Si l’Afrique change (paraît-il), les sommets africains restent heureusement les mêmes. Les chefs d’État des dix pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), qui s’étaient réunis début mars 2008 à Kinshasa, étaient demeurés fidèles à une grande tradition : celle de la condamnation du recours à la force pour accéder au pouvoir.
Consacré spécifiquement à la situation au Tchad, ce sommet s’était conclu par ce rappel final au respect de l’État de droit : « Les chefs d’État et de gouvernement des États membres de la CEEAC condamnent le recours aux armes et autres voies non constitutionnelles comme mode d’accession au pouvoir ainsi que toute déstabilisation des institutions démocratiques issues de la volonté du peuple tchadien ».
Cela constituerait une victoire supplémentaire des forces démocratiques à l’œuvre sur le continent si les signataires n’étaient pas, entre autres:
Le Président Centrafricain François Bozizé (arrivé au pouvoir par un coup d’État puis consacré par les urnes),
Le Président Congolais Denis Sassou Nguesso (arrivé au pouvoir par un coup d’État puis consacré par les urnes),
L’Angola en la personne de son premier ministre (arrivé au pouvoir par un coup d’État puis consacré par les urnes),
Le président burundais Pierre Nkurunziza (que l’on soupçonne d’être derrière cette pluie de grenades qui s’abat, depuis le début de l’année, sur les jardins des députés de l’opposition à Bujumbura)
Le président tchadien lui-même, Idriss Deby Itno qui a lui aussi suivi la filière désormais classique des Dos Santos, Sassou, Museveni et autres, à savoir après la mitrailleuse d’abord, l’urne ensuite !
Cette condamnation du recours à la force pour accéder au pouvoir par ceux-là mêmes qui ont eu besoin de mitrailleuses pour arriver jusqu’au Palais présidentiel montre que le ridicule n’a toujours pas tué les sommets africains. La démocratie n’est pas un vain mot en Afrique centrale, car c’est un mot qui fait rire !
Patrick Eric Mampouya