La présence d’hydrocarbures au Nord du Mali est attestée depuis une quarantaine d’années. Mais ce n’est qu’en 2008 que les premiers barils de pétrole devraient sortir des forages du consortium australien Baraka Mali Venture. C’est la première société à avoir conclu, en 2004, un accord avec l’Etat malien pour la prospection et l’exploitation de l’or noir. Sept autres entreprises sont également candidates à l’aventure pétrolière.
Le Mali va-t-il entrer dans le cercle des producteurs de pétrole en 2008 ? Le pays a signé une concession sur cinq blocs d’exploitation, situés dans le bassin de Taoudenni au Sahara, à un consortium australien. Baraka Mali Venture (BMV), qui devrait ouvrir ses bureaux à Bamako d’ici une semaine, va investir 30 milliards de FCFA dans la recherche sur les quatre prochaines années et 500 millions de FCFA pour la formation de personnel malien. Selon la convention renouvelable deux fois pour trois ans à partir de 2008, le consortium aura également à sa charge la production et le transport des hydrocarbures. Les missions de terrain vont débuter dès mars prochain. Des géologues de l’entreprise ont déjà effectué quelques repérages, faisant appel à des mineurs des mines de sel de Taoudenni pour les guider. La société débute, cette année, des forages dans la partie mauritanienne du bassin de Taoudenni.
Au pays de l’or blanc, qui a fait la richesse de Tombouctou et alimenté le mythe des caravanes jusqu’au début du 20ème siècle, l’or noir existe bien. Depuis les années 1960, l’existence de bassins sédimentaires potentiellement riches en hydrocarbures était connue des géologues russes venus dans le cadre de la coopération entre l’ex-URSS et le Mali. Des Majors de l’exploitation pétrolières comme Elf, Esso, Texaco et Murphy leurs emboîtèrent le pas dans les années 70 et 80. Après quelques relevés et forages infructueux, les compagnies quittèrent la zone pour la mer du Nord plus rentable. Mais avec la flambée du prix du pétrole, qui oscille aujourd’hui autour de 50 dollars le baril, la recherche de nouveaux gisements dans le monde bat son plein. Les bassins remis à jours sur la base des anciennes études au Mali se situent à Taoudenni, Gao, Tullemden, Tamesma et Nara, avec des couches pétrolifères profondes de 2 à 5 km. Le gouvernement malien a délimité 15 blocs de 800 000 km2, ce qui correspond à 65% du territoire national.
10 blocs d’exploitation encore disponibles
Selon Mamadou Simpara, conseiller technique du Ministre des Mines, de l’Energie et de l’eau du Mali sept autres sociétés étrangères sont actuellement en pourparler pour obtenir des conventions de recherche et d’exploitation sur les dix blocs restants. La presse malienne parle de la société d’hydrocarbures chinoise Sinopec, qui aurait signé un accord en août 2004 et d’une compagnie venant de l’Emirat de Bahrein, Energem Petroleum Corporation Ltd. Mais Lamine Alexis Dembélé, directeur national de la Géologie et des Mines, affirme que seule BMV est pour le moment autorisée à exploiter le pétrole malien. Le code pétrolier malien serait particulièrement incitatif pour les entreprises étrangères avec des conditions fiscales et de recherche avantageuses, ce qui explique leur engouement. “La convention dite de partage de production est très appréciée. La société injecte les ressources financières et se rembourse ensuite sur l’exploitation. Le reste est partagé avec l’Etat selon un pourcentage évolutif négocié au cas par cas avec chaque entreprise”, rapporte Lamine Alexis Dembélé. Personne n’est encore en mesure de donner une estimation de la production pétrolière. “Il manque des travaux complémentaires de géophysique et de forage qui seront fait par l’entreprise. L’administration des mines assurera un contrôle des estimations par l’envoi de missions sur le terrain”, ajoute Mamadou Simpara.
“Si l’exploitation du pétrole fonctionne bien, le mode de vie des populations va changer. Des écoles et des dispensaires vont être construits, des emplois seront créés. Les nomades vont se sédentariser”, explique Mamadou Simpara. Les recherches dans la zone de Taoudenni, réputée peu sûre jusqu’à présent à cause de la présence de contrebandiers et de membres du Groupement des salafistes pour la prédication et le combat (GSPC), vont être désormais facilitées car les Etats-Unis ont contribué à pacifier la région. L’armée américaine est effectivement intervenue de novembre 2003 à février 2004, dans le cadre de formations des forces de défense maliennes pour des opérations de maintien de la paix et de lutte contre le terrorisme.
Au-delà des questions sécuritaires, le pétrole malien reste, dans une large mesure, une question de chance et de probabilité. D’après un spécialiste des matières premières, aucune Majors ne se risqueraient à investir au Mali tant que la rentabilité des gisements ne pourra être assurée. En effet, la prospection pétrolière reste un coup de poker. Avec des milliers de km2 de sols à explorer et malgré la présence de données attestant la présence d’hydrocarbures, une entreprise a, malgré tout, quelques chances de forer à côté du gisement.
Par Valentine Lescot