La victoire du « oui » au référendum pour adopter la Nouvelle Constitution burundaise, organisé lundi dernier, a été écrasante. Il l’emporte avec 91,4% des voix, contre 8,6% pour le non, selon les résultats communiqués mardi 1er mars 2005 en fin d’après-midi par la Commission électorale nationale indépendante. Ce référendum, premier scrutin électoral depuis 1993, s’inscrit dans le cadre d’un processus de paix destiné à établir une équité ethnique entre les Hutus majoritaires et la minorité Tusti, qui détenait jusque-là le pouvoir.
« Oui » massif pour la Nouvelle Constitution burundaise. Selon des derniers résultats partiels révélés mardi soir, le nouveau texte constitutionnel a été approuvé à 91,4%. La participation, massive, a déplacé au moins 80% des 3,1 millions d’électeurs inscrits. Le référendum proposait une répartition plus équitable du pouvoir entre les deux ethnies nationales (Hutus et Tutsis) dans ce pays qui tente de sortir de onze années de guerre civile. Il met fin à la mainmise, presque sans partage, de la minorité tutsie (14% de la population), qui dirige les institutions politiques et militaires quasiment sans interruption depuis l’indépendance de ce petit pays d’Afrique centrale.
Un enjeu limité
Le résultat obtenu est sans surprise car tous les partis de la majorité hutu (85% de la population du Burundi) avaient appelé à approuver ce texte, tandis que la majorité des partis tutsi s’étaient prononcés contre. Il s’agissait donc d’un enjeu limité, non seulement parce que la victoire était déjà quasiment acquise, mais surtout parce que la Constitution, soumise à référendum, est déjà appliquée depuis le 1er novembre 2004. En cas de victoire du « non », elle serait restée en vigueur jusqu’à la mise en place d’un nouveau pouvoir.
L’élection s’est déroulée dans le calme. Aucune menace rebelle n’était à craindre pendant le déroulement du scrutin. Les Forces Nationales de Libération (FNL, hutu), la dernière rébellion active au Burundi, avaient promis de ne pas perturber le vote, en annonçant au gouvernement, dès le 1er février, être prêts à négocier avec lui « sans conditions préalables ».
Les principes de la Nouvelle Constitution
La Nouvelle Constitution stipule que le Président élu, doit être assisté de deux vice-présidents appartenant à des ethnies différentes. Le Conseil des ministres ainsi que l’Assemblée Nationale doivent comprendre 60% de Hutus et 40% de Tutsis, et le Sénat 50% de Hutus et 50% de Tutsis. Le texte prévoit aussi la refonte de l’armée et de la police pour assurer une parité entre les deux ethnies.
Les réactions face aux résultats restent mitigées. L’actuel Président Burundais, Dominitien Ndayizeye, a déclaré via son porte-parole avoir « un sentiment de satisfaction car l’adoption de ce texte est une étape extrêmement importante dans le processus de renouer avec la démocratie et la paix ». Selon un diplomate en place à Bujumbura, la capitale du Burundi, « le référendum n’a pas véritablement d’enjeu, mais il est important dans la mesure où c’est un lever de rideau avant les véritables élections ». Carolyn McAskie, le premier représentant onusien en poste dans le pays a qualifié pour sa part de « journée historique » ce lundi 28 février, car « c’est une étape de paix pour tous les Burundais ».
Vers un nouvel avenir
De son côté, le principal parti Tutsi, l’Union pour le progrès national (Uprona) s’est dit « inquiet » de la victoire sans appel du « oui ». « Ce qui nous inquiète dans la Nouvelle Constitution, c’est la monopolisation du pouvoir par un groupe politico-ethnique, et les dérives que cela peut entraîner », a déclaré le porte-parole de l’Uprona, Gérard Nduwayo.
Les premières négociations entre le pouvoir, l’opposition et une partie des rebellions remontent à la mi 1998, avec les accords d’Arusha. Un processus de paix qui va prendre sept années, émaillées d’accords non respectés. Le référendum voté lundi est le premier d’une série de sept qui doivent être organisés d’ici le 22 avril 2005 pour mener à bien la transition. Suivront notamment des législatives et des communales, tandis que le Président doit être élu par les parlementaires. La date de ces scrutins n’a pas encore été fixée. Pour la première fois depuis onze ans, les Burundais vont se doter d’institutions politiques dont les membres sont élus. Un premier pas encourageant vers une démocratie effective.
Par Smahane Bouyahia