Le mouvement séparatiste casamançais orphelin et divisé


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L’abbé Augustin Diamacoune Senghor, le charismatique leader du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) est décédé le samedi dernier à Paris. Avec sa disparition, c’est la cohésion de son mouvement et le processus de paix en Casamance qui sont remis en question.

Le chef du mouvement séparatiste casamançais, l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, s’est éteint, à l’âge de 78 ans, samedi dernier, à l’hôpital du Val-de-Grâce à Paris. Le leader du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) y avait été admis depuis le 20 octobre. Sa disparition est un grave coup porté à la cohésion d’un mouvement miné par de nombreuses dissensions internes alors que la région s’est engagée dans un processus de paix avec le gouvernement sénégalais. L’abbé avait signé le 30 décembre 2004 un « accord général de paix » mettant fin à une guerre d’indépendance commencée le 26 décembre 1982. Cependant, les négociations de paix qui devaient se poursuivre ont déjà été reportées à deux reprises en 2005 et 2006. De même, des dissidents du mouvement, avec à leur tête, Salif Sadio, chef autoproclamé d’Atika, la branche armée du MFDC, continuent d’attaquer l’armée sénégalaise, depuis la mi-août, à la frontière gambienne.

Une situation qui révèle la ferme volonté de certaines branches du mouvement séparatiste, en dépit de l’accord signé avec Dakar, de concrétiser leurs velléités indépendantistes. Outre Salif Sadio qui représente la branche armée, on compte parmi eux, dans l’aile politique, Mamadou Nkrumah Sané, le secrétaire général adjoint du MFDC, basé à Paris. Tous deux respectaient néanmoins l’autorité de l’abbé Augustin Diamacoune Senghor en dépit de leurs divergences de point de vue. Selon Robert Sagna, le maire de Ziguinchor, « sa disparition porte un certain nombre de problèmes au niveau de la tête du mouvement. C’était le seul intellectuel de haut niveau au sein de ce mouvement. […] L’abbé était le fédérateur de ce mouvement. Il faut trouver un rassembleur pour consolider l’unité du mouvement sans laquelle la négociation devient difficile ».

Mouvement cherche désespérément nouveau leader

Le secrétaire général actuel, Jean-Marie François Biagui, en réagissant au décès de l’abbé Diamacoune, a en effet déclaré qu’« un monument énorme vient de s’écrouler » et souhaité que « le processus de paix entamé par Diamacoune se poursuive ». Ce dernier point de vue n’est pas partagé par son adjoint. M. Sané a d’ailleurs déjà annoncé les couleurs dans un entretien accordé au journal sénégalais Le Quotidien publié dans son édition de ce lundi. Le responsable du MFDC en charge de l’aile extérieure a indiqué qu’« au moment où il (l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, ndlr) signait ces accords, vous n’avez jamais vu son secrétaire général adjoint (M. Sané, ndlr) à ses côtés. […] Depuis le 17 mars 1993, le jour auquel l’Etat du Sénégal a kidnappé notre secrétaire général en Guinée-Bissau et amené à Ziguinchor sur une civière manu militari, nous avions dit ceci : « tout ce qu’on lui fera dire, lui avec Sidy Badji (le chef d’Etat-major d’Atika aujourd’hui décédé), si ce n’est pas la liberté du peuple casamançais, toutes ses déclarations et signatures seront nulles »».

Selon les textes du mouvement indépendantiste tels que commentés par son secrétaire général adjoint, la succession est ouverte au « secrétaire général et (à) son adjoint ». « Mais, ça, c’est ce que les institutions avaient préconisé, a-t-il poursuivi. Entre la date de la mise en place des ces institutions et aujourd’hui, il y a une vingtaine d’années. Ainsi, les membres qui composent ces institutions définiront (la succession), en fonction de la situation d’aujourd’hui et de demain ». Mamadou Nkrumah Sané s’était autoproclamé, durant la maladie de l’abbé, secrétaire général, titre que lui avait contesté la branche armée, elle aussi, à plusieurs têtes.

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