La Cour suprême britannique a rendu, ce mercredi, sa décision au sujet du transfert au Rwanda des demandeurs d’asile présents au Royaume-Uni. La haute juridiction a tout simplement rejeté cette proposition qui, depuis le début, faisait couler beaucoup d’encre et de salive. Une décision que contexte Kigali.
Exit la proposition d’envoyer au Rwanda les demandeurs d’asile, quelle que soit leur provenance, arrivés illégalement au Royaume-Uni ! La Cour suprême britannique a tranché, ce mercredi. La haute juridiction a estimé que le Rwanda n’est « un pays tiers sûr ». Puisque le pays traîne « un bilan médiocre en matière de droits de l’homme » et « des anomalies systématiques dans les traitements des demandes d’asile ». Pour la Cour suprême, la décision d’envoyer au Rwanda les demandeurs d’asile est incompatible avec certaines conventions pourtant validées par le Royaume-Uni. Il y a par exemple la Convention européenne des droits de l’homme, même si elle est fréquemment mise en cause dans le débat public britannique, mais aussi la Convention relative au statut des réfugiés ou la Convention des Nations unies contre la torture.
Un échec pour le gouvernement conservateur de Rishi Sunak
La décision de la Cour suprême intervient tout juste deux jours après l’éviction de Suella Braverman, ministre de l’Intérieur, de l’équipe gouvernementale. Elle faisait partie des principaux soutiens au projet initié par le gouvernement de Boris Johnson, en avril 2022. Pendant qu’elle était aux affaires, elle est même allée jusqu’à déclarer, au cours d’une interview, que ce serait « son rêve » de voir décoller le premier avion pour le Rwanda avec à son bord des migrants clandestins. Dans sa lettre de démission rendue publique mardi, Suella Braverman s’en est vertement prise au Premier ministre, Rishi Sunak, dont elle a critiqué la politique, et qu’elle a accusé de n’avoir rien fait pour anticiper sur une décision négative de la Cour suprême.
Au total, le verdict de la haute juridiction constitue un véritable échec pour le gouvernement conservateur et son chef, Rishi Sunak, qui a fortement soutenu le projet comme moyen de lutte contre l’immigration clandestine. Toutefois, le Premier ministre britannique ne s’avoue pas encore vaincu : « Ce n’est pas le résultat que nous souhaitions. Mais nous avons passé, ces derniers mois, à nous préparer à toutes les éventualités et nous maintenons notre engagement de stopper les bateaux », a-t-il déclaré.
Une riposte immédiate du Rwanda après la décision de la Cour suprême
Kigali, pour sa part, a très vite réagi à la décision de la Cour suprême britannique, rejetant totalement les termes utilisés par l’institution. « Nous contestons la décision selon laquelle le Rwanda n’est pas un pays tiers sûr pour les demandeurs d’asile et les réfugiés », a riposté la porte-parole de la Présidence rwandaise, Yolande Makolo. Reste à savoir si le gouvernement britannique va maintenir son accord avec le Rwanda ou s’il doit chercher un autre pays partenaire. Puisque dans son propos, Rishi Sunak a rappelé le fait que la Cour suprême « a confirmé que le principe de renvoi des migrants illégaux vers un pays sûr [était] légal ».
Les tribulations d’un projet contesté à sa naissance
Validé dans un premier temps par la justice britannique, en décembre 2022, le projet a failli être mis en œuvre avec le départ d’un premier vol en direction du Rwanda avec à son bord des migrants, en juin 2022. Mais, une intervention in extremis de la Cour européenne des droits de l’homme a pu empêcher le vol. Avant que la Cour d’appel de Londres ne revienne sur le projet, en juin dernier, remettant en cause la capacité du Rwanda à accueillir les migrants. Le pays de Paul Kagame n’étant pas considéré comme « pays tiers sûr ». Non content de la décision de la Cour d’appel, le ministère de l’Intérieur britannique avait introduit un recours que la Cour suprême vient de rejeter.