David Diop est sans doute l’un des poètes africains les plus talentueux, et peut-être le plus révolutionnaire. Ses écrits engagés, avant et pendant les indépendances, on fait l’effet d’une bombe dans le monde littéraire francophone. Une vie au service des siens, de son continent, conclue par une mort tragique.
David Mandessi Léon Diop, est né à Bordeaux le 9 juillet 1927 d’une mère camerounaise et d’un père sénégalais. Ce dernier décède alors qu’il n’a que huit ans, laissant à sa femme le soin d’élever leurs six enfants, dont le jeune David à la santé fragile, qui passe une bonne partie de son temps entre les mains des médecins. Ces longs moments de solitude à l’hôpital lui laissent le temps de découvrir la littérature et tout particulièrement la poésie. Il connaît la guerre puis l’occupation allemande, et débute des études de médecine pour finalement se réorienter vers les lettres modernes. C’est une révélation pour lui ! Particulièrement grâce aux cours d’un certain Léopold Sédar Senghor, qui l’inspire et le rend fier de ses origines africaines.
Sa licence en poche, il décide d’ailleurs d’aller enseigner au Sénégal, le pays de ce père qu’il a peu connu et dont son professeur lui a tant parlé. Là-bas, il se marie à une Sénégalaise et observe les mauvaises conditions de vie des Africains. Il décide alors de se lancer véritablement dans une lutte anticoloniale par le biais de sa plume. Ses premiers poèmes sont ainsi publiés aux éditions Présence Africaine en 1956, dans un recueil intitulé « Les coups de pilon ». Tout le monde s’accorde sur un point : un génie des lettres est né.
De Senghor à Sékou Touré, la radicalisation
En 1958, David répond à l’appel lancé par Sékou Touré aux intellectuels. Le leader guinéen, en plein conflit avec de Gaulle au lendemain de l’indépendance de son pays, veut du renfort pour favoriser la décolonisation mentale et contrer l’influence de la France en Afrique. Le poète se radicalise en intégrant le Parti africain de l’indépendance (PAI) et cumule les postes de professeur à Kindia et de directeur de l’Ecole normale.
Depuis la Guinée, il croit en son combat et voit peu à peu la naissance des Etats africains. Les Africains sont en effet en 1960 sur la voie de la décolonisation. Il accompagne leurs efforts en préparant de nouvelles oeuvres. Des écrits que personne ne lira. Pour quelle raison ? Alors qu’il est en vacances, son avion s’écrase en mer le 29 août avec ses manuscrits au large de Dakar. Aucun survivant. Verdict de la commission d’enquête : causes de l’accident indéterminées. Officiellement, aucun coupable donc, si ce n’est le destin. Toutefois, une chose est sûre, la plume révolutionnaire du poète gênait beaucoup de monde…
Un exemple de poème dérangeant : « Le temps du martyr »
« Le Blanc a tué mon père
Mon père était fier
Le Blanc a violé ma mère
Ma mère était belle
Le Blanc a courbé mon frère sous le soleil de route
Mon frère était fort
Le Blanc a tourné vers moi
Ses mains rouges de sang
Noir
Et de sa voix de maître
« Hé boy, un berger, une serviette, de l’eau ! »