Le Maroc fait la chasse à la contrefaçon. La dernière opération menée à Agadir a permis la saisie de 4 200 cassettes vidéo, 9 films pornographiques et 41 magnétoscopes. D’autres opérations vont être lancées à travers le pays.
La lutte contre la contrefaçon repart avec force. La dernière opération menée à Agadir en témoigne. Suite à une plainte du Syndicat National de la Production et Distribution Artistique (SNPDA), les pouvoirs publics ont démantelé, il y a quelques jours, un vaste réseau de piratage et contrefaçon de films vidéo. Les faits remontent au mois dernier. Après un travail de longue haleine, Mohammed Louma, secrétaire général du SNPDA, réussit à identifier une filière opérant depuis vingt ans dans la duplication et ventes de films vidéo.
Le 6 septembre dernier, le SNPDA saisit le procureur du Roi. Le lendemain, la machine judiciaire se met en branle. La police, soutenue par la Gendarmerie Royale, effectue une perquisition des pirates. La descente s’avérera fructueuse. Pas moins de 4 200 cassettes vidéo, 9 films pornographiques, 41 magnétoscopes et des centaines de CD sont saisis. Un butin évalué à 370.000 DH. Le propriétaire de l’établissement est arrêté. Deux de ses hommes de main réussissent à prendre la fuite. L’affaire est traitée avec une grande célérité au niveau de la justice. Une fois les investigations achevées, le Tribunal de Première Instance d’Agadir rend son verdict le 18 septembre dernier.
Enfants impliqués
Le responsable du réseau est condamné à un mois de prison ferme et à une amende de 700 000 DH. Une peine qui met fin à une large hémorragie dans le secteur de la distribution. L’activité des pirates a mis à mal deux sociétés de distribution de la région, Supervidéo et Studio 7, qui ont été contraintes de déposer le bilan il y a quelques mois, entraînant la suppression de 14 emplois. « Nous ne comptons pas nous arrêter là. Cette action n’est que le début d’une série d’opérations que nous mènerons à travers l’ensemble du territoire, et avec l’appui des pouvoirs publics », déclare Mohamed Louma.
La contrefaçon a pris ces dernières années des proportions inquiétantes au Maroc. Aucun secteur n’est demeuré à l’abri de ce fléau. Le textile, la production artistique et le cosmétique en ont largement fait les frais. Le phénomène s’étend même aux produits alimentaires. Les actions menées par les autorités compétentes n’ont pas réussi à éradiquer le mal. Les entraves sont importantes. Un cadre juridique adéquat a longtemps fait défaut. Les textes servant d’appui à la répression n’ont été adoptés qu’à partir de 1997. Ils demeurent encore méconnus et peu appliqués. Autre obstacle, l’implication massive des enfants dans l’activité de contrefaçon. Dans la plupart des cas, les pirates ont recours à des mineurs pour effectuer cette tâche. Ainsi, en cas de poursuite judiciaire, ces derniers demeurent exempts de toute responsabilité pénale.
Enjeux financiers
Les enjeux financiers ne doivent pas être dissimulés. Ils sont la raison principale de cette lutte. Au-delà de la protection de la part des marchés, les associations oeuvrant dans ce domaine tirent des bénéfices pécuniaires importants. Une enveloppe de 10% leur est versée par l’Etat pour chaque vente de matériel et produits saisis. De plus, la multiplication des actions dans le domaine de la contrefaçon leur permet de jouir de fonds non négligeable. L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle et Commerciale (OMPIC) soutient le Maroc, avec plusieurs millions de DH annuellement.
Pour ne pas perdre cette manne, les associations sont donc obligées de multiplier les actions. Une pétition a d’ailleurs été adressée au Département de la Justice pour réaliser un broyage public de 500 000 cassettes vidéo saisies entre 1995 et 2001. L’événement sera filmé pour être visionné par l’OMPIC et servir de gage à la continuité de l’aide débloquée. Comme le dit l’adage, si « l’argent ne fait pas le bonheur », il mobilise néanmoins bien des volontés.
Abdelfattah Berhil