Les Congolais sont appelés à désigner leurs députés, dimanche, au sein d’un parti présidentiel tout-puissant et d’une opposition divisée entre participation critique et boycott. Dans ces conditions, nombre d’électeurs prévoient d’accorder leurs suffrages aux candidats les plus généreux.
A l’heure des Législatives, la transition démocratique au Congo Brazzaville se fait à petit pas, entre résignation des citoyens, suprématie du parti au pouvoir et appel au boycott de l’opposition. Près de deux millions d’électeurs congolais sont appelés aux urnes, dimanche, pour élire 137 députés parmi 1044 candidats. Mais depuis plusieurs mois, le parti congolais du travail (PCT), au pouvoir, se querelle avec l’opposition, appuyée par un certain nombre de partis alliés au PCT, sur les modalités d’organisation du scrutin. Le débat porte notamment sur la nature de la Commission qui doit superviser le scrutin.
Les premiers, majoritaires à l’Assemblée et profitant du boycott du Parlement par l’opposition, ont obtenu en avril dernier que les commissaires électoraux soient désignés par décret présidentiel. Depuis, les opposants réclament le remplacement de la Commission nationale d’organisation des élections (CONEL), mise en place le 31 mai, par une Commission « véritablement indépendante ». C’est le cas du Rassemblement pour la démocratie et le développement de Saturnin Okabé, de l’Union patriotique pour le renouveau national de Mathias Dzon et de l’association Cercle de réflexion pour le nouvel ordre national du général à la retraite, Emmanuel Ngouelondelé-Mongo.
Le Pasteur Ntumi indécis
De son côté, le pasteur Frédéric Bintsamou, dit Pasteur N’Tumi, ex-chef des Ninjas, qui a combattu le président Sassou Nguesso de 1998 à 2003 dans le département du Pool, a longtemps hésité. Avec son parti, le Conseil national des Républicains (CNR, ex Conseil national de la résistance), il a d’abord appelé au boycott, au début du mois, avant d’annoncer sa participation au scrutin pour ne « pas cautionner le vide », « quand bien même les conditions ne seraient pas réunies ».
Dernier acte, celui qui est devenu en mai le « délégué général auprès du président de la République, chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation des séquelles de guerre », a annoncé ce mardi que le CNR « se réserve (…) le droit de retirer ses candidats dans les 48 heures en cas de non respect de (ses) préoccupations. » Il a dénoncé dans le « processus électoral en cours au Congo (…) un véritable complot contre la démocratie ».
« L’organisation est correcte »
L’Union panafricaine pour la démocratie sociale de Pascal Lissouba, l’autre grand opposant à Denis Sassou Nguesso, ira aux élections. De même que le Rassemblement pour la démocratie et le développement (RDD) de l’ex-Premier ministre Jacques Joachim Yhomby Opango et l’Union pour la démocratie et la République (UDR-Mwinda) de l’ancien chef de gouvernement André Milongo.
Mardi, le ministre congolais de l’Administration du territoire a de toute façon tranché la question : « Toutes les conditions sont réunies pour que le scrutin ait lieu dans les meilleures conditions possibles, a assuré François Ibovi. Les listes électorales sont en cours d’affichage, les cartes d’électeur vont être distribuées, le matériel électoral (urnes, isoloirs, bulletins) est en place dans les bureaux de. L’organisation est correcte », a-t-il ajouté, qualifiant les affirmations contraires de « désinformation ».
Au plus offrant
Dans ces circonstances, et alors que l’unité est loin de régner au sein même du parti au pouvoir, certains électeurs prévoient d’accorder leur suffrage au plus généreux des candidats. C’est le cas de cette maman de 22 ans qui explique à l’AFP vouloir voter pour un candidat qu’elle connaît et qui sait venir en aide aux habitants du quartier : « Quand ton enfant est malade, tu peux aller le voir, il donne l’argent pour aller à l’hôpital, pour payer l’ordonnance ». Idem pour ce jeune homme au chômage qui se réjouit que son protégé « partage, distribue des brouettes, des pelles et des bidons de 25 litres… »
Pire, Jean-Louis explique comment il s’est organisé avec d’autres habitants de son quartier, à Brazzaville, « pour attirer les candidats et bénéficier de leur assistance financière » en l’échange de leur militantisme intéressé. « En une dizaine de jours, explique-t-il à Afriquecentrale.info, nous avons déjà réuni plus de deux millions de francs CFA (environ 3.000 euros). » Le deuxième tour des législatives est prévu le 22 juillet prochain.