La société Profil Afrique est spécialisée en marketing politique en Afrique. Basée à Montréal, elle regroupe une équipe 100% africaine pour développer l’image des dirigeants du continent. Dans quelles mesures peuvent-ils travailler dans un milieu aussi délicat et gangrené ? Julien Koréa, représentant au Sénégal et correspondant en Afrique de l’Ouest de Profil Africa, répond aux questions d’Afrik.
L’image de la politique africaine est loin d’être reluisante. Corruption, pressions diverses, bourrage des urnes… Tous les moyens sont bons pour gagner ce que beaucoup considèrent comme une place au soleil. La société Profil Africa, société-conseil en communication et en marketing politique et social en Afrique, fait fi de tout cela et entend développer un professionnalisme qu’elle juge à terme de plus en plus payant pour les hommes politiques africains. Julien Koréa, représentant au Sénégal et correspondant en Afrique de l’Ouest de la société basée à Montréal, s’est prêté au jeu des questions-réponses.
Afrik.com : Quel est l’intérêt de faire de la communication politique en Afrique dans la mesure où les résultats électoraux sont souvent connus d’avance ?
Julien Koréa : L’Afrique est en mutation et Profil Africa s’inscrit dans la dynamique de cette nouvelle Afrique qui s’annonce. Il est vrai que les manipulations des résultats électoraux sont encore multiples sur notre continent. Il n’y a qu’à regarder les remous actuels au Nigeria suite à la réélection au premier tour d’Obasanjo. Par contre, nous pouvons constater que les choses commencent vraiment à bouger et qu’une réelle volonté de transparence apparaît, surtout au niveau des élections locales et législatives. Pour les présidentielles, les mauvaises habitudes perdurent mais Profil Africa veut, à travers les services qu’elle offre, contribuer à l’éclosion d’une concurrence politique de qualité. Ce n’est pas parce qu’il y a des problèmes qu’il faut abdiquer.
Afrik : Vous croyez en l’intégrité des hommes politiques en Afrique ?
Julien Koréa : L’Afrique a besoin de leaders politiques ambitieux, intègres et modernes. Il y en a beaucoup sur notre continent mais il leur manque souvent une bonne stratégie de communication. Il manque cette forme qui rehausse le fond, qui donne au programme politique son attrait, sa pertinence et qui au bout du compte finit par convaincre l’électorat. Des manipulations peuvent toujours être tentées. Mais lorsque l’on réussit à convaincre la majorité du public, la médiatisation à outrance aidant, aucune tricherie ne peut aboutir, comme pour la Côte d’ivoire et les tentatives de Guei contre Gbagbo. Par contre, en Afrique, il faut aussi se méfier des candidats qui crient à la fraude simplement parce qu’ils ont perdu…
Afrik : Les hommes politiques africains ont-ils vraiment conscience de la nécessité d’une communication professionnelle ?
Julien Koréa : La multiplication d’élections pluralistes sur notre continent encourage nos politiques à revoir leurs approches stratégiques et à faire appel à l’expertise des conseillers en communication. Il ne faut plus seulement prôner le changement ou un autre discours à la mode, ça tout le monde peut le faire ! Il est maintenant impérieux de se distinguer positivement par rapport à la forte concurrence qui se développe sur l’échiquier politique. Nos leaders politiques ont encore beaucoup à apprendre mais cela se fera très vite. De fait, la plupart n’ont pas encore dans leur équipe des conseillers en communication. Nous sommes à une époque où il n’y a plus de place pour l’amateurisme. Le » village planétaire » oblige tout le monde à un nivellement par le haut… même en politique !
Afrik : Peut-on faire de la communication politique en Afrique sachant qu’il n’y existe, bien souvent, pas de réelle liberté d’expression ?
Julien Koréa : S’il y a un domaine où l’Afrique a fait un énorme bond, ces dix dernières années, c’est justement au niveau de la liberté d’expression. Nos multiples journaux et autres médias sont là pour en témoigner. Internet est aussi un vecteur sans frontière qui reprend l’information à la vitesse de la lumière, de Tombouctou à Johannesbourg, en passant par Dakar, Kinshasa et Nairobi ! La liberté d’expression est donc de plus en plus une réalité africaine avec même quelques excès parfois… Il faudrait maintenant s’assurer d’une plus grande pluralité de l’information fournie par des médias. Encore un travail de professionnalisation à accomplir….
Afrik : Peut-on assurer la communication de n’importe qui et défendre des idées qu’on ne partage pas forcément ?
Julien Koréa : Oui, par nature on peut assurer la communication de n’importe qui, comme un avocat de la défense peut défendre n’importe quelle cause. C’est au niveau des valeurs, des convictions, de l’éthique de l’expert en communication que la différence se joue. Voilà pourquoi Profil Africa a décidé, pour soutenir des valeurs positives en Afrique, de faire signer une charte morale à ses clients. Notre équipe s’engage aussi de son côté à respecter un code d’éthique strict. Ainsi, par exemple, nous ne pourrons offrir nos services à une personnalité poursuivie pour génocide ou pour malversations financières. Toutefois, pour les cas litigieux nous ferons appel à notre conscience, nous ne nous baserons que sur des preuves solides ou des décisions judiciaires crédibles pour refuser un client potentiel. C’est la raison pour laquelle nous procédons à quelques recherches avant de nous engager avec un client.