Où est le corps du jeune militant de l’ANC James Sizela, disparu après avoir été arrêté par la Police Spéciale ? Sur fond de Commission vérité et réconciliation, Poussière rouge, le premier roman de Gillian Slovo, aborde avec tact et brio les affres d’un apartheid destructeur. Prenant.
Une commission vérité et réconciliation, des parents face à leur peine, un bourreau face à sa victime, une victime face à son passé, une procureuse face à ses souvenirs et à son vieux mentor mourant, les ingrédients de Poussière rouge, le premier roman de Gillian Slovo, sont tous de première main. Sujet délicat que celui de l’apartheid. Mais le livre se garde, heureusement, de sombrer dans la facilité et offre un regard croisé et honnête sur les méandres de l’histoire. Une réussite.
James Sizela, militant ANC, est mort, tué par la police spéciale en plein apartheid. Mais où est le corps ? Pour tourner la page, ses parents voudraient retrouver ses restes pour lui offrir une sépulture décente. Sur la route du deuil, un homme, Dirk Hendrick, ancien membre des forces de sécurité, se dresse de tout son faux repentir devant la Commission vérité et réconciliation. Même s’il n’est pas la main meurtrière, il sait. Sarah Barkant est avocate aux Etats Unis. A l’appel de son vieil ami Ben, elle rentre au pays, pour s’occuper de l’affaire. L’argument pour faire plier Hendrick s’appelle Alex Mpondo, député de la nouvelle Afrique du Sud mais surtout frère d’arme de feu James et ancien prisonnier de celui qui désormais demande justement l’amnistie pour des actes de torture à son encontre.
Victoire à la Pyrrhus
Qu’est ce qui lie James, Alex et son bourreau ? Les démons du passé, qu’Alex avait, à grand peine, réussi à faire taire, resurgissent. Quel est le prix de la vérité ? Hendrick, à la barre des accusés, joue sans complexe la carte du mea culpa. Mais sous ses airs d’homme brisé, se cache un homme à l’implacable maîtrise de soi. Le vernis va-t-il craquer lors de la confrontation ? Enfin, à ce jeu de bras de fer y a-t-il véritablement un gagnant ?
La force du roman tient à ce que l’auteur ne se contente pas d’opposer le bien et le mal dans une dualité facile. Elle aborde la complexité d’un système où la responsabilité est à la fois individuelle et collective. Un système où chacun se trouve enfermé dans un rôle dicté par l’éducation et l’histoire. Sans excuser quoi que soit, l’approche de l’apartheid de Gillian Slovo, reste lucide et pleine de sensibilité. L’écriture est vive, rythmée, précise et se prête à une lecture très agréable d’une oeuvre qui mérite bien mieux qu’un premier accessit.
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