« Sa tombe ressemble à la tombe d’un homme « sans pays » […]
Ils voulurent se débarrasser de son sang.
Ils l’ont envoyé en terre avant que son corps n’ait refroidi.
Voilà pourquoi son sang continue de crier jusqu’à nous. »
« L’intime est politique. » Charlotte Pudlowski
Le 19 mars 2020, un homme d’état africain, grand notable bamiléké, est mort seul à Neuilly, ruiné puis abandonné par son sang, exploité par son parti, oublié par son village et lâché par son pays. Dieu ait son âme, mes mots et mon combat sont pour son corps…
La dernière fois que j’ai vu mon père, il ne m’a pas reconnue. Peut-être a-t-il joué la comédie afin d’éloigner les serpents. C’était en 2017, à l’hôpital américain où il allait mourir seul moins de 3 ans plus tard sans personne après qu’on lui ait tout pris même son honneur en l’exhibant et en le transformant en un joujou politique.
Il m’a envoyé le message codé qu’il était prisonnier et en danger. Il a fait attention, il savait que contrairement à cette petite caste obèse de Bourgeois et de Barons du Cameroun et d’ailleurs prête à tout pour un verre de Pétrus qui ne pense plus, je ne saurais pas voir son viol sans le dénoncer. J’ai crié. Personne n’a voulu entendre. Beaucoup savaient et ont permis une extorsion qui s’est achevée par un parricide rentable financièrement et politiquement…
Ce jour-là, Victor Fotso allait subir une opération pour se faire mettre une prothèse valvaire et il n’y avait avec lui que son garde du corps et celle, qui pour provoquer sa deuxième crise cardiaque en février 2020 après l’avoir forcé á faire la campagne de trop, lui affirma que sa fille handicapée faisait du porno ! Je me souviens du regard impuissant de mon papa. Il était de nouveau un petit garçon perdu qui avait besoin de sa mère. Je suis partie sans savoir que je ne le reverrais plus. J’ai porté plainte pour le protéger puis « laissé » sans aller jusqu’au bout en pensant que tirer des coups de feu en l’air permettrait qu’on laisse mourir Fotso en paix. J’ai eu tort.
C’est également pour cette raison que je judiciarise !
J’assume et revendique pleinement la nature politique de mon acte sans avoir aucune visée électorale, je ne vais pas à Yaoundé et ne prendrai pas le chemin de Hiala, et sans attaquer personnellement les classes dirigeantes. En faisant du droit, j’affirme deux choses. Un, Victor Fotso a été trahi par l’état du Cameroun qui a choisi de légitimer ses violeurs en agissant comme le font tous ceux qui justifient l’abominable en parlant de consentement. Les valeurs ancestrales de nos régions ou même celles du monde moderne nous enseignent pourtant qu’il n’est pas possible pour un vieux monsieur de consentir à sa propre spoliation particulièrement lorsqu’il est le dernier bamiléké. Deux, je n’ai pas confiance en la justice camerounaise. Elle a cassé l’empire Fotso en instrumentalisant les erreurs du fils pour humilier et détruire le père. Oui, mon papa a commencé à mourir le jour de l’arrestation d’Yves Michel Fotso. Presqu’à contre cœur, je me tourne vers la justice française qui. sans être parfaite, sera, je l’espère, plus autonome et pourra confirmer qu’il n’est pas acceptable en France de voler un vieil africain jusqu’à la mort. African lives matter !
La fin de vie de Fotso n’est pas une affaire de famille mais un scandale d’état ! Je judiciarise parce qu’avec une inculture, une haine et une bêtise incroyables on essaie de réduire Fotso à la taille lilliputienne de certains de ses enfants et de le vulgariser dans cette perpétuelle fuite en avant qui fait du Cameroun, le pays où la décadence est un fête et où il est possible d’enjamber des cadavres pour aller danser, boire et manger.
Je judiciarise pour mettre la justice française devant ses responsabilités en prenant les miennes qui sont celles d’un avocat qui sait ce que peut le droit. Je judiciarise sans être aveuglée par un désir de vengeance, sans craindre le jugement des sans couilles qui vivent dans un livre de Gérard de Villiers. Je judiciarise pour dire haut et fort que la famille Fotso est une familia grande, que mon père a été violé et que tout comme la succession, le Vaudeville est une distraction.
Personne n’a vu la dépouille de mon père. On a pris des photos où on voyait sa joue droite décomposée avant de mal l’enterrer. Puis, on a inventé cette fable saugrenue et de mauvais goût qu’il voulait avoir dans son cercueil son portable alors qu’on le lui avait confisqué ses derniers jours de peur qu’il ne parle. Je judiciarise pour qu’on rende à Fotso ce qui appartient à Fotso. Sans vérité, le temps des héritiers ne peut commencer !
Le 19 mars 2020, un homme d’état africain, grand notable camerounais est mort seul à Neuilly, ruiné puis abandonné par son sang, exploité par son parti, oublié par son village et lâché par son pays. Dieu ait son âme, mes mots, mon combat sont pour son corps…
Christelle Nadia Fotso