Le photographe Alain Herman s’invite chez Nikon


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Kene photo Alain Herman
Kene photo Alain Herman

Alain Herman est l’un des premiers photographes noirs à avoir ses photos dans la très sélecte galerie du site de Nikon France. Une consécration pour ce timide et très discret homme d’images antillais qui, bien que très occupé, a pris le temps de discuter avec Afrik et de partager sa passion.

Par Dina M.

Très peu de personnes le savent, mais Alain Herman n’est pas allemand encore moins blanc. Le photographe, derrière plusieurs portraits de personnalités afro-antillaises du showbiz ou de la politique ( Passi, Miss France 2003, Kaysha, Nelson Mandela, Blaise et Chantal Compaoré, Pascal Lissouba) et plusieurs campagnes publicitaires, est l’un des premiers photographes noirs et antillais à exposer dans la galerie du site de Nikon France. Une consécration pour ce timide et très discret photographe que rien n’avait destiné à devenir photographe. Il rêvait, en effet, de devenir ingénieur du son, mais le destin, au hasard d’un cadeau et d’une rencontre, en a décidé autrement.

Afrik.com : Que représente pour vous le fait d’avoir été retenu sur le site de Nikon ?

Alain Herman :Pour moi pouvoir exposer sur le site de Nikon France, c’est l’événement de l’année parce que plusieurs personnes pourront découvrir mon travail à travers le monde. C’est surtout une grande reconnaissance de la part de la profession ! Mais il n’en demeure pas moins qu’il est tout aussi valorisant pour moi d’être reconnu par la communauté. Il vaut mieux balayer devant sa porte que devant celle des autres. J’espère pouvoir continuer longtemps à faire ce que j’aime dans ce métier. Il y a tellement à faire dans la communauté et de femmes noires à mettre en valeur, que pour moi chaque pas est une victoire.

Afrik : Comment êtes-vous devenu photographe ?

Alain Herman : Je suis arrivé à la photo par hasard, je travaillais dans un hôpital et un ami m’a offert un appareil photo. J’ai commencé en amateur, puis curieux j’ai acheté un livre sur la photographie, puis j’ai dévoré tout ce que je pouvais sur le sujet. Un jour, un collègue martiniquais qui travaillait avec moi à l’hôpital, m’a proposé de rejoindre un club photo avec lui, le club Bièvre à Paris. C’est là que j’ai appris les basiques sur la photo, mais je ne connaissais pas bien le métier. J’ai voulu en savoir plus et en lisant les revues j’ai découvert les différents secteurs dans la photographie. Je m’y suis mis à fond et, un jour, j’ai tout quitté pour m’y consacrer. Comme je photographiais beaucoup les gens, je me suis spécialisé dans la mode, les portraits et la beauté. Je ne sais pas si c’est la chance, l’envie de réussir ou la créativité, mais c’est de là que c’est parti. Quitter l’administration et tous ses conforts pour se lancer dans la photo, vivre de sa passion n’est pas évident. Tous mes proches me prenaient pour un fou, mais dans la vie il faut savoir prendre des risques ! Cela fait 13 ans que je suis photographe et 18 ans que j’ai attrapé le virus. Il n’y a rien de plus passionnant de faire le métier qu’on aime, c’est beaucoup de sacrifices, mais les résultats en valent la peine.

Afrik.com : Quelles sont les difficultés que vous avez rencontré sur votre parcours ?

Alain Herman : La France est un pays assez difficile pour les étrangers, surtout dans le milieu de la mode, où c’est une grande famille et où il y a beaucoup de copinage. C’est un cercle très fermé comme le cinéma et la télévision. Il y a quelques photographes noirs connus qui travaillent dans la mode, comme Eric Traoré, un métis africain et le sud africain Kotolofo. Mais le milieu de la mode est un milieu difficile pour tous, il y a l’élite d’un coté et de l’autre ceux qui galèrent quelle que soit leur couleur de peau. Mais je n’ai pas désespéré, parce que je savais que les choses finiraient par changer. Etant très discret, je n’aime pas me mettre en avant, je préfère que mes photos parlent pour moi. Je n’ai donc pas beaucoup démarché. J’ai fait quelques tentatives, puis j’ai laissé le ‘bouche à oreille’ faire son travail. Si bien que les gens ne savent pas que je suis noir, donc certains clients sont très surpris de le découvrir. Mais comme ils connaissent mon travail me font confiance.

Afrik.com : Qu’est ce qui, pour vous, rend une photo exceptionnelle ?


beaute Alain HermanAlain Herman :
La personne, plus la lumière et comment la mettre en valeur. Une photo, c’est l’angle bien plus que le modèle, c’est au photographe de savoir quelle lumière et comment mettre son modèle en valeur. Détendre l’atmosphère pour mettre la personne à l’aise, parce que beaucoup de personnes ont tendance à se crisper ou à se dénigrer avant une séance photo.

Afrik.com : Quels sont vos projets pour cette année ?

Alain Herman : Le magazine SHENKA (dont le numéro 2 vient de paraître en kiosque NDLR). C’est un projet que j’avais depuis longtemps, mais il a été très difficile à réaliser. C’est parti de la constatation qu’il n’y avait pas de magazine afro 100% beauté digne de ce nom. J’ai remarqué qu’on est à 50% pour ne pas dire 35% dans tous les domaines en ce qui concerne la presse ethnique. Les annonceurs payent plus cher ailleurs et veulent renégocier. Quand ils viennent chez nous ils payent à 50%. On a beau vouloir faire les choses bien et mettre les moyens de le faire nous ne faisons pas le poids par rapport aux autres. C’est un constat depuis que je travaille pour Shenka. Je ne sais pas si cela va changer, mais il faut peut être que nous nous imposions et que nous arrêtions de nous plier et de nous vendre à bas prix. C’est pour cela que la presse ethnique bat de l’aile.

Afrik.com : Pourquoi vous focaliser sur un magazine et pas, par exemple, sur un livre photo ou une expo ?

Alain Herman : Le livre photo viendra, c’est peut être pour plus tard. Pour le moment ce n’est pas primordial, les autres photographes qui font des livres sont photographes de guerre et autre moi je suis dans la mode. J’avais commencé un travail artistique, qui n’avait rien à voir avec la mode, sur la peau noire, mais le laboratoire qui faisait ces pellicules a fermé, donc tout le travail est en suspens. Le magazine est la suite de mon travail. Il me permet de faire ce que j’ai envie de faire. J’espère que ce projet va marcher, que les annonceurs et les lectrices nous soutiendront. Après j’aimerais passer à la réalisation, celle de clips ou de publicité. C’est un peu la suite de la photo car c’est le même corps de métier.

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