Kigali refuse de participer aux négociations de Lusaka. Le Rwanda résiste aux pressions internationales et embarrasse son principal allié congolais. La faiblesse des forces d’interposition prévues par l’ONU l’encourage dans cette voie.
« Non, personne. Ni président. Ni ministres. Ni délégation. Si vous voulez savoir pourquoi, demandez au président Chiluba qui le sait plus que quiconque ». C’est par ces mots que l’ambassadeur rwandais à Bruxelles, Jacques Bihozagara, nous a confirmé, jeudi 15 février, en milieu de matinée, que le Rwanda serait totalement absent des négociations de paix en République Démocratique du Congo (RDC) qui se déroulent actuellement à Lusaka.
C’est dire si l’annonce d’un déploiement d’observateurs de l’ONU sur les différents fronts, le 26 février, doit être accueillie avec prudence.
D’abord, jusqu’à maintenant, seulement 207 observateurs militaires ont été déployés, sur une force autorisée de 5.500 hommes, en raison de la poursuite des combats. Pire : le secrétaire général de l’ONU Kofi Annan n’entend en envoyer que 500 protégés par 2 500 casques bleus. Dérisoire au vu de l’immensité des lignes de front et des imposantes forces en présence qui s’affrontent sur un territoire aussi grand que l’Europe occidentale.
20 000 soldats en RDC
Enfin, avec ses 20 000 hommes présents en RDC, le Rwanda constitue la principale présence étrangère en RDC. Le principal soutien également du mouvement rebelle, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD).
Certes son leader, Adolphe Onusumba, a donné des gages d’indépendance vis-à-vis de son puissant parrain. « Les Rwandais ont le droit de ne pas participer à ce sommet, mais nous avons nos propres intérêts », a-t-il déclaré, visiblement gêné par l’intransigeance de la présidence rwandaise.
Lors de déclarations d’une rare violence, Kigali a accusé à maintes reprises le président zambien, Frederick Chiluba, de partialité dans un conflit qui se déroule à ses portes et dans lequel il joue le rôle de médiateur.
Les Rwandais reprochent à Lusaka d’avoir laissé transiter des bateaux armés loyalistes dans ses eaux territoriales du lac Tanganyika et de ne pas avoir arrêté des miliciens hutus rwandais qui s’étaient réfugiés en Zambie.
Certes le principal allié du Rwanda, le président ougandais Museveni, a emboîté le pas de Kagame en boycottant les pourparlers, invoquant sa campagne électorale. Mais il a tout de même pris soin d’envoyer une délégation à Lusaka. Manière de dire que la porte n’est pas fermée. Le Rwanda pourrait se retrouver bien seul, s’il persistait dans son intransigeance. Face à la communauté internationale, lors de la prochaine réunion du Conseil de sécurité sur la RDC qui aura lieu le 22 février, il lui faudra lâcher du lest. Nul doute que les négociateurs européens, belges, français, américains et surtout, l’Afrique du Sud, incarnée par le « faiseur de paix » Nelson Mandela, parient sur ce scénario. Optimiste.