Le chirurgien marocain Chakib Aït Benhamou a réalisé, le 16 août dernier à l’hôpital du 20 août à Casablanca, un exploit mondial. Il a réussi à opérer une complication grave qui peut survenir à la suite d’une opération du cancer du larynx. L’agrégé en oto-rhino-laryngologie espère que cette première montrera au monde que l’Afrique possède le potentiel de faire de grandes choses si elle s’en donne les moyens.
Première mondiale en chirurgie au Maroc. Le Professeur Chakib Aït Benhamou a réussi l’exploit mondial d’opérer, le 16 août dernier à l’hôpital du 20 août (CHU Ibn Rochd, Casablanca), une grave complication qui peut survenir à la suite d’une opération du cancer du larynx. Alors que son patient, âgé de 70 ans, récupère bien de l’intervention, ses collègues se réjouissent de cette nouvelle qui restera gravée dans l’Histoire de la médecine. Le spécialiste en chirurgie cervico-maxillaire-faciale espère que cet exploit prouvera au monde que l’Afrique possède de grandes potentialités.
Le pays ravi de la nouvelle
« Je suis fier qu’une équipe médicale marocaine ait pu réussir cet exploit », explique Chakib Aït Benhamou. Et ce ne sont pas ses confrères qui s’en plaindront. Ni le Roi Mohamed VI qui, dans son discours du 20 août dans le cadre du 50e anniversaire de la Révolution du Roi et du peuple, a notamment insisté sur la nécessité de s’appuyer sur les sciences et la technologie pour développer le pays. Une allusion directe, selon le chirurgien marocain, à l’intervention réalisée mi-août.
Le patient qui a bénéficié de l’opération avait déjà été opéré une première fois, mais un trou de 15 centimètres de longueur s’était formé sur son pharynx et son œsophage cervical. Une conséquence qui se produit parfois. De fait, « il ne pouvait plus s’alimenter sans que la nourriture ne s’échappe dans la gorge », explique Chakib Aït Benhamou. En près de trois heures, l’agrégé en Oto-Rhino-Laryngologie et son équipe de trois aides chirurgiens et deux réanimateurs ont changé la vie du malade.
Remonter l’œsophage thoracique jusqu’à la langue
« Nous avons eu l’idée de remplacer la perte de substance en remontant l’œsophage thoracique, qui descend jusqu’à l’estomac, jusqu’à la base de la langue. Nous avons alors suturé le tube à la base de la langue. Nous avons ainsi reconstitué une filière digestive qui devrait lui permettre de manger normalement d’ici 10 ou 15 jours. Et il pourra aussi parler, après une rééducation, peut-être d’ici deux mois », explique le Pr Chakib Aït Benhamou.
D’autres méthodes d’opération étaient connues. On peut remplacer le trou en effectuant un prélèvement sur le colon. Mais cela nécessite notamment une équipe abdominale de haut niveau et une transplantation vasculaire. Les chances de réussite sont moins grandes que celle de l’intervention pratiquée par l’équipe de Chakib Aït Benhamou. « Avec les années d’expérience et la connaissance approfondie de l’anatomie humaine, nous avons voulu mettre au point une opération révolutionnaire », souligne le chirurgien, qui précise que la modestie reste de mise.
Montrer au monde de quoi l’Afrique est capable
« Révolutionnaire », mais qui, par sa complexité, ne sera reproductible que dans une vingtaine de centres médicaux dans le monde. Mais le spécialiste, qui dédie l’exploit réalisé à son « Roi, à la Francophonie et à Jacques Chirac », explique que le but est que cette technologie profite à tous. Qu’elle soit une réussite pour le monde, mais avec un caractère humanitaire. Ainsi, il définit le Maroc comme un pont entre la France et les pays francophones et n’exclut pas que d’autres Africains apprennent la technique sur place.
La nouvelle de cette intervention réussie a aussi pour but de révéler au monde de quoi le Continent est capable. « Il faut montrer aux Marocains et au reste des Africains que l’on ne peut compter que sur notre potentiel pour nous en sortir. On ne pourra pas se développer si nous ne fournissons pas d’efforts personnels », explique-t-il avec entrain. En somme, l’avenir des Africains est entre leurs mains.