Le 3 Juin 2007, s’écrasait à Lungi, en Sierra Léone, un hélicoptère MI-8 de fabrication russe qui assurait la liaison entre Freetown et l’aéroport international de Lungi. Vingt-deux personnes, dont treize Togolais, ont trouvé la mort lors de ce crash, provoquant douleur et consternation dans tout le pays. Parmi les disparus le ministre des sports du Togo et des officiels de la Fédération togolaise de football. Un an plus tard, les autorités togolaises ont délaissé les familles et le rapport d’enquête tarde à venir.
Notre correspondant à Lomé
Les autorités togolaises ont rendu hommage à ceux qu’ils appelaient les « martyrs de Lungi ». Des promesses ont été faites pour retrouver les véritables mobiles de l’accident ou de l’attentat (cette piste n’est pas exclue). Mais curieusement, ceux qui hier se préoccupaient des morts de Lungi semblent avoir vite oublié leur mémoire et les dommages causés à leurs familles respectives.
La promesse est une dette
Un an après ce drame, seuls une messe anniversaire et un tournoi de football sont organisés en hommage aux victimes. « C’est bien dommage que l’on puisse de sitôt oublier ceux-là qui sont morts pour le nom du Togo. Les organisateurs de ces messes et autres n’ont même pas daigné informer les parents et proches des victimes », s’indigne Me Apevon, le Président du collectif des parents des victimes.
Au lendemain des hommages aux « héros nationaux », l’Etat togolais a promis d’ériger un monument à l’entrée ou aux abords du stade de Kégué en vue d’honorer et d’immortaliser la mémoire des victimes du crash. Aujourd’hui, un an après ce drame, cette promesse commence visiblement par prendre la poussière, selon les parents des victimes. « C’est l’amertume. Rien n’est fait jusque là pour nos enfants. Même pas la pause d’une pierre pour la construction du monument comme promis », se désole Bernard Mensah, un parent des victimes.
Pour Me Apevon du collectif des victimes, il faut patienter et attendre ce geste des autorités. « Nous espérons vivement que l’Etat n’a pas encore oublié ces victimes et qu’il allait effectivement tenir à sa promesse. Mais le temps passe et cela nous donne des soucis », nous a-t-il confié.
Un rapport d’enquête qui tarde à voir le jour
A part le rapport d’enquête dirigé et rendu public par Aholouédji Komlan Atisso depuis le 15 juin 2007, décrivant les circonstances de l’accident, les Togolais ne voient plus rien venir. « Un dossier d’assurance est un processus assez long. Les compagnies d’assurance ont leurs règles qu’il faut forcément suivre en franchissant les étapes l’une après l’autre. Pour plaider le dossier il faut d’abord le lancer en étude. C’est ce que nous avons fait en assignant l’Assureur et la FTF en justice en vue d’aplanir les divergences au niveau de la nature des assurés. Cette affaire a été reportée plus de 5 fois. Et ce n’est que la semaine dernière que l’affaire a été traitée en l’absence constatée de la FTF. Nous avons eu gain de cause et on pourra désormais organiser notre plaidoirie qui est aussi une autre étape en vue d’aboutir à la réparation. »
En outre, une autre affaire d’assurance serait à la base de ce feuilleton de Lungi. D’après les investigations, la Fédération Togolaise de Football (FTF) aurait souscrit auprès d’une compagnie d’assurance qui ne prend en compte que la délégation de la FTF et les joueurs. Ce qui fait un total de 45 personnes dont les noms ne sont pas cités. Seul le Conseiller à la FTF, Théodore Amegnran (décédé dans le crash) est reconnu dirigeant. Les autres ne sont ni dirigeants, ni joueurs.
« Le texte est bel et bien clair. « 45 personnes non dénommées » signifie que la FTF forme sa délégation comme elle l’entend. Une délégation est une entité composée de dirigeants et joueurs dans le cas présent. Il n’est écrit nulle part que les dirigeants sont exclusivement les membres du Bureau Exécutif», explique Me Apevon. Il ajoute que « ce qui relance la longue procédure dans l’indemnisation des parents des victimes est la lourdeur administrative dont est victime le dossier. La commission d’enquête est composée de Togolais, de Gabonais, de Russe, de Français et de Sierra Léonais qui sont tous des ressortissants parmi les victimes ».
Le rapport final est attendu dans les prochains mois, mais déjà la presse togolaise confirme la thèse d’un attentat compte tenu de l’environnement sécuritaire précaire de la Sierra Leone. Elle estime qu’un Sierra Leonais aurait tiré sur l’engin.
L’accident de Freetown n’est qu’un accident du pauvre qui a malheureusement coûté la vie à 14 togolais, 4 stewards gabonais, deux pilotes français, et deux russes pilotant l’hélicoptère.
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