Depuis que le Festival Visa for music a ouvert ses portes le 11 novembre, la capitale marocaine Rabat vit au rythme de la musique. Reportage au cœur d’une ville transformée en plateau musical.
A Rabat,
« C’est mon premier cours de Kora ! Prends-moi tout de suite en photo! », lance à une de ses amies cette jeune fille au grand sourire, venue du Canada, qui s’apprête à jouer quelques notes en compagnie d’un des musiciens du groupe burkinabè Sumo. Une scène insolite, immortalisée en photo par de nombreux jeunes rassemblés au centre-ville de Rabat, devant la salle de la Renaissance, où les concerts s’enchaînent, à l’occasion de la deuxième édition du Festival Visa For music, fondé par Brahim el Mazned. Musique. Musique. Musique ! C’est en effet le mot que beaucoup d’habitants de Rabat ont en ce moment à la bouche. ?Depuis plusieurs jours, ?la capitale politique marocaine? a le rythme dans la peau ! Elle n’est ?en effet ?pas la même?, ?respirant la joie de vivre. Eclats de rires par-ci. Poignée de main franche. Retrouvailles entre vieux amis par là, toujours suivi d’accolades : « Ce n’est pas vrai, tu es aussi venu au Festival! Non; j’y crois pas !».
La jeune mélomane canadienne en plein apprentissage de la kora
C’est visiblement l’effet du Visa For music que la capitale marocaine abrite pour la deuxième année consécutive, après sa première édition, en novembre 2014. L’évènement réunit les artistes du Maroc, de l’Afrique subsaharienne, du Moyen Orient, des Caraïbes et du reste du monde, qui se produisent sur la scène de Rabat devant des milliers de professionnels de la musique et mélomanes. L’objectif, professionnaliser et mieux structurer le secteur artistique et culturel souvent bancal, notamment sur le continent africain et mettre en lumière des artistes talentueux, qui ne sont pas toujours visibles à l’international.
Des shows dans tout Rabat
Depuis l’ouverture du Festival, le 11 novembre, dont les affiches décorent toute la ville, l’ambiance est à la fête. ?Difficile ?en effet ?de parcourir le centre-ville sans y croiser des musiciens avec une guitare à la main, ?ou d’immenses sacs à dos, prenant la forme de l’instrument qu’il renferme, ou encore des artistes arborant fièrement leurs longues rastas.
Des artistes béninois font le show à la suite de la diffusion du documentaire Gangbé (qui raconte la genèse du groupe béninois)
Le Festival a installé un peu partout des scènes. Il y a des concerts de toutes parts, que ce soit après la production de documentaires musicaux, ?dans la salle ?de la Renaissance, dans les ?bars-restaurants partenaires de l’évènement?, dans le théâtre Mohammed V?. ?Tous les artistes ?conviés ?font leur show pour le plus grand bonheur des mélomanes de la capitale. ?Ils sont, ce mardi une dizaine à se représenter. Les rappeurs ?Smockey du Burkina Faso et DJ ?Awadi? du Sénégal?, ?dans un duo fulgurant notamment, éblouissent? le public. ?Même son de cloche pour : Ali Naaba du Burkina Faso, Monza de la Mauritanie, le groupe ougandais Jemimah Sanyu and Unit, Dissidenten d’Allemagne, la chanteuse Elida Almeida du Cap-Vert, Djamawi Africa d’Algérie. Sans compter le World kora Trio des Etats-Unis et de France, la chanteuse marocaine Nabila Malika Zarfa, le groupe français Ilhaam project, le chanteur guinéen Mo! Kouyaté, la chanteuse La Bronze du Canada ou encore Modou Mahmoud du Maroc.
Des artistes qui font sensation
?Sur la scène du Théâtre Mohammed V, la jeune chanteuse ?capverdienne Elida Almeida, âgée de 20 ans seulement, arborant ses longues tresses, ?marque les esprits tant l’énergie qu’elle dégage? et sa voix? ?sont? puissantes. ?Egalement grande danseuse, elle régale ses fans et invite tout le monde à chanter avec elle. Son talent ne laisse pas le public de marbre, en ce jeudi 12 novembre, notamment ses compatriotes capverdiens résidant au Maroc, très nombreux dans le public, drapeau de leur pays en main. Elle échange en créole avec eux, leur lance des plaisanteries qui leur font éclater de rires, sans compter qu’ils se lèvent tous régulièrement en masse pour scander son nom et danser dans tous les sens. « Je remercie le Visa for Music de m’avoir invitée. Je suis très honorée d’être ici. C’est une formidable opportunité », lance la chanteuse capverdienne en français, dans un accent très chantonnant.
?Le groupe Nabyla Maan et Carmen Paris, composé de deux chanteuses, la première marocaine et la seconde espagnole, enchante aussi le public du théâtre. Un public en grande partie marocain car la chanteuse Nabyla Maan est une véritable star au Maroc. Les voix des deux chanteuses sont merveilleuses, envoûtantes, pleines de charmes, se mêlant parfaitement à la rencontre de la musique orientale et andalouse, qui ne fait plus qu’un, levant ainsi toutes les barrières.
C’est aussi le message que le Visa for music prône : la musique, qui ne connait pas les barrières, est aussi un moyen de réunir des personnes de divers horizons et contrées. Attention toutefois ! Le fondateur du Festival, Brahim El Mazned, refuse d’utiliser le mot musique du monde, qu’il trouve très péjoratif. « On a longtemps cantonné les musique provenant d’ailleurs dans cette catégorie musique du monde, qui ne veut pas dire grand’chose. Il n’y a en fait pas de musique du monde, il y a simplement des musiques. La diversité musicale est très belle, on devrait la prôner plutôt que d’utiliser des termes dévalorisant pour la décrire ».