Sur le continent, très peu de personnes âgées bénéficient d’une pension de retraite. La faute à des régimes de retraite peu adaptés aux réalités du continent, qui abrite une large part de travailleurs informels (non salariés). Adapté à ce type de travailleurs, le plan épargne retraite (PER) gagne progressivement du terrain, poussé par les compagnies d’assurance et de nouveaux entrants sur ce marché prometteur.
Une société se juge à la manière dont elle traite ses anciens, dit un adage populaire. Mais ce rapport aux personnes âgées varie, parfois très fortement, d’une époque à l’autre, mais aussi d’un endroit du monde à l’autre, d’une culture à l’autre. Alors que les séniors occidentaux finissent bien souvent leurs jours isolés ou relégués dans une maison de retraite, les personnes âgées africaines restent, pour leur part, au sein de leurs familles. Une particularité culturelle certes, mais qui se veut aussi le miroir d’une réalité socio-économique : la plupart des Africains âgés ne bénéficient pas d’une pension de retraite.
Moins d’un Africain sur cinq bénéficie d’une pension de retraite
Cette insuffisance des systèmes de retraite est un problème de taille sur le continent. En effet, l’Afrique devrait compter, d’ici à 2050, près de 200 millions de personnes âgées de 60 ans et plus. Et comme ailleurs dans le monde, l’espérance de vie des retraités africains a sensiblement augmenté au cours des décennies passées. Conçus et mis sur pieds à l’époque des décolonisations, les régimes de retraite africains – et notamment ceux d’Afrique francophone – ont alors été calqués sur le régime par répartition en vigueur en France. Hérité des années 1960, le modèle de ces régimes reposait sur des prévisions socio-économiques qui n’ont parfois pas été suivies d’effets, comme le fait de pouvoir s’appuyer sur une large masse de salariés cotisants.
Inadaptés à la réalité du développement de l’Afrique, certains de ces régimes de retraite ont, à partir des années 2000, vu leurs cotisations baisser à cause du chômage. D’autres, comme à Djibouti ou plus récemment au Gabon, se sont déclarés en défaut de paiement, incapables de verser leurs pensions à leurs bénéficiaires. La principale cause de ces difficultés réside dans le poids écrasant du secteur informel dans les économies d’Afrique subsaharienne, où il représenterait, selon la Banque mondiale, jusqu’à 36 % du PIB – et 60 % des emplois non-agricoles, selon le Fonds monétaire international (FMI). Les régimes de retraite par répartition reposant sur les cotisations des actifs salariés, il semble ambitieux, dans ces conditions, de maintenir à flot des systèmes de retraite efficients sur un continent où la majorité de la population active ne cotise pas – ni pour elle-même, ni pour les personnes âgées.
Lire aussi : Sénégal : les assurances de Diomaye Faye à la communauté internationale
Résultat : aujourd’hui, on estime que seulement 10 % à 20 % des Africains en situation de cotiser ou de bénéficier d’une retraite le font. « On a pensé que le salariat allait conquérir l’Afrique et amener tous les travailleurs à la sécurité sociale, mais ça n’a pas été le cas », constate dans Jeune Afrique Denis Chemillier-Gendreau, fondateur d’un cabinet de conseil en redressement des caisses de retraite. Que faire pour redresser la barre ? Pour le spécialiste, qui appelle à des réformes structurelles sur le continent, « si les (Africains) ne vont pas spontanément vers la protection sociale, alors il faut que la protection sociale aille vers ces populations ».
Bientôt de nouveaux acteurs ?
Face à des régimes nationaux de retraite insuffisants ou défaillants, d’autres solutions existent pour assurer aux Africains un troisième âge serein. Ainsi du plan épargne retraite, un système qui permet aux actifs du secteur informel et formel d’épargner sur le long terme afin de se constituer un capital leur servant à financer leurs besoins une fois leur vie professionnelle derrière eux. Adapté, contrairement aux régimes de retraite traditionnels, aux travailleurs non salariés, le PER est donc une solution idéale pour les entrepreneurs et les populations africaines exerçant dans le secteur informel ou travaillant à leur compte.
C’est donc sans surprise que les groupes d’assurances se positionnent en Afrique sur ce segment porteur, à l’image des Wafa Assurance, SUNU Assurance, Assurances Générales du Congo ou encore du groupe panafricain NSIA Assurance qui proposent à leur clientèle de souscrire à des PER dans leurs établissements. Un quasi-monopole qui pourrait bien ne pas durer avec l’arrivée de nouveaux acteurs comme les assets managers, qui permettent également aux actifs d’investir pour préparer leur retraite.