32 chefs d’Etat et de gouvernement ont fait le déplacement au 24e Sommet France-Afrique qui se tient à Cannes, jeudi et vendredi. « L’Afrique et l’équilibre du monde » est le thème retenu pour ce sommet, qui devrait être le dernier auquel participera le président Jacques Chirac, dont le mandat a connu une baisse de l’influence française sur le continent africain.
De notre envoyé spécial à Cannes
Ce ne sont pas des stars de cinéma qui monteront et descendront les marches du Palais des festivals de Cannes, jeudi et vendredi, mais les chefs d’Etat et de gouvernement africains. Le 24e Sommet France-Afrique accueille 48 pays sur les 53 que compte le continent. Il sera le dernier auquel participera le président français Jacques Chirac, s’il ne brigue pas de troisième mandat. Il sera ouvert en présence de la chancelière allemande, Angela Merkel, dont le pays assure à la fois la présidence du G8 et de l’Union européenne, qui organisera au second semestre 2007, le premier Sommet UE-Afrique, au Portugal.
Le thème de ce sommet est « l’Afrique et l’équilibre du monde ». Pour l’évoquer, trois débats ont été retenus : « les matières premières et l’Afrique », « la place et le rôle de l’Afrique dans le monde » et « l’Afrique et la société de l’information ». Cependant, les chefs d’Etat ne manqueront pas d’aborder le conflit du Darfour qui ensanglante le Soudan depuis quatre ans, et la Guinée où le président Lansana Conté a décrété l’état de siège lundi dernier – la répression contre les manifestations populaires, qui réclament aujourd’hui le départ du chef de l’Etat, a fait plus d’une centaine de morts depuis le début de l’année.
Depuis vingt ans, l’influence de Paris sur le continent africain s’est fortement réduite sur les plans économiques et politiques. L’Afrique, dont les matières premières et les marchés sont fortement convoités, ne représente plus que 5,1% du commerce extérieur français. La Chine, dont le président vient d’achever sa première tournée sur le continent, est devenue le premier partenaire économique de l’Afrique et concurrence la France même dans des pays de son ancien « pré-carré » colonial.
L’influence déclinante de la France
Mercredi soir, le président Jacques Chirac a dîné avec plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement africains, lesquels ne seront que 32 représentés à Cannes, alors qu’ils étaient 41 au sommet organisé à Pékin, en novembre dernier. Parmi les absents de marque : le président ivoirien, Laurent Gbagbo, dont les relations ne sont pas au beau fixe avec Paris. Laurent-Désiré Kabila, qui a déclaré que « la situation en République démocratique du Congo exigeait sa présence » ; Abdoulaye Wade, le Sénégalais, en pleine campagne électorale ; Paul Kagamé, invité à Cannes, mais qui a rompu ses relations diplomatiques avec la France ; le président sud-africain Thabo Mbeki, « retenu, selon le porte-parole de l’Elysée, par des obligations impérieuses qui relèvent de la politique intérieure » ; Robert Mugabe, frappé depuis 2002 par des sanctions « ciblées » de l’UE, dont notamment l’interdiction de voyager dans l’Union ; le roi Mohamed VI dont l’épouse doit accoucher prochainement ; et encore, le président tunisien Zine El-Abidine Ben Ali.
Certains chefs d’Etat qui ont fait le déplacement, tel le président du Djibouti, doivent se demander aujourd’hui s’ils ont bien fait de pointer le bout du nez. Ainsi, à peine arrivé, a-t-il reçu de la justice française une convocation à comparaître dans le cadre de l’affaire du juge Borel, assassiné à Djibouti en 1995. Mais il serait surprenant que l’invité du Président Chirac soit réellement inquiété.
Dans une interview publiée par le Figaro, lundi dernier, Brigitte Girardin, ministre délégué au Développement, affirmait que « ce que l’on appelle la « Françafrique » n’existe plus depuis longtemps. Nous avons désormais avec les pays africains une relation de partenariat. Nous n’imposons plus nos projets de coopération, nous en discutons. » Elle ajoutait néanmoins qu’il ne fallait pas négliger « la dimension personnelle et affective » des relations qu’entretenait Jacques Chirac avec les dirigeants africains, lesquels « sont, selon la ministre, inquiets parce qu’ils ne veulent pas perdre le meilleur avocat qu’ils ont jamais eu ». Ce 24e Sommet France-Afrique et le départ probable du président Chirac pourraient marquer le début d’une nouvelle ère dans les relations de la France et de l’Afrique.