Les Afromexicains oubliés depuis 200 ans


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On estime à 450.000 le nombre d’afromexicains dans le pays, mais le chiffre réel est inconnu, car les autorités n’ont pas effectué un décompte précis.

Lors de la guerre d’indépendance du Mexique dont les célébrations des 200 ans débutent cette semaine, des milliers d’Afromexicains ont combattu dans l’armée rebelle. Deux des héros les plus illustres du mouvement, José María Morelos et Vicente Guerrero avaient une ascendance noire.

Mais ces faits n’ont pas été reconnus. Et deux siècles plus tard, les communautés afrodescendantes vivent isolées et dans des conditions d’extrême pauvreté.

La majorité des habitants du pays ne sait pas qu’il ya des Noirs Mexicains et même les autorités ne connaissent pas totalement ce secteur de la population, affirme Ricardo Bucio, président de Conseil National pour la Prévention de la Discrimination (CONAPRED), un organisme gouvernemental.

« Il n’ya pas de statistiques fiables émanant du gouvernement, ni de politique publique spécifique en leur faveur. L’information empirique que nous avons, c’est qu’ils sont dans une situation désavantageuse », indique-t-il dans un entretien avec BBC Mundo.

Les études de l’Université Nationale Autonome Mexico (UNAM) estiment à environ 450.000 personnes la population des afromexicains, et selon la Chambre des députés, la moitié environ se trouve dans une situation de forte marginalisation.

La population afromexicaine provient des esclaves emmenés en Nouvelle-Espagne dès 1580, pour remplacer les quelques 10 millions d’indigènes morts suite à une série d’épidémies inconnues sur ce territoire.

Certains historiens évaluent à environ 250.000 le nombre d’esclave arrivés dans le pays.

Les africains se mélangèrent aux peuples autochtones, ce qui fit apparaitre les afrométisses (afromestizos) qui constituèrent une nouvelle classe sociale qui vivait en liberté, mais dans des conditions difficiles.

Il y avait cependant encore des milliers d’esclaves, surtout dans les exploitations agricoles du centre et du sud-est du Mexique.

En Décembre 1810, Miguel Hidalgo abolissait l’esclavage dans la ville de Guadalajara, à l’ouest, où l’on trouvait l’un des rares marchés d’êtres humains opérant au Mexique.

De nombreux afromestizos rejoignirent l’armée d’Hidalgo, particulièrement dans le sud du pays.

Mais il y eut également des esclaves dans les forces adversaires, car les propriétaires des haciendas les obligèrent à rejoindre l’armée du Vice Roi espagnol, explique à BBC Mundo le chercheur Faustino Aquino, de l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire.

Leur participation à la conquête de l’indépendance a été oublié. « Le patrimoine noir est resté occulté, il a presque disparu », indique Aquino.

Aujourd’hui, deux siècles plus tard, les afromexicains se tiennent habituellement à part.

Leurs manifestations culturelles sont un mélange de traditions indigènes avec des caractéristiques venant d’Afrique.

Les choses ont toujours été ainsi, indique à BBC la chercheuse Alejandra Luz Cardenas, de l’Université Autonome de Guerrero.

« L’Inquisition disait que leurs vêtements étaient condamnables, et certaines femmes furent accusées d’avoir participé aux pratiques de sorcellerie uniquement pour accomplir leurs rituels ».

Aucun ne fut condamné à mort, pour une raison perverse: « Les esclaves coûtaient autant qu’une maison, et personne ne voulait perdre tant d’argent », indique Cardenas.

Beaucoup d’esclaves s’échappèrent des plantations pour se réfugier dans les zones montagneuses, où ils fondèrent des communautés qui existent encore, comme à Guerrero et Oaxaca, au sud du pays.

Et comme à l’époque, leurs conditions de vie sont souvent difficiles.

Près de deux siècles après l’abolition de l’esclavage, les communautés d’afromestizos sont virtuellement invisibles.

Par exemple, les recensements de population n’incluent pas de questions visant à mesurer la population noire, ce qui a pour conséquence l’inexistence de statistiques fiables et ce qui entraine à son tour une négligence de la part des autorités, préviennent les organisations de la société civile.

« Les programmes gouvernementaux confinent les communautés noires, car ils semblent avoir été conçues pour une autre population », affirme Israël Reyes, coordinateur de l’association África AC.

En plus, selon le président du CONAPRED, les descendants des Africains sont une minorité qui n’a pas l’habitude de s’organiser pour faire les démarches pour l’obtention de services, ce qui les met dans une situation désavantageuse par rapport aux autres groupes ethniques comme les autochtones.

Dans de nombreuses communautés et selon certaines informations, ils vivent dans des logements sans plancher solide, sans drainage ou entassés. Mais en la réalité, il n y a aucune donnée spécifique

Alors que l’on célèbre 200 ans d’indépendance du Mexique, les communautés d’afrodescendants ont peu de choses à fêter, ou alors elles le font à leur manière.

À Melchor Muzquiz, Coahuila, au nord du pays, il y a un peuple d’afromexicains qui préfère célébrer le 19 Juin plutôt que l’anniversaire du bicentenaire.

Cette date leur semble plus importante toute la célébration de l’indépendance: un 19 Juin il ya 200 ans, les Noirs Moscongos, comme le nom que porte cette communauté, ont cessé d’être des esclaves et devinrent légalement des citoyens de ce pays.

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