Le Sénégal n’est pas qualifié pour parler d’impunité


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Le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Madické Niang, a déclaré ce jeudi, à propos d’une amnistie ou d’un exil éventuel de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, être « contre toute forme d’impunité ». « On se donne les moyens, demain, de faire en sorte que de tels faits ne puissent plus voir le jour », a-t-il ajouté après sa rencontre avec le nouveau président ivoirien, Alassane Ouattara.

La proposition de principe du responsable politique sénégalais se comprend mais ce pays est-il en mesure de donner des leçons quand les victimes du dictateur tchadien Hissène Habré, qui a trouvé exil au Sénégal, réclament encore que l’ancien chef d’Etat soit jugé ? A leur décharge, les autorités sénégalaises seraient en passe, selon Le Soleil, de signer un accord avec l’Union africaine en vue de la mise en place d’une Cour internationale ad hoc pour juger l’ancien président tchadien. Cette cour prendrait le relais de la Cour pénale internationale (CPI) « qui s’est déclarée incompétente au motif de la non rétroactivité de la loi », a expliqué le quotidien sénégalais en mars dernier. Les faits dont sont accusés l’ancien président tchadien sont antérieurs à l’installation de la CPI. Aussi, les Africains se sont-ils engagés à juger Hissène Habré pour les crimes commis entre 1982 et 1990 où il était au pouvoir.

Dans un article publié récemment dans un autre journal sénégalais Kotch, il était question de la « Mauvaise note des Américains sur le Sénégal » concernant l’impunité et la corruption. Des maux dénoncés dans le rapport 2010 du Département d’Etat américain sur la situation des droits de l’Homme au Sénégal qui a été publié le 8 avril dernier. Mais pas besoin de chercher Outre-Alantique ce que les Sénégalais ne cessent de dénoncer dans leurs différentes manifestations depuis quelques mois.

« Il faudrait que l’Afrique soit le continent de la bonne gouvernance et de
la démocratie. Pour cela, on a besoin que des exemples soient donnés », a
affirmé le ministre Madické Niang. Avant donc de s’intéresser à la question de l’impunité en Côte d’Ivoire, le Sénégal devrait peut-être joindre le geste à la parole. Notamment en organisant un scrutin présidentiel transparent en 2012 d’autant que la question de la distribution des cartes d’électeurs fait déjà polémique.

Quand la lumière sera faite, au propre comme au figuré, sur l’impunité au Sénégal, « Notre pirogue » (éthymologie du mot Sénégal) aura alors le droit de faire la leçon et de conduire les Africains dans la bonne direction. « Qui ne veut pas se faire voir ne doit pas faire de bruit (« Kuy yoot du sëkët », littéralement « quelqu’un qui ne veut pas faire de bruit ne doit pas éternuer »), rappelle le proverbe wolof.

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