lieu dans le centre du Caire près de la Cour suprême où étaient rassemblés plusieurs centaines de manifestants. La police a tiré des gaz lacrymogènes face à ceux qui jetaient des pierres, selon l’AFP. Plus à l’est, dans la ville portuaire de Suez, 2000 personnes se sont mobilisées. Au moins 500 manifestants ont été arrêtés dans tout le pays, indiquent les services de sécurité égyptiens. Parmi eux, 90 ont été interpellés aux environs de la place Tahrir, au Caire, et 121 seraient des membres des Frères musulmans, une organisation islamiste officiellement interdite mais tolérée dans les faits.
Les Egyptiens ont répondu à l’appel à la mobilisation « pour le droit de vivre, la liberté et la dignité », lancé ce matin par le groupe militant pour
la démocratie Mouvement du 6 avril , via sa page Facebook. Il les a invités à se rassembler à nouveau sur la place Tahrir, où 10 000 personnes, selon des chiffres officiels, avaient déjà manifesté mardi, en scandant «le peuple veut le départ du régime». Le gouvernement, voulant mettre un terme à cette révolte, a réagi quelques minutes après l’annonce de la nouvelle journée de mobilisation. Le ministère de l’Intérieur a indiqué qu’il ne tolèrerait aucune nouvelle manifestation. «Aucun acte de provocation, rassemblement de protestation, marche ou manifestation ne sera permis», a-t-il déclaré. «Des mesures légales seront prises contre quiconque» serait en infraction, a-t-il ajouté en soulignant que tout contrevenant serait déféré devant la justice.
Twitter et Facebook bloqués
Les réseaux sociaux, comme en Tunisie, qui ont servi à relayer les appels à manifester, sont actuellement inaccessibles en Egypte. Twitter est bloqué depuis mardi après-midi. Le site de micro-blogging le confirme sur son propre fil. «Nous pensons que les échanges d’informations et de points de vue sont bénéfiques aux sociétés et aident les gouvernements à ne pas se couper des populations», ont affirmé les représentants de Twitter.
Même sort pour Facebook qui était inaccessible, ce mercredi, selon le site d’information high tech Techcrunch. Le site internet suédois de vidéos en direct Bamsbuber a aussi été bloqué, ont indiqué ses dirigeants. Maans Adler, fondateur du site créé en 2007, a affirmé qu’il était convaincu que le gouvernement égyptien était responsable de ce blocage. La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a prié l’Egypte, de «ne pas perturber le fonctionnement des réseaux sociaux sur internet ».
La communauté internationale réagit
Le gouvernement égyptien a reçu plusieurs messages en provenance de l’étranger lui demandant d’engager des réformes répondant aux aspirations de son peuple, mettant en évidence son rôle modérateur entre le monde arabe et Israël. Notamment Barack Obama, le président américain, a affirmé que « les Etats-Unis d’Amérique sont solidaires des Tunisiens, et soutiennent les aspirations démocratiques de tous les peuples ». La Maison Blanche a aussi appelé l’Egypte à lever l’interdiction de manifester.
L’Union Européenne n’est pas restée de marbre face à la crise. Berlin s’est déclaré « très inquiet de la situation », alors que Paris a déploré les morts et rappelé être favorable à « plus de démocratie dans tous les Etats ». Quant à l’Italie, elle a souhaité que Hosni Moubarak continue « à gouverner avec sagesse et clairvoyance ». Israël, par la voix de son vice-Premier ministre Sylvan Shalom, espère que les troubles n’auront pas d’impact sur ses relations avec l’Etat égyptien.
La Bourse du Caire n’a pas été épargnée par les troubles. Elle a subi une baisse de 6,14%, et la livre égyptienne a plongé dans la journée à 5,83 livres pour un dollar, son plus bas niveau depuis janvier 2005.
Selon des spécialistes, ces manifestations anti-gouvernementales sont les premières de cette ampleur depuis les émeutes de 1977 provoquées par une hausse du prix du pain. Le peuple égyptien en colère n’a pas dit son dernier mot. Sur sa page Facebook, le Mouvement du 6 avril appelle la poursuite quotidienne des manifestations de rue « jusqu’à ce que Moubarak parte ». Et sur ce même réseau social, des activistes appellent à une grève générale jeudi dans tout le pays.