Le renvoi de l’influenceur algérien Doualemn vers la France exacerbe les tensions diplomatiques


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Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune (05 oct 21)
Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a vivement dénoncé, mercredi, un « précédent grave » à la suite de l’expulsion de l’influenceur algérien, Doualemn, vers la France. Ce dernier avait été renvoyé à la frontière après la publication d’une vidéo sur le réseau social TikTok, dans laquelle il appelait à la violence. Ce renvoi, qui intervient dans un contexte déjà tendu entre Paris et Alger, a soulevé des inquiétudes au sein du gouvernement français, qui évoque des implications diplomatiques lourdes.

Lors de la séance hebdomadaire de questions au gouvernement, Jean-Noël Barrot a exprimé son désaveu face à cette expulsion, qualifiant l’action des autorités algériennes de « posture d’hostilité ». Le ministre a précisé que le président de la République et le Premier ministre organiseront prochainement une réunion avec les ministres concernés pour analyser la situation et définir les mesures à adopter. L’objectif est de résoudre cette crise sans que la relation bilatérale entre la France et l’Algérie n’en souffre davantage.

Alliances stratégiques entre la France et plusieurs pays

Selon Barrot, bien que la France ait des alliances stratégiques avec plusieurs pays, cela ne doit pas nuire à ses relations avec l’Algérie, un voisin important de la Méditerranée. « La France est un pays souverain qui définit ses relations et ses engagements avec d’autres nations comme elle l’entend », a-t-il précisé. Il a souligné que la politique française vis-à-vis du Maroc n’a en rien diminué l’importance de ses relations avec l’Algérie.

Cette expulsion de Doualemn s’inscrit dans une série d’incidents diplomatiques qui ont vu des influenceurs algériens, accusés de propagande violente, être épinglés par les autorités françaises. Jean-Noël Barrot a rappelé que l’influenceur avait été expulsé après avoir été visé par un arrêté ministériel d’expulsion, le qualifiant de « responsable d’appels au meurtre ». Doualemn a été renvoyé en Algérie malgré la possession d’un passeport biométrique valide, ce qui constitue, selon le ministre, une violation des accords entre les deux pays.

Acte préjudiciable aux relations diplomatiques

Cette expulsion est considérée par la France comme un acte préjudiciable aux relations diplomatiques, un précédent qu’elle juge « grave ». Actuellement détenu dans un centre de rétention en Algérie, Doualemn fait face à des poursuites judiciaires, et son cas est désormais examiné sous l’angle de la justice. Jean-Noël Barrot a également fait part de ses préoccupations concernant la détention de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, dont la situation est jugée « injustifiée » par la France.

Le ministre a exprimé sa volonté de se rendre à Alger pour discuter de ces questions de manière constructive. Il a affirmé que la France et l’Algérie n’ont aucun intérêt à laisser perdurer des tensions diplomatiques inutiles. De son côté, la diplomatie algérienne a vivement réagi à ces accusations. Dans un communiqué publié samedi dernier, Alger a dénoncé ce qu’elle appelle une « campagne de désinformation » lancée par l’extrême droite française, et plus spécifiquement par certains membres du gouvernement français. Selon les autorités algériennes, l’expulsion de Doualemn représente une tentative de la part de certains secteurs politiques en France de raviver des tensions historiques avec l’Algérie.

Une expulsion « arbitraire et abusive »

L’Algérie considère que l’expulsion de Doualemn est « arbitraire et abusive » et qu’elle repose sur des motifs politiques. Le communiqué insiste sur le fait que l’influenceur, qui vit en France depuis 36 ans, est parfaitement intégré dans la société française, avec un permis de séjour valide depuis 15 ans et une famille stable. Il est père de deux enfants, nés d’un mariage avec une ressortissante française, et travaille dans un emploi stable depuis plus de 15 ans. Ces éléments, selon Alger, lui confèrent des droits légitimes qu’il n’a pas pu défendre à cause de son expulsion rapide et contestée.

De plus, les autorités algériennes soulignent que Doualemn n’a pas eu l’opportunité de se défendre devant les juridictions françaises et européennes, notamment dans le cadre de la procédure judiciaire prévue pour le 24 février prochain. L’Algérie estime que ce renvoi vers la France permettra à Doualemn de répondre aux accusations qui pèsent contre lui dans un cadre judiciaire transparent et équitable.

Éviter une rupture plus profonde

Le pays souhaite également souligner que la décision d’expulsion est une mesure qui ne correspond pas aux normes internationales de protection des droits humains, et qu’elle empêche l’individu concerné de faire valoir ses droits devant un tribunal. Ce nouvel incident survient dans un contexte de relations diplomatiques tendues entre la France et l’Algérie, deux nations historiquement liées par des événements marquants. Les désaccords sur des sujets comme la mémoire coloniale, les droits de l’homme, et les politiques migratoires ont exacerbé ces tensions.

Bien que les autorités françaises aient souligné la nécessité de maintenir un dialogue constructif, le climat actuel semble propice à une exacerbation des différends. Le cas de Doualemn représente ainsi un point de friction supplémentaire dans une relation déjà fragile. À l’heure actuelle, l’avenir des relations franco-algériennes reste incertain, et les deux gouvernements sont attendus pour travailler à apaiser les tensions et éviter une rupture plus profonde.

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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